
Système DEPHY AOP - Site de Gaillac - NextGen’VITI

Conception du système
Le système est conçu comme une combinaison de leviers permettant de :
- Réduire la pression des maladies ou des ravageurs
- Substituer des intrants chimiques par des méthodes physiques ou des produits de biocontrôle
- Favoriser la présence des auxiliaires par la préservation ou le renforcement des habitats
- S'appuyer sur la modélisation pour décider de l'application des règles de décision
Cela se traduit par un dispositif de pulvérisation fixe au vignoble pour appliquer des produits de biocontrôle avec réactivité, par l'usage d'un robot de binage sous le rang pour désherber sans herbicides et sans mobiliser la main d'oeuvre pour cette tâche, par la mise en place de couverts végétaux et d'abris à chauves souris, ainsi que par des mesures prophylactiques comme l'effeuillage par exemple pour favoriser le maintien d'un bon état sanitaire au niveau des grappes.
Mots clés :
Robot de binage - Biocontrôle - Pulvérisation fixe - Auxiliaires - Agroécologie
Caractéristiques du système
Type de production | Cépage | Porte-greffe | Densité | Mode de conduite | Hauteur palissage | Année d'implantation |
AOP | Braucol | Gravesac | 4545 | Guyot simple | 1,8 m | 2004 |
Gestion de l’irrigation : Pas d'irrigation Gestion de la fertilisation : En fonction des analyses pétiolaires et de la vigueur des végétaux Gestion du sol : Sans herbicides, combinaison de travail du sol sous le rang et couverts végétaux Infrastructures agro-écologiques : Couverts végétaux et abris pour la faune auxiliaire |
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Agronomiques |
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Environnementaux |
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Maîtrise des bioagresseurs |
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Socio-économiques |
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Le mot de l'expérimentateur
Particulièrement innovant lors de sa mise en oeuvre, le système a attiré l'attention des vignerons pour l'intégration de la pulvérisation fixe et le fonctionnement du robot de binage. La pulvérisation fixe a malheureusement montré ses limites en termes de praticité (usage, nettoyage) et de contrôle de la régularité. Les aspects liés au couverts végétaux sont bien intégrés dans la pratique usuelle au vignoble et l'entretien des dispositifs agroécologiques favorables aux auxiliaires, dont les chauves-souris, est un bon outil de communication. La part importante accordée aux produits de biocontrôle dans la stratégie phytosanitaire permet de réduire l'IFT conventionnel de manière significative, mais expose la production à des pertes parfois importantes par rapport à la stratégie de référence. Les règles de décision ont dû être adaptées en ce sens, notamment à cause de la pression du black-rot, très présent sur le dispositif expérimental.
La maîtrise des adventices est confiée au désherbage mécanique sous le rang et à la pratique des couverts végétaux dans les inter-rangs.
Avertissement : seuls les principaux leviers mis en œuvre dans le cadre de l’expérimentation et permettant une réduction de l’utilisation des produits phytosanitaires sont présentés sur ce schéma. Il ne s’agit pas de la stratégie complète de gestion des adventices.
*(Schéma décisionnel à insérer)
*Tableau à compléter
Leviers | Principes d'action | Enseignements |
Désherbage mécanique robotisé sous le rang | fractionnement, dissociation des mottes et des racines des adventices, déplacement de terre. | Le robot de binage fonctionne, avec une fréquence d'intervention supérieure à celle du tracteur. Si la couverture du sol est trop importante en sortie d'hiver, une première intervention avec le tracteur peut aider. |
Couverts végétaux dans l'inter-rang | La présence d'un couvert implanté limite le développement des adventices indésirables dans l'inter-rang, et donc leur propagation sous le rang. | Pratique facile à mettre en oeuvre, impact modéré. |
Avertissement : seuls les principaux leviers mis en œuvre dans le cadre de l’expérimentation et permettant une réduction de l’utilisation des produits phytosanitaires sont présentés sur ce schéma. Il ne s’agit pas de la stratégie complète de gestion des ravageurs.
*(Schéma décisionnel à insérer)
*Tableau à compléter
Leviers | Principes d'action | Enseignements |
Lutte biologique | favoriser la présence des prédateurs naturels des ravageurs tels que Eudémis. | Disposer des nichoirs à chauves-souris pour augmenter l'activité de prédation n'a pas forcément un grand impact mais constitue un bon support de communication. Le maintien des habitats naturels suffit (arbres, bâtiments refuges) |
Confusion sexuelle | En complément de l'activité de prédation, la confusion permet d'éviter ou de limiter la reproduction des ravageurs | Pression des ravageurs très faible |
Favoriser la biodiversité | Maintien des couverts le plus longtemps possible par exemple | Impact difficilement mesurable, mais à favoriser. |
Avertissement : seuls les principaux leviers mis en œuvre dans le cadre de l’expérimentation et permettant une réduction de l’utilisation des produits phytosanitaires sont présentés sur ce schéma. Il ne s’agit pas de la stratégie complète de gestion des maladies.
*(Schéma décisionnel à insérer)
*Tableau à compléter
Leviers | Principes d'action | Enseignements |
agronomique | réduction de la sensibilité aux maladies par une réduction de la vigueur via l'enherbement et une fertilisation modérée | impact modéré |
prophylactique | réduction des conditions favorables aux maladies par aération de la zone fructifère (effeuillage) | efficace sur Botrytis |
Utilisation de la modélisation du risque | la connaissance du niveau de risque sur les maladies cryptogamiques en fonction des données météorologiques permet de ne traiter qu'à bon escient | à compléter par les relevés d'indicateurs de terrain pour la prise de décision |
* Tableau à compléter
2019 | 2020 | 2021 | 2022 | 2023 | 2024 | |||||||
Mildiou | ||||||||||||
Black Rot | ||||||||||||
Botrytris | ||||||||||||
Ravageurs | ||||||||||||
Adventices |
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Modalité | REF | ECO | REF | ECO | REF | ECO | REF | ECO | REF | ECO | REF | ECO |
* Texte à compléter
Ces résultats très synthétiques sur la maîtrise des bioagresseurs nous montrent un certaine sensibilité du système testé vis à vis du climat, lié à la pression épidémique. Les millésimes 2020 et 2022 ont été plutôt simples à gérer avec la réduction d'intrants, alors que lors des millésimes plus pluvieux comme 2019, 2021, 2023, et 2024 il a été difficile de contenir le Black-Rot, et dans une moindre mesure le Mildiou. La gestion des adventices est aussi impactée, mais de manière moins forte, grâce aux passages répétés du robot de binage.
Performance de production - rendement
le système expérimenté est moins performant sur la production de raisin, avec une plus grande sensibilité aux millésimes à forte pression de maladie.
Performance en matière de réduction d'IFT
Le système expérimenté a réduit considérablement la par de l'IFT conventionnel, grâce à l'utilisation de produits de biocontrôle comme le montre le graphique suivant.
Dans notre système expérimenté, les produits de biocontrôle sont essentiellement le soufre, les extraits d'écorce d'orange (limocide), LBG, COSOGA
Le système Dephy EXPE a permis une forte réduction de l'IFT conventionnel et une consommation énergétique maîtrisée grâce à la robotique et à la pulvérisation fixe. Cependant, il est moins performant que le système de référence en matière de maîtrise des maladies fongiques et cela se traduit sur le rendement agronomique, qui est souvent pénalisé lors des 6 années d'expérimentation.
Installer une pulvérisation fixe dans un vignoble est innovant à plusieurs égards : réactivité pour réaliser les traitements (et donc adaptation à une logique de traitement dépendante des solutions de biocontrôle), diminution de l'exposition des opérateurs aux traitements.
Le système de pulvérisation fixe testé dans le projet a ceci de particulier qu'il était réalisé avec des composants prévus initialement pour la protection antigel : des diffuseurs capables de couvrir le rang sur la longueur par le dessus. Les modifications apportées consistaient à disposer les diffuseurs plus haut, pour pouvoir couvrir la végétation à différents stades de développement. Conscients de la limite du système en termes de qualité de pulvérisation comparativement à un appareil de traitement classique, nous avions envisagé dans un premier temps de réserver son usage : en début de saison pour les produits de contact tant que la végétation n'est pas trop développée (peu d'obstacles aux gouttelettes), et dans un second temps pour les produits systémiques comme le LBG, qui fait partie des solutions de biocontrôle. Sur le papier il y a donc une bonne complémentarité entre les leviers envisagés.

L'intérêt de le mettre en pratique à une échelle importante comme cela a été fait dans le projet, est de se confronter aux aspects pratiques et techniques liés à une telle installation : remplissage avec la bouillie, mise en pression, gestion du temps d'application, gestion des reliquats, rinçage, entretien, sensibilité aux conditions extérieures.
En dehors de la qualité de pulvérisation, qui sans surprise se dégrade au fur et à mesure du développement végétatif, le point le plus crucial reste la gestion des volumes morts liés à l'installation : les tuyaux ainsi que les diffuseurs nécessaires dans chaque rang représentent environ 850 L par hectare. C'est ce volume qu'il faut mettre en pression avant le déclenchement de la pulvérisation au seuil de 2,5 bars. Le volume pulvérisé lors de chaque traitement représente environ 300 L/ha (volume supérieur à une pulvérisation pneumatique ou à jet porté) pour 2 à 3 min de traitement. Pour assurer une pression constante dans l'installation, il faut donc prévoir 1150 L de bouillie par ha pour un traitement, en envisager un système de récupération pour les 850 L restants. La récupération en soi n'est pas très difficile, on peut ouvrir les vannes en sortie d'installation et pousser avec de l'air comprimé, mais il faut prévoir les contenants et la réutilisation. En outre, selon le type de produit employé, un rinçage est indispensable, ce qui implique la génération d'effluents.
En termes de durabilité, une telle installation est soumise à de nombreuses contraintes qui peuvent impacter l'étanchéité et donc la performance du système. Les diffuseurs sont exposés aux passages de machines comme les rogneuses, puisqu'ils sont au dessus de la végétation. Lors du passage de la machine à vendanger ou de la prétailleuse, ils peuvent être cassés ou décrochés, ce qui engendre un temps de maintenance élevé pour des vérifications individuelles.
L'expérience a donc été instructive et les points d'amélioration sont connus, mais le transfert de l'expérimentation vers la production est encore une perspective lointaine.
Le transfert en exploitations agricoles d'un système aussi disruptif n'est pas facile à mettre en oeuvre. Le réseau Dephy permet justement la rencontre des groupes Ferme avec les sites EXPE et malheureusement les pratiques trop éloignées des habitudes des producteurs sont généralement peu adoptées.
Si en revanche, à la place du système dans son intégralité, on envisage le transfert d'un ou plusieurs leviers qui paraissent pertinents et performants, alors la démarche a plus de chances de succès.
La robotique, par exemple, a montré des progrès importants entre le début du projet et sa conclusion. Les performances ont été nettement améliorées, la fiabilité aussi, et le panel d'outils utilisables est plus important, rendant le désherbage mécanique moins contraignant (si on a les moyens d'acheter un robot). Les couverts végétaux ne sont pas remis en question, pas plus que la confusion sexuelle pour la lutte contre les ravageurs. En ce qui concerne l'utilisation du biocontrôle pour n'utiliser les produits conventionnels qu'en dernier recours, le bilan est plus mitigé, mais un projet DEPHY EXPE comme BEE permet d'apporter plus de réponse car plus spécialisé sur le sujet.
Par rapport à l'esprit initial du projet qui était l'intégration d'innovation et de nouvelles technologies dans le système de culture pour aider à la réduction des IFT, nous pourrions aujourd'hui intégrer de nouvelles choses comme des pièges connectés (gestion des ravageurs), des capteurs de sporée (anticipation du mildiou et black-rot). Nous pourrions étendre l'utilisation des robots viticoles à la gestion de la pulvérisation pour pallier les inconvénients rencontrés avec la pulvérisation fixe.
En ce qui concerne l'utilisation des produits de biocontrôle, nous sommes confrontés aux limites de ces solutions dans les millésimes caractérisés par une forte pression, ce qui se traduit par des pertes de récolte qui ne seraient pas acceptables pour les producteurs.
La meilleure piste pour atteindre des objectifs ambitieux de réduction des intrants serait de combiner les leviers éprouvés : utilisation systématique de panneaux récupérateurs sur les pulvérisateurs, intégration sur les robots de solution de traitement, utilisation combinée des capteurs et de la modélisation pour mieux anticiper et positionner les traitements inévitables.
L'aspect économique ne doit pas être oublié, surtout dans le contexte difficile que traverse la filière viticole. Ces solutions innovantes, si performantes et intéressantes soient elles, ne sont pas à la portée de tous les producteurs, et n'ont donc pas, à l'heure actuelle, de dimension générique.