Système ENGRAIS VERT MAX - Les Jardins du Pflixbourg - SEFerSol
Conception du système
Le système Engrais Vert Max (EVmax) est l’un des Systèmes de Culture (SdC) innovants testés dans le projet SEFerSol. Il est évalué en comparaison au système de Référence (REF) et à l'autre système innovant, Conservation du Sol (CONS).
L'objectif du système Engrais Vert Max est de maximiser l'utilisation des engrais verts dans les successions de culture, afin d'atteindre un niveau d'activité biologique du sol capable de fournir des conditions physiques, chimiques, et biologiques favorables à une bonne croissance des cultures récoltées.
Mais la gestion des adventices est supposée facilitée par l'absence d'apports d'engrais et la présence d'engrais verts dès que possible (interculture et intercalaire). Elle peut aussi être affectée en raison de périodes plus courtes de disponibilité du sol pour réaliser des interventions mécaniques (faux-semis, binages).
Mots clés :
Engrais vert max - Maximisation d'engrais verts - Absence d'engrais - Interventions mécaniques - Outils adaptés
Caractéristiques du système
Situation de production : 0.07 ha en plein champ, sur les mêmes parcelles que les autres systèmes. Espèces : identique aux autres systèmes (voir succession de culture ci-dessus). Gestion de l'irrigation : asperseurs, irrigation commune aux 3 systèmes. Fertilisation : pas d'engrais, mais maximisation d'engrais verts (interculture et intercalaire). Interculture : engrais verts de saison, en général un mélange d'espèces (légumineuses, céréales...) à densité 2 ou 3, ayant pour but de fertiliser le sol (ex: vesce, seigle, trèfle, luzerne...). Gestion du sol/des adventices : mécanisé avec outils adaptés (non-rotatifs). Circuit commercial : identique aux autres systèmes, vente directe (magasin et paniers) et en gros. Infrastructures agro-écologiques : pas d'infrastructure spécifique à ce système, mais les mêmes que pour le reste de la parcelle : une haie vive, des bandes fleuries et quelques abris pour les insectes, le long des parcelles. |
Agronomiques |
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Environnementaux |
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Maîtrise des bioagresseurs |
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Socio-économiques |
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Pour être durable, le système innovant doit être au moins aussi performant, voire meilleur, que le système Référence.
Le mot de l'expérimentateur
Le système Engrais Vert MAX veut se passer d'engrais organique en priorité. Gagner en autonomie, sélectionner des mélanges locaux et suffisamment riches pour nourrir les légumes de la rotation, voilà le mot d'ordre d'EVMAX.
- Mise en place systématique d'engrais verts, en période de culture (inter-rang et intercalaires), comme en interculture
- Utilisation d'outils limitée à des outils tractés, pas d'outils animés
- Cultures en planche permanente
- Selon les cultures :
- Utilisation de voile anti-insectes à la place de Success 4 sur Poireau
- Utilisation de toile tissée à la place des bâches plastiques jetables sur courges
Avertissement : seuls les principaux leviers mis en œuvre dans le cadre de l’expérimentation et permettant une réduction de l’utilisation des produits phytosanitaires sont présentés sur ce schéma. Il ne s’agit pas de la stratégie complète de gestion des adventices.
*Ne seront précisés dans le tableau suivant que les leviers qui ne sont pas utilisés, ou pas de la même façon, sur le système de référence
Leviers* | Principes d'action | Enseignements |
Haute densité d'engrais verts | Renforcer la densité des engrais verts pour limiter le développement des adventices par étouffement et concurrence | Pas d'effet sur la pression d'adventices lors des cultures suivantes |
Désherbage manuel | Compenser le surplus d'adventices par du désherbage manuel localisé | Permet d'éviter les pertes de rendement mais augmente nettement le temps de travail |
Utilisation de toile tissée | Sur courge. Limite la prolifération des adventices, à la fois au niveau de la bâche et dans les passe-pieds | Diminution du temps de travail par rapport à la bâche classique après prise en compte du désherbage évité |
Avertissement : seuls les principaux leviers mis en œuvre dans le cadre de l’expérimentation et permettant une réduction de l’utilisation des produits phytosanitaires sont présentés sur ce schéma. Il ne s’agit pas de la stratégie complète de gestion des ravageurs
*Ne seront précisés dans le tableau suivant que les leviers qui ne sont pas utilisés, ou pas de la même façon, sur le système de référence
Leviers* | Principes d'action | Enseignements |
Utilisation du filet anti insecte | Sur poireau, afin de lutter contre la mouche mineuse. | Testé sur poireau d'hiver, pour empêcher le vol fin d'été. Testé à la fois en protection longue ou plus courte. Les deux fonctionnent, donc privilégier la version courte à l'avenir. |
Avertissement : seuls les principaux leviers mis en œuvre dans le cadre de l’expérimentation et permettant une réduction de l’utilisation des produits phytosanitaires sont présentés sur ce schéma. Il ne s’agit pas de la stratégie complète de gestion des maladies.
*Ne seront précisés dans le tableau suivant que les leviers qui ne sont pas utilisés, ou pas de la même façon, sur le système de référence
Leviers* | Principes d'action | Enseignements |
Limaces | Insectes volants | Doryphores | Mildiou | Adv. Annuelles | Adv. Vivaces | |
2018 | ||||||
2019 | ||||||
2020 | ||||||
2021 | ||||||
2022 | ||||||
2023 |
Vert : Bonne maitrise
Jaune : Maitrise limitée
Rouge : Non maitrisé
Globalement, le système est très peu sensible aux bioagresseurs. Ces dernières années, les adventices ont été un peu plus problématiques, nécessitant plus de passages, en lien avec un moins bon développement de l'EV intercalaire. Pour autant, le stock semencier a bien diminué depuis le début du projet. Pour le reste, les doryphores sont extrêmement présents en année Pomme de Terre et les phytos sont insuffisants, mais cette pression est à lier avec la situation de l'exploitation du site, où des pommes de terres sont cultivées chaque année à moins d'une centaine de mètres du lieu d'expérimentation.
Rendements
Les performances du système EVMAX se traduisent par des rendements équivalents à la référence, sur 3 cultures : pomme de terre, poireau et carottes.
Au niveau des potimarrons, cette courge a été choisie car elle est la seule dont les rendements ont été mesurés en 2023, permettant 4 répétitions. Néanmoins, pour d'autres variétés de courges, telles que le butternut, sur les 3 années durant lesquelles cette variété a été suivie sur le projet, les rendements ont été supérieurs à ceux du système de Référence. Il semble donc qu'au niveau des courges, les résultats soient variétés-dépendants.
Plus flagrant en revanche, les moindres rendements en laitue et en chou. Pour ceux-ci, deux axes d'explications principaux s'offrent à nous : le rôle du potassium dans ces cultures d'une part, et le manque affiché de potassium sur le système EVMAX, sur lequel nous reviendrons plus bas ; et la dégradation des engrais verts, qui même en cas de broyage, peut s'avérer trop lente pour fournir de l'azote suffisamment rapidement pour une culture courte comme la laitue ou une culture au besoins rapide comme le chou.
Autonomie
L'autonomie peut prendre différentes formes : autonomie matérielle, autonomie en phytosanitaires, autonomie en fertilisants...
Entre nos systèmes REF et EVMAX, la différence se joue au niveau des fertilisants.
Nous présentons dans le graphique ci-dessus l'aspect économique, et voyons déjà qu'il est positif pour le système EVMAX, avec des dépenses de fertilisation moins importantes que le système de référence.
Il est à noter qu'avec les résultats présentés au dessus et en dessous, sur les aspects de rendement et de fertilité chimique, un rééquilibrage des coûts s'effectuera peut-être pour améliorer la performance et compenser le manque en certains éléments.
En revanche, au-delà de l'autonomie financière, une autonomie géographique est à noter. Sur le système EVMAX, l'intégralité des engrais verts utilisés dans les dernières années provient de la région Grand-Est. Cette proximité de la semences est une des force d'un système maximisant l'usage des engrais verts par rapport à un système d'engrais classique.
Fertilité chimique
Concernant les questions de fertilité, le système EVMAX a des résultats équivalents à la référence, à l'exception des concentrations en éléments minéraux P, K et Mg.
En effet, si les engrais verts permettent une autonomie en azote grâce à l'introduction de légumineuses, ils n'apportent pas suffisamment dans les autres éléments, en particulier le potassium, qui, comme on peut le voir sur le graphique ci-dessus, se retrouve sous le seuil optimum pour le bon développement de nos cultures.
Aussi, à ce niveau, une complémentation serait à envisager. Complémentation qui n'a pas été réalisée dans le cadre de ce projet, où l'idée était de conserver les mêmes règles de systèmes pour en observer à la fois les forces et les limites.
L'évaluation multicritère des systèmes de SEFerSol est basée sur les 5 objectifs de l'expérimentation : Amélioration de la fertilité du sol, amélioration de la qualité de l'eau drainante (ici, concentration en azote nitrique), maitrise des adventices, autonomie en intrants et durabilité économique. Au vue de la complexité des indicateurs, le choix a été fait de subdiviser les objectifs d'amélioration de la fertilité et de durabilité économique en 3, pour une vision plus détaillée
Le scoring a été fait en sélectionnant des indicateurs pertinents pour chaque catégorie (détail sur la page globale SEFerSol), en mesurant la différence entre ces indicateurs sur REF et sur EVMAX et en appliquant un logarithme pour resserrer les résultats. Un score > 1 indique des performances meilleures pour EVMAX, un score < 1 de moins bonnes performances.
Les engrais verts sont la base du système (d'où son nom). Leurs effets sont visibles sur les différents indicateurs étudiés.
Au niveau de la fertilité du sol, on remarque un effet des engrais verts sur les caractéristiques du sol : en effet, les racines viennent réaliser un véritable travail du sol, permettant un milieu plus poreux et des agrégats plus fins. Pour ce qui est de la chimie du sol, en revanche, le bilan est plus mitigé : si le système parvient globalement à être à l'équilibre en azote et en phosphore, il souffre d'un manque de magnésium et surtout de potassium.
En revanche, les engrais verts ont d'autres atouts : ils permettent de gagner en autonomie, avec principalement un prix plus bas que les engrais organiques utilisés, tout en permettant des rendements équivalents, à l'exception de la culture de chou sur laquelle nous reviendrons par la suite.
Autre point positif des engrais verts, le rôle de piège à nitrate : en effet, dans des sols sablo-limoneux tels que celui sur lequel est conduit le projet SEFerSol, les lessivage sont facilités ; la présence en permanence d'engrais verts permet de limiter ce risque.
Le transfert des pratiques du système "EVMAX" vers les exploitations agricoles est relativement simple, et ce pour plusieurs raisons, les principales étant que ce système ne nécessite pas de matériel particulier, excepté peut-être un rouleau pour les exploitations n'en possédant pas.
Autre point en faveur du système, il est possible de le mettre en place tant sur grande que sur petite surface, à condition d'avoir un semoir adapté pour les semis en interligne sur grande surface.
En revanche, le pilotage de l'irrigation peut représenter un frein à la mise en place à grande échelle.
Ce système "EVMAX" nous a globalement apporté satisfaction, en faisant au moins aussi bien que la référence sur tous les points, et mieux sur 3 points en particulier, la fertilité physique du sol, la qualité de l'eau et l'autonomie.
En termes d'enseignements après 9 ans de projet, deux choses sautent aux yeux :
- Le système a besoin d'une complémentation en éléments minéraux, principalement en potassium et magnésium. Toutefois, la seule carence observée l'a été sur chou. Pour le reste, les rendements sont équivalents. Il serait intéressant de répéter l'expérience, en tentant un apport, pourquoi pas une fois par rotation avant choux. Cela n'a pas été fait dans ce projet.
- La biomasse est l'un des facteurs fondamentaux du fonctionnement des engrais verts. Si pour les engrais verts hivernaux, la question est assez peu présente, la présence d'engrais verts en intercalaire ou en inter culture sur la période estivale nécessite une irrigation, ce qui peut être un frein au développement de la pratique. L’une des solutions serait de jouer plus sur les variétés pour favoriser la résistance, mais cela risquerait de nuire à l'autonomie du système.