Groupe DEPHY Viticulture Bio d'Alsace
Si la viticulture biologique n’utilise pas de produits chimiques de synthèse, les viticulteurs bio sont conscients de leur dépendance au cuivre et au soufre. Différents leviers agronomiques qui jouent sur la globalité de l'écosystème de la parcelle sont testés pour augmenter la résilience de la vigne. Tisanes, décoctions, macérations, teintures mères et extraits fermentés de plantes sont de plus en plus utilisés par les vignerons pour renforcer la vigne. La vie du sol ainsi que la biodiversité aérienne sont favorisées.
Ce groupe Dephy formé en 2016 est constitué de 11 viticulteurs répartis dans toute l'Alsace.
Leurs domaines sont certifiés bio ou en conversion. Ils souhaitent explorer plus en détail les préparations à base de plantes pour soigner la vigne, favoriser la biodiversité faunistique et floristique dans les parcelles et travailler sur la résistance des cépages.
L'objectif est de tester et de partager les résultats de ces essais pour apporter des bases pour les viticulteurs en réflexion sur ces sujets.
N'hésitez pas à suivre nos résultats et événements ici.
Principaux cépages et appellations : l'ensemble des cépages et appellations alsaciennes sont représentés.
Spécificités du groupe : la diversité des producteurs bio en Alsace est représentée. Cela permet aux viticulteurs et viticultrices ayant une grande expérience en bio d'échanger avec les collègues plus jeunes ou en bio depuis peu.
Le regard de l'ingénieur réseau :
Le groupe DEPHY permet aux producteurs d’échanger sur de nombreux sujets techniques, mais il permet aussi de les rapprocher humainement. Ce groupe offre l’opportunité de tester, analyser et adopter d’autres moyens techniques allant au delà du cahier des charges de l’agriculture biologique. Les échanges entre les viticulteurs engagés en bio depuis de nombreuses années et ceux en conversion, sont riches et permettent de créer une émulation pour les uns et une motivation pour les autres.
Le programme de travail 2022-2025 :
Renforcer l'écosystème des parcelles pour pérenniser les systèmes bio où la vigne est résiliente et où l'utilisation de produits phytosanitaire est réduite.
Après avoir spécifiquement travaillé sur les préparations de plantes pour réduire les doses de cuivre pendant 5 ans, les travaux plus globaux s'engagent. Les viticulteurs du groupe ont souhaité se réengager pour aller plus loin, continuer d'apprendre et de partager avec leurs collègues pour être de plus en plus performants.
Quatre thématiques intéressent particulièrement les dix viticulteurs:
- Soigner la vigne avec des préparations de plantes et des teintures mères
Six plantes majoritaires sont utilisées par les vignerons pour réduire l'utilisation du cuivre et du soufre : l'ortie, la prêle des champs, l'achillée millefeuille, la consoude, la reine des près et le saule. Elles sont majoritairement utilisées en complément des pulvérisations de cuivre et soufre accompagnées de prophylaxie. Un viticulteur a tout de même montré que lorsque les conditions ne sont pas favorables au mildiou, une protection avec des préparations de plantes choisies et du soufre permet d'obtenir la récolte souhaitée. Evidemment, l'approche doit être globale : couverture et vie des sol, prophylaxie soignée, vigueur de la vigne modérée, qualité de pulvérisation optimale...
Depuis 2022, un viticulteur essaie les teintures mères. Ce sont des préparation de plantes faites dans l'alcool. Elles ont pour intérêt de se conserver dans le temps : le viticulteur en prépare une fois pour la saison, voire, pour plusieurs millésimes.
Un nouveau guide sur les préparations de plantes est en cours de rédaction.
- Augmenter la vie des sols
L'objectif de tous les vignerons du groupe est de travailler le moins possible les sols et d'y laisser ou semer une couverture la plus permanente possible. Certains travaillent sur les engrais verts. Plusieurs viticulteurs travaillent avec la biodynamie et les Thés de Compost Oxygéné (TCO) pour redynamiser les sols des parcelles. L'objectif est de fournir à la vigne un lieu de développement propice pour pérenniser la culture et produire des raisins, et donc, du vin, de qualité.
- Favoriser la biodiversité dans les parcelles
Les couverts végétaux naturels ou semés, la plantation de haies ou d'arbres dans et autour des parcelles, les murets en pierres sèches... sont des travaux mis en place par une grande partie des viticulteurs du groupe DEPHY bio d'Alsace. En apportant un refuge, un lieu de chasse et de reproduction à une multitude d'insectes, oiseaux, reptiles, ils souhaitent travailler dans un environnement le plus agréable possible et profiter de la prédation naturelle pour ne pas utiliser d'insecticide.
Certains profitent également de la diversité floristique au sein du couvert végétal naturel pour limiter la vigueur de la vigne.
- Travailler sur les cépages anciens et hybrides résistants
Tester ou retrouver des cépages moins sensibles aux maladies et au gel permettrait aux vignerons de garantir les récoltes en utilisant le moins de produits phytosanitaires possible. Le débourrement de plus en plus précoce et le manque d'eau apparaissent fréquemment en Alsace aujourd'hui. Ils sont un facteur de perte de récolte important et ont un impact sur la pérennité des parcelles. Les cépages hybrides et anciens peuvent être un levier. Le résultat de ce travail est visible sur le moyen terme mais les viticulteurs ont conscience de son intérêt et sont engagés. Le travail en cave et la communication auprès des consommateurs est inévitable pour les vignerons du groupe.
Certains sont convaincu des potentialités des cépages hybrides et en ont déjà planté. Une cuvée 100% cépages hybrides rouge est déjà commercialisée par un vigneron. D'autres envisagent de travailler avec les anciens cépages d'Alsace. Dans les deux cas, des voyages d'études sont prévus pour découvrir les différents cépages.
L'objectif des viticulteurs est de rentabiliser la production d'un vin de qualité et de pérenniser leurs systèmes en utilisant le moins de cuivre et de soufre possible et en favorisant la biodiversité au sein des parcelles.
Résultats du groupe
Les essais du groupe sur les préparations de plantes ont permis aux viticulteurs de réduire les doses de cuivre utilisées de 79,5% en moyenne depuis leur entrée dans le groupe.
La moyenne des IFT du groupe a été réduite de plus de 50% entre l'engagement du groupe en 2016 et les années 2022 et 2023.
Le millésime 2021 a connu une pression mildiou historique et a demandé aux viticulteurs d'augmenter le nombre de passages et donc, d'apporter plus de cuivre dans l'année. Cela nous montre que les doses de cuivre sont bien choisies en fonctions des conditions et notamment de la pression mildiou. Il n'est pas toujours aisé d'utiliser de faibles doses de cuivre mais il est important de les réduire lorsque c'est possible, comme en 2022 et 2023 en Alsace. L'expérience aide !
L'année 2021 a été riche en apprentissages sur la conduite en bio contre le mildiou :
- prophylaxie soignée : effeuillage, relevage en temps et en heure, épamprage, ébourgeonnage..;
- maitrise de la vigueur de la vigne,
- qualité de pulvérisation irréprochable,
- réactivité importante pour aller traiter lorsque c'est nécessaire et possible,
- quad pour pouvoir entrer dans les parcelles facilement : les fenêtres de traitements étaient rares (pluie et vent) et très serrées,
- ilotage des parcelles : les viticulteurs ont traité en priorité les parcelles les plus sensibles. Pour cela, il est important de connaitre les parcelles et de prendre le temps d'observer au fur et à mesure des millésimes le comportement de chaque cépage ou parcelle. De plus, les doses de cuivre et les préparations de plantes sont choisies et adaptées en fonction des parcelles, des conditions...
- utilisation de préparations de plantes adéquates : Purin de prêle,
Le groupe a appris que la dose de cuivre utilisée à chaque traitement avait moins d'importance que le positionnement du traitement (après la pluie, lorsque la pousse de la vigne est importante pour protéger chaque nouvel organe créé...). En définitive, ce ne sont pas les viticulteurs qui ont utilisé les doses de cuivre les plus importantes qui ont obtenu un rendement plus élevé.
Un recueil de retours d'expérience a été édité pour résumer les travaux du groupe de 2016 à 2019.
Témoignage de la structure :
Bio en Grand Est a décidé de s’engager dans l’animation de groupe DEPHY pour participer à faire évoluer l’agriculture vers un modèle plus respectueux de l’environnement mais aussi économiquement et socialement viable.