Combinaison des leviers de réduction de l’usage du cuivre
Le cuivre est un des seuls produits minéraux, avec le soufre, autorisés par le règlement européen de l’agriculture biologique pour lutter contre les bactéries et les champignons. Notamment, en viticulture, le cuivre est le seul fongicide utilisable en agriculture biologique contre le Mildiou présentant une efficacité suffisante pour assurer une vendange saine.
Aujourd’hui, cette substance reste essentielle pour lutter contre certaines maladies de la vigne mais son usage doit être réduit et des alternatives à son utilisation doivent être trouvées en agriculture biologique.
En janvier 2018, un rapport d’expertise scientifique collective de l’Inra (« Peut-on se passer du cuivre en protection des cultures biologiques ») a établi un état des lieux des connaissances et des lacunes scientifiques concernant le cuivre, les usages concernés en protection des plantes et une analyse des alternatives disponibles. A la suite de ce rapport, une feuille de route en 5 axes a été élaborée de façon conjointe par les Ministères en charge de l’agriculture et de l’environnement après concertation des administrations concernées et des acteurs de la recherche et du développement (INRAe, ACTA, APCA, ITAB, FNAB) dans l’objectif de mieux coordonner les actions. Cette feuille de route est notamment appliquée par la Cellule Recherche - Innovation - Transfert (ACTA, APCA, INRAe), qui a été missionné de recenser les travaux sur la stratégie de réduction des doses et sur les alternatives au cuivre en viticulture en particulier, cette filière étant pointée dans l’expertise collective de l’INRA comme se retrouvant face à de vraies impasses si le cuivre se retrouvait interdit.
Dans le cadre de la Cellule RIT et afin de rendre accessibles à la profession viticole les leviers testés pour tendre à une réduction de l’emploi du cuivre et mettre en avant les solutions existantes, trois structures (ACTA, Chambre d’agriculture de la Gironde et IFV) et intégrée à la feuille de route « cuivre », ont mis en commun les résultats de leurs projets de recherche des vingt dernières années et recensé le plus de travaux possibles menés en France sur le sujet. Ce travail a abouti à la publication du Centre de ressources Alternatives au cuivre en viticulture.
Les stratégies recensées se basent sur une meilleure modélisation des conditions météorologiques et épidémiologiques pour une optimisation des traitements, sur des produits alternatifs pouvant, à terme, remplacer le cuivre avec un impact environnemental moindre mais aussi sur des méthodes innovantes telles que de nouveaux profils génétiques pour nos vignes avec les variétés résistantes ou des méthodes physiques pour repenser les traitements phytosanitaires.
Ainsi, en absence d’autres produits viables pour protéger la vigne contre le Mildiou en agriculture biologique, la réduction du recours au cuivre doit passer par la combinaison de plusieurs leviers classés en trois grandes catégories :
- Des produits ou techniques pouvant, théoriquement, remplacer le cuivre dans la lutte contre le Plasmopara viticola : nous parlons alors d’Alternative au cuivre ;
- Des produits ou techniques permettant de diminuer les doses de cuivre appliquées au champ, ce sont alors des supports de Réduction du cuivre ;
- Une Reconception du système viticole actuel pour abaisser les traitements phytopharmaceutiques.
Les leviers entrant dans chaque catégorie sont listés dans le schéma suivant :
Chacune de ces catégories est détaillée ci-dessous :
Des produits homologués/autorisés contre le Mildiou existent et peuvent être soit :
- des produits phytopharmaceutiques disposant d’une autorisation de mise en marché (AMM) :
- Produits utilisables en Agriculture biologique définis d’après le règlement (CE) n°889/2008, qui liste dans son annexe II l’ensemble des substances des produits de protection des cultures utilisables en AB.
- Produits de Biocontrôle définis par l’article 253.6 du Code rural et de la pêche maritime et inscrits sur la liste dédiée du Ministère de l’Agriculture. Ces produits ne sont pas systématiquement utilisables en agriculture biologique.
- Produits à faible risque : définis par l’article 47 du Règlement (CE) 1107/2009. Ce sont des produits phytopharmaceutiques dont toutes les substances actives sont reconnues à faible risque (voir « Approbation des substances à "faible risque" »).
- des substances de base dont la vocation principale n’est pas phytopharmaceutique mais qui sont approuvées dans le cadre de la réglementation phytosanitaire comme étant utiles à la protection des cultures (article 23 du règlement (CE) n°1107/2009).
D’autres travaux sont menés dans le cadre de l’identification de solutions susceptibles de compléter la protection phytosanitaire en assurant une nutrition optimale du végétal et son renforcement par rapport aux contraintes abiotiques. Ces solutions sont des substances ne disposant pas d’usage phytopharmaceutique dont :
- Les substances naturelles à usage biostimulant (SNUB) issues de parties de plantes consommables par l’homme et l’animal d’après l’arrêté du 14 juin 2021. Elles tendent à une unique utilisation de biostimulation contre les facteurs abiotiques mais ne revendiquent pas un emploi en tant que protection phytosanitaire.
- Les matières fertilisantes et supports de culture (MFSC) sont des solutions testées ne disposant pas d’AMM pour une utilisation phytosanitaire mais une AMM pour le contrôle des facteurs abiotiques.
Dans cette catégorie, sont également classés les outils d’aide à la décision (OAD) permettant une optimisation des traitements phytosanitaires et donc théoriquement la réalisation d’impasses réduisant la quantité de cuivre utilisée dans la saison. De plus, plusieurs OAD disponibles à l’heure actuelle proposent les modules adaptant la dose de cuivre au plus juste en fonction du risque de développement de l’épidémie.
Pour réduire les traitements tout en maximisant la protection de la vendange, il est également primordial de disposer d’une qualité de pulvérisation optimale et de minimiser le développement du pathogène par des méthodes prophylactiques sur les parcelles.
Des moyens plus radicaux peuvent passer par la modification du système viticole tel qu’il est présent actuellement, avec un changement des pratiques culturales elles-mêmes :
- La plantation de variétés résistantes mises au point après plusieurs décennies de recherches des instituts européens. Notamment, quatre variétés résistantes d’origine française sont aujourd’hui inscrites au catalogue officiel et peuvent être plantées pour la production de certains vins. Un encépagement de variétés résistantes permettrait de réduire significativement les traitements phytosanitaires au vignoble.
- Des méthodes prophylactiques pouvant amener une modification de la physionomie des parcelles.