Système APREL - COSYNUS
Conception du système
Le système étudié dans le cadre du projet COSYNUS est basé sur une rotation Solanacée/Cucurbitacées avec une rotation de salade pendant l'hiver.
Diverses infrastuctures agro-écologiques sont mises en place dans le tunnel suivi : des bandes fleuries, des plantes relais... afin de favoriser la présence d'auxiliaires et la régulation naturelle des ravageurs. Si besoin, la stratégie est complétée par l'utilisation de produits de biocontrôle et, en dernier recours, de produits de synthèse.
Mots clés :
Biodiversité fonctionnelle - IAE - Solanacées - Cucurbitacées - Biocontrôle
Caractéristiques du système
Situation de production : Culture en sol, tunnel plastique non chauffé Espèces : Aubergine, courgette, concombre, tomate et salade Gestion de l'irrigation : Irrigation au goutte à goutte pour les cultures d'aubergine et de courgette. irrigation par aspersion pour les salades en hiver. Fertilisation : Organique Gestion du sol/des adventices : Travail du sol et paillage plastique Circuit commercial : Long Infrastructures agro-écologiques : Diverses IAE sont installées à l'intérieur des abris (bandes fleuries, plantes relais...) et l'enherbement entre les serres est gérer de manière à favoriser la présence d'abris et de ressource alimentaire pour les auxiliaires. Gestion du climat : Les tunnels disposent d'ouvrants ouverts en fonction de la météo. Des aspersions sont réalisées régulièrement en été sur les cultures d'aubergine de manière à augmenter l'hygrométrie et créer des conditions défavorables aux ravageurs. |
Agronomiques |
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Environnementaux |
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Maîtrise des bioagresseurs |
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Socio-économiques |
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Le mot de l'expérimentateur
Le système évalué par l'APREL a été testé en conditions réelles de production sur un site producteur. Un ensemble de leviers est mis en place autour d'une infrastucture agro-écologique centrale constituée d'une bande fleurie installée au milieu des tunnels suivis. Cette bande fleurie permet la présence d'une faune utile au sein des abris toute l'année. Son installation et son entretien demandent un investissement plus important compensé par son intérêt pour une meilleure réactivité dans la protection contre les ravageurs. Les autres leviers de protection comme les lâchers d'auxiliaires exogènes et les traitements restent nécessaires pour gérer de fortes progression de population notamment en été.
Avertissement : seuls les principaux leviers mis en œuvre dans le cadre de l’expérimentation et permettant une réduction de l’utilisation des produits phytosanitaires sont présentés sur ce schéma. Il ne s’agit pas de la stratégie complète de gestion des adventices.
*Tableau à compléter
Leviers | Principes d'action | Enseignements |
Travail du sol et paillage | Travail du sol et pose du paillage plastique avant la plantation | Permet d'éliminer les adventices et éviter leur repousse sur le rang de culture |
Désherbage manuel | Désherbage manuel des bordures au pied des parois de serre | Fait une fois dans la saison pour limiter le développement des adventives dans une zone non paillée |
Avertissement : seuls les principaux leviers mis en œuvre dans le cadre de l’expérimentation et permettant une réduction de l’utilisation des produits phytosanitaires sont présentés sur ce schéma. Il ne s’agit pas de la stratégie complète de gestion des ravageurs
*Tableau à compléter
Leviers | Principes d'action | Enseignements |
Plantation de bande fleurie | Plantation dans les abris d'une bande fleurie constituée de 3 espèces : achillée, alysse, souci. L'objectif est d'attirer des auxiliaires et les maintenir à proximité des cultures pour favoriser le contrôle rapide des ravageurs. | Les 3 espèces hébergent des auxiliaires utiles dans la protection contre les pucerons (coccinelles, parasitoïdes, syrphes, Aphidoletes...) et des auxiliaires généralistes (Macrolophus, araignées...). Une irrigation par goutte à goutte permet un bon développement. Un entretien est nécessaire avant la culture d'hiver pour limiter la réduction de surface cultivée des salades. |
Semis de zone réservoir | Semis de céréales (blé) au sein de la bande fleurie pour favoriser la présence de parasitoïdes et de prédateurs. | Le blé attire des pucerons spécifiques des céréales. De nombreux parasitoïdes et prédateurs sont alors retrouvés sur ces plantes de service. |
Plantes relais | Mise en place de plantes relais du commerce (éleusie, Gomphocarpus) au sein de la culture. La plante relais est déjà infestée par des pucerons eux-mêmes parasités par des parasitoïdes. Cette plante de service permet une présence précoce de parasitoïdes de pucerons près de la culture. | La technique a déjà fait ses preuves mais la difficulté réside dans la fourniture de plantes relais de qualité avec un équilibre pucerons/parasitoïdes satisfaisant. |
Transfert actif | Prélèvement de fragments de plantes de la bande fleurie avec des auxiliaires pour les répartir au sein de la culture. | Cette technique permet de forcer le transfert des auxiliaires présent sur la bande fleurie vers la culture. Elle est efficace et l'installation des auxiliaires est améliorée. Elle permet aussi d'être réactif pour gérer des foyers en y lâchant des auxiliaires dès repérage. |
Lâchers d'auxiliaires | Lâcher d'auxiliaires du commerce de manière préventive ou à l'observation des premiers ravageurs. | Les phytoseides (acariens prédateurs) s'installent même en l'absence de ravageurs et peuvent être installés de manière préventive afin d'apporter une protection contre les thrips et/ou les aleurodes. Pour les pucerons des prédateurs ou parasitoïdes peuvent être lâchés dès l'observation du ravageur afin d'augmenter la présence d'auxiliaires dans la culture. Pour les parasitoïdes, il est important d'identifier les pucerons présents afin de lâcher la bonne espèce de parasitoïde. |
Bassinages | Aspersions d'eau sur la culture pour créer des conditions défavorables au développement des ravageurs. | Permet de limiter le développement des acariens tétranyques en période chaude et sèche. A pratiquer de manière journalière et à combiner avec d'autres leviers. |
Traitements de biocontrôle | Traitements avec des produits de biocontrôle en cas de protection insuffisante avec les auxiliaires seuls. | Besoin de conditions spécifiques pour être efficaces (produits de contact). Des efficacités aléatoires observées. Attention à l'effet négatif sur la population d'auxiliaires. |
Traitements de synthèse | Traitement avec des produits de synthèse en dernier recours quand les autres solutions n'ont pas apporté d'efficacité suffisante. | Bonne efficacité en derniers recours. |
Avertissement : seuls les principaux leviers mis en œuvre dans le cadre de l’expérimentation et permettant une réduction de l’utilisation des produits phytosanitaires sont présentés sur ce schéma. Il ne s’agit pas de la stratégie complète de gestion des maladies.
*Tableau à compléter
Leviers | Principes d'action | Enseignements |
Résistance variétale | Plantation de variétés avec des résistances à certaines maladies. | Surtout utilisé sur salade en choisissant des variétés avec des résistances au Bremia et/ou à la fusariose. |
Gestion climatique | Gérer le climat par l'aération pour créer des conditions défavorables aux champignons. | L'aération régulière par les ouvrants et portes permet de créer une atmosphère moins humide défavorable aux champignons. |
Traitements de biocontrôle | Traitements avec des produits de biocontrôle en cas de protection insuffisante avec les autres leviers. | Besoin de conditions spécifiques pour être efficaces (produits de contact). Des efficacités aléatoires observées. |
Traitements de synthèse | Traitement avec des produits de synthèse en dernier recours quand les autres solutions n'ont pas apporté d'efficacité suffisante. | Bonne efficacité en derniers recours. |
Tableau synthétisant le niveau de maîtrise des principaux bioagresseurs
Rouge : maîtrise très insuffisante ; jaune : maîtrise moyenne ; vert : bonne maîtrise ; gris : non concerné
Pucerons | Thrips | Acariens tétranyques | Aleurodes | maladies | |
2019 aubergine | |||||
2020 courgette | |||||
2021 concombre | |||||
2022 tomate | |||||
2022 concombre | |||||
2023 courgette |
De manière générale, aucun ravageur n'a impacté négativement les différentes cultures qui se sont succédées dans les 2 abris suivis.
Les pucerons sont un des principaux ravageurs. Ils sont observés sur toutes les cultures avec des pressions différentes selon les années. La présence d'auxiliaires apportés notamment par la bande fleurie et les zones réservoirs de céréales permettent un environnement défavorable au développement des pucerons. En 2019 et 2020, des traitements de synthèse ont été nécessaires pour gérer une population de pucerons devenant trop nombreuse. Lors de ces 2 années, les plantes de service sont encore très peu installées sur la culture et attirent peu les prédateurs et parasitoïdes.
Les thrips n'ont concerné que les cultures de concombre. La population de thrips a été nombreuse sur les plantes et a nécessité des traitements en 2021. La présence de fleurs dans les bandes fleuries semble être à l'origine d'une population de thrips plus nombreuse. Une vigilance est à apporter sur ce ravageur en présence d'une bande fleurie.
Les acariens tétranyques sont problématiques sur l'ensemble des cultures sauf sur courgette ou leur présence cause rarement de dégâts. La présence de phytoseides sur concombre grâce aux lâchers d'auxiliaires exogènes réalisés ainsi que des traitements de biocontrôle ont permis un contrôle satisfaisant du ravageur.
Les aleurodes ont globalement été peu problématiques. Leur développement a été limité grâce a des auxiliaires introduits de la même manière que pour les acariens. Des produits de biocontrôle ont permis certaines années de freiner un développement plus rapide pendant l'été. Seule l'année 2019 sur aubergine a nécessité une intervention avec un traitement de synthèse à cause d'une forte population en été.
Les principales maladies observées sont l'oïdium sur courgette, concombre et tomate et le mildiou sur concombre. Les cultures de courgette ont été particulièrement touchées par l'oïdium en fin de culture. Ce sont surtout des traitements à base de soufre qui ont été utilisés. Le concombre a plutôt été impacté par le mildiou notamment en 2021 avec une pression importante sur l'exploitation et un développement de la maladie malgré des traitements de synthèse appliqués.
Sur salade en hiver, les pucerons ont été peu problématiques avec des pressions faibles. Quatre années sur 5 ont été réalisées sans traitement de synthèse contre les pucerons.
Performance agronomique
Rendement (en kg/m² ou en fruits/m²)
Aucune perte de rendement n'a été constatée avec le système COSYNUS. Les rendements sont identiques avec le système de référence. En 2021, une plus forte présence de thrips dans la parcelle COSYNUS a entrainé une légère perte de récolte (concombre tordus).
Performance environnementale
IFT gestion des ravageurs
Le système COSYNUS permet une réduction l'IFT global notamment grâce à l'utilisation des auxiliaires de cultures qu'ils sont apportés par les aménagements des parcelles (bandes fleuries...) ou achetés et introduits dans les abris.
Performance économique
Charges de gestion des bioagresseurs (€/m²)
La gestion des bioagresseurs a un coût variable selon les années. Le système de référence basé uniquement sur des traitements de biocontrôle et de synthèse est le moins coûteux. Le système COSYNUS engendre un surcoût mais qui reste limité. Il est dû au temps passé pour l'entretien de la bande fleurie et à l'achat et au lâcher des auxiliaires exogènes qui complètent la stratégie.
Lecture du graphique : Tous les points qui se trouvent en-dessous de la ligne "1" sont en dessous de l’objectif. Tous les points qui se trouvent au dessus de "1" dépassent l’objectif
Les objectifs du système COSYNUS sont globalement atteints. Seul le temps de travail nécessaire à l'entretien des aménagements et le coût légèrement plus important des stratégies restent légèrement inférieurs à l'objectif qui était de ne pas être différent de la référence.
La bande fleurie testée est constituée de 3 espèces principales de plantes à fleurs. Il s'agit de l'achillée millefeuilles (Achilea millefolium), de l'alysse maritime (Lobularia maritima) et du souci (Calendula officinalis). Les 3 plantes sont installées en patchs de 2 mètres de longueur qui s'alternent et se répètent en une ligne continue sur toute la longueur des abris. |
L'installation est à anticiper de manière à avoir une bande fleurie suffisamment développée et avec une présence d'auxiliaires importante au moment de la plantation de la culture d'été. Une fois installée elle peut rester en place plusieurs années. Un entretien est nécessaire en cours de saison pour retirer les adventices qui peuvent se développer dans la bande fleurie. Un paillage plastique peut limiter ce travail. A l'automne, avant la plantation de la culture d'hiver, un nettoyage de la bande fleurie permet de tailler les plantes afin de limiter l'encombrement dû aux plantes et limiter la perte de surface cultivée qui peut impacter la culture de salade. C'est aussi à cette période qu'un regarnissage est fait pour remplacer des plantes mortes.
Les auxiliaires attirés par la bande fleurie sont nombreux et concernent essentiellement les pucerons. Sur l'achillée de nombreux pucerons spécifiques sont présents et permettent d'attirer des parasitoïdes et des prédateurs de pucerons (coccinelles, Aphidoletes, syrphes...). L'alysse est particulièrement intéressante pour les syrphes attirés par le nectar et l'abondante floraison de cette plante. Le souci attire et maintient dans les serres une forte population de Macrolophus, une punaise prédatrice très efficace sur de nombreux ravageurs. Un lâcher de Macrolophus du commerce peut être fait en début d'installation de la bande fleurie pour booster l'installation de cet auxiliaire.
La présence des auxiliaires permet un contrôle naturel des ravageurs mais aussi elle est une source d'auxiliaires qui peuvent être prélevés et rapidement lâchés en cas de détection de foyers ou pour des lâchers généralisés.
Il faut être vigilant à l'installation des soucis sur une jeune bande fleurie. En effet, en l'absence d'auxiliaires, des pucerons Macrosiphum euphorbiae ont été observés et peuvent se transférer sur la culture dans la serre. Lorsque les auxiliaires sont installés sur les soucis le puceron est moins présent.
L'ensemble des leviers testés par l'APREL ont été évalués sur une parcelle de producteur. Ils sont donc directement transférables en exploitations agricoles. C'est l'articulation de ces leviers entre eux pour construire des stratégies qui est à adapter à chaque situation en fonction de la pression des bioagresseurs, de l'historique de la parcelle, de la configuration de la culture (pour la mise en place des plantes de service).
Les essais réalisés dans le projet COSYNUS ont mis en évidence l'intérêt des aménagements de parcelles grâce aux infrastructures agroécologiques. Les plus intéressantes et plus faciles à mettre en place sont la bande fleurie et les zones réservoirs de céréales. Leur entretien nécessite du temps de travail supplémentaire mais aussi une observation de la faune en présence car même si elle reste limitée elle peut également développer des pucerons des cultures légumières et des thrips sur de jeunes bandes fleuries avec un équilibre ravageurs/auxiliaires encore insuffisant. C'est notamment le cas du souci. Une piste d'amélioration pourrait être de trouver une plante avec la même capacité d'hébergement de Macrolophus sans attirer de pucerons des cultures légumières.
L'utilisation des plantes de service reste encore très limitée en agriculture conventionnelle mais elle a tout à fait sa place dans ces systèmes avec un objectif de réduire les traitements de synthèse.