Fermes Dephy Alsace Viticulture
Le réseau de Fermes Dephy Alsace est un collectif historique de 11 exploitations viticoles, créé en 2012. Ces exploitations sont diversifiées et représentatives du territoire en termes de surface (de 6 à 19 ha), localisation (de Uffholtz à Wangen) et type de production (indépendants, coopérateurs, négoce).
Le groupe s'est intéressé à la qualité de l'air et a travaillé sur le choix des produits les moins impactant sur la santé. Il a pour objectif de démontrer, d'expérimenter et de produire des références sur la baisse d'utilisation des produits phytosanitaires pour ensuite les diffuser. En 2020, le groupe a d'ailleurs dépassé son objectif de diminution de l'Indice de Fréquence de Traitement depuis son entrée dans le réseau en atteignant une baisse de 49%. La communication de ces pratiques se fait notamment lors de journées techniques et réunions collectives hebdomadaires qui regroupe de nombreux viticulteurs alsaciens.
Les principaux leviers de réductions utilisés sont la substitution des produits chimiques vers des outils de travail du sol mécanique, la prophylaxie en réalisant un effeuillage afin d'éviter un traitement anti-botrytis, et la réduction de doses grâce aux outils d'aide à la décision notamment.
Depuis 2003 et les derniers millésimes, le vignoble constate les effets du changement climatique avec l'augmentation des températures et des sécheresses de plus en plus fréquentes. Les viticulteurs du groupe souhaitent donc aller plus loin que la simple diminution de l'usage des produits phytosanitaires. Ils s'intéressent aujourd'hui à l'adaptation des vignes au réchauffement climatique, et cherchent à améliorer leur empreinte carbone pour une viticulture plus durable.
Principaux cépages et appellations : AOC Alsace, AOC Crémant d'Alsace et AOC Alsace Grand Cru. 7 cépages principaux.
Spécificités du groupe : diversité des profils de viticulteur, vignoble morcelé et coteaux
Lycées partenaires : Domaine de l'Ecole à Rouffach
Le regard de l'ingénieur réseau :
Le groupe est resté soudé depuis sa création. Les viticulteurs sont toujours dynamiques et motivés à expérimenter et échanger sur les pratiques des uns et des autres pour s'inspirer. L'ajout de 2 exploitations AB lors du renouvellement en 2016 a permis d'approfondir les réflexions du collectif sur l'entretien du sol. Depuis, 4 autres membres sont en conversion AB.
Bien que les profils soient très diversifiés, le groupe s'est rassemblé autour de thématiques novatrices : la qualité de l'air, puis l'adaptation au changement climatique. En effet, la forte densité de population en Alsace et la proximité vignes/riverains est un sujet important dont s'est saisi la profession grâce à l'impulsion du groupe, avant la mise en place des chartes riverains. Pour aller plus loin et tenter d'anticiper les problématiques futures, le groupe se concentre maintenant sur une nouvelle thématique.
Après s'être intéressé à la limitation du transfert des produits phytosanitaires dans l'air, le groupe a choisi de poursuivre son engagement et se pencher sur un nouveau projet :
L'adaptation au changement climatique.
Depuis 2012, le groupe a travaillé à la réduction de l'usage des produits phytosanitaires, en suivant cette baisse à l'aide d'un indicateur : l'Indice de Fréquence de Traitement. Il permet de mesurer l'utilisation des produits en proportion de la surface traitée et de la dose utilisée. Plus l'IFT est faible, moins les traitements sont utilisés. Parmi les différents produits, certains sont d'origine naturelle et appelés biocontrôle (par exemple la confusion sexuelle, les huiles essentielles, le soufre, etc.). Leur part d'utilisation est également mesurée.
La baisse de 43% de l'IFT hors biocontrôle est une réussite et le groupe a pour objectif de maintenir cet IFT bas. Selon la pression des maladies et ravageurs, l'IFT peut varier certaines années (2016, 2021). Les vignerons adaptent chaque année l'utilisation des produits de protection, afin de garantir un rendement suffisant et une qualité sanitaire satisfaisante en fonction de leur objectif de production. Il ne s'agit pas de perdre de vue la rentabilité économique des exploitations.
La part des biocontrôle représente aujourd'hui 50% de l'IFT total. Ces résultats ont pu être obtenus grâce à la mise en place de mesures prophylactiques (gestion de la vigueur, ébourgeonnage, épamprage, effeuillage), l'enherbement des parcelles, l'intégration du travail mécanique du cavaillon, et l'utilisation d'Outil d'Aide à la Décision et de modulation de dose comme Optidose®.
Les viticulteurs avaient également pour objectif de choisir des produits à faible impact sur la santé. Ils ont ciblé les produits de biocontrôle, et ont exclu les produits classés CMR (Cancérigènes Mutagènes et Reprotoxiques). Leur usage se situe proche de 0 aujourd'hui.
Pour compléter, le groupe a travaillé sur l'amélioration de la qualité de pulvérisation, et a testé les panneaux récupérateurs afin de diminuer le phénomène de dérive.
Nouveaux constats
En 2003 et également sur les derniers millésimes, les conditions climatiques caniculaires ont mis en évidence des limites d’adaptation de la vigne. En Alsace, ce fut notamment le cas pour le cépage riesling. Les déficits hydriques, couplés à des températures élevées, ont provoqué d’importants blocages physiologiques ayant pour conséquence une dépréciation qualitative des moûts et des vins. Dans un contexte de modifications climatiques, l’exception de 2003 risque de devenir récurrente, ce qui pousse les professionnels de la filière à trouver des solutions d’adaptation afin de maintenir la qualité et la typicité des vins.
En parallèle, l’agriculture a été identifiée comme jouant un rôle important dans la réduction des émissions de Gaz à Effet de Serre, dont la forte et rapide augmentation ces dernières années cause ce phénomène de réchauffement climatique. L'agriculture est également considérée comme une source de puits de carbone à travers son stockage dans les sols, les plantes, la biomasse, etc. Le constat que nous faisons aujourd’hui est que nous disposons de peu de références en termes de bilan Carbone et émissions de GES au niveau de la viticulture alsacienne.
Objectifs et finalités du groupe :
- Intégrer la thématique d’empreinte carbone à celle de la réduction des produits phytosanitaires
- Adapter la conduite de la vigne face aux situations d’extrêmes climatiques, en étudiant l’adaptation de la haie foliaire, le raisonnement de la charge et de la vigueur, la gestion des sols et l’essai d’éventuelles solutions de produits ou biostimulants ayant un effet supposé d’atténuation des impacts du changement climatique
- Améliorer le microclimat d’une parcelle en tenant compte de son environnement et en s’intéressant à la piste de l’agroforesterie
- Référencer et tenir compte des émissions de GES et du bilan carbone dans les pratiques viticoles
- Communiquer sur des stratégies de diminution d’émissions de GES et d’utilisation des produits phytosanitaires
Témoignage de la structure :
La réduction de l’utilisation des pesticides est une évolution de l’agriculture attendue par la société. Pour que cette évolution soit durable, ces systèmes agricoles doivent être performants. Pour mesurer cela, il faut que les indicateurs de qualité, de quantités et de revenu soient au vert. Les indicateurs sociaux doivent aussi être pris en compte dans cette analyse. Grâce à ce groupe de fermes nous pouvons mettre en œuvre de nouveaux systèmes et mesurer leurs performances.
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