Gestion des ravageurs aériens de la jeune betterave

La jeune betterave est susceptible d’être attaquée par un certain nombre d’insectes aériens qui vont s’y nourrir (altises, thrips, collemboles, noctuelles défoliatrices) ou y passer une partie de leur cycle de vie (pégomyies). Pour les plus impactant d’entre ces ravageurs, la protection actuelle consiste en une lutte chimique, déclenchée lorsque le seuil d’intervention est atteint et une attention portée à la rotation pour limiter les plantes hôtes et allonger la durée de retour de la betterave sur la parcelle.
Cependant les ravageurs les plus préjudiciables sont à ce jour les pucerons verts, car ils sont vecteurs des virus de la jaunisse. Le PNRI-C (plan National de Recherche et Innovation de 2024 à 2027) est d’ailleurs en cours de consolidation de solutions opérationnelles développées dans le cadre d’un premier Plan National de Recherche et Innovation (2020-2023). Diverses solutions et combinaisons de solutions sont ainsi testées : interventions aphicides selon des seuils d’interventions, implantation d’une variété tolérante, mise en place de plantes compagnes, biocontrôle des pucerons et gestion prophylactique.
1. Identifier les ravageurs aériens les plus impactants
De nombreux ravageurs aériens peuvent attaquer la jeune betterave, certains sont plus faciles que d’autres à identifier et reconnaître. On distingue :
- Les pucerons verts, qui ne provoquent pas de dégâts eux-mêmes, mais sont des vecteurs des virus de la jaunisse, entrainant dans les zones touchées jusqu’à 30 % de pertes de rendements.
- Les ravageurs qui se nourrissent sur la jeune betterave : des collemboles, souvent confondus avec les pucerons, des thrips, des altises ou des noctuelles défoliatrices.
- Certains vivent en partie sur la betterave comme les pégomyies dont les larves creusent des galeries entre les deux épidermes de la feuille.
- Certains opportunistes, tels que les oiseaux, vont se nourrir de plantes herbacées, dont entre autres la betterave.
- L'outil DIAGBET ravageurs, maladies & auxiliaires de la betterave permet à partir d'une clé de reconnaissance de bien différencier les ravageurs.
- Le guide BetaGIA aide à l'identification des maladies et donne tous les éléments pour gérer une attaque.
- De plus, une fiche spécifique sur les pucerons vecteurs des jaunisses virales synthétise les connaissances actuelles sur ces ravageurs et leurs vecteurs pour une bonne gestion.
























Un suivi en cours de saison permet de détecter au plus tôt l’apparition des ravageurs, et de surveiller leur développement. Les ravageurs sont observés dans le réseau de Surveillance Biologique du Territoire (SBT) depuis 2009. Le réseau s’est renforcé sur la surveillance des pucerons verts depuis la réglementation interdisant l’utilisation des traitements de semences à base de néonicotinoïdes à partir de 2019.
Ainsi, le suivi de 200 à 300 parcelles betteravières par une centaine d’observateurs de la filière dans le réseau SBT permet de récolter plus de 30 000 lignes d’observations par an dans l’outil Vigicultures. Ces observations sont ensuite validées par les animateurs régionaux qui les synthétisent et diffusent une analyse sanitaire chaque semaine dans les Bulletins de Santé du Végétal, accompagnée de conseils dans les notes d’informations régionales.
Au vu de l’évolution de la protection contre les pucerons verts et des difficultés à positionner les interventions aphicides, l’ITB a mis à disposition des betteraviers un outil de suivi en réel de la pression des pucerons verts dès 2020. Cet outil est basé sur les observations réalisées dans le cadre de Surveillance Biologique du Territoire, et permet de visualiser la présence de puceron vert dans chaque zone géographique et l’atteinte des seuils d’intervention dans les parcelles suivies.
2. Méthodes alternatives
Il existe peu de moyens de lutte alternatif contre les ravageurs aériens de la jeune betterave (altises, pégomyies, noctuelles défoliatrices, thrips, collemboles) autres que les pucerons. Le moyen principal reste d’allonger la durée de rotation entre deux betteraves, de diversifier dans la mesure du possible la rotation et de limiter les plantes hôtes, y compris en interculture.
Les moyens de lutte contre les pucerons verts, vecteurs de la jaunisse, sont en cours d’évaluation dans le cadre du PNRI-C et du projet AGIR (cf. ci-dessous) :
- l'association de plantes compagnes à la betterave.
- l’application de produits de biocontrôle tels que les répulsifs Agriodor ou des macro-organismes.
- Des variétés tolérantes en cours d’évaluation, mais pas encore commercialisées.
La lutte contre les réservoirs viraux est essentielle pour limiter la contamination des parcelles ensuite, les pucerons verts étant préjudiciables uniquement parce qu’ils transmettent les virus de la jaunisse. Il est donc nécessaire de gérer les cordons de déterrage et les résidus de récolte de betterave au champ.
3. Raisonner les traitements et gérer les résistances
Des traitements insecticides peuvent être appliqués contre les pucerons, altises, pégomyies et les noctuelles défoliatrices selon des seuils d’intervention. En effet, en dessous de ces seuils, une intervention ne se justifie pas. Pour rappel, l’ITB conduit régulièrement des essais sur les performances des spécialités aphicides homologuées sur betterave, ce qui lui permet d’actualiser les conseils diffusés.
L’utilisation répétée d’insecticides avec le même mode d’action ou des efficacités limitées sur le ravageur ciblé peut entrainer des phénomènes de résistance ou d’accoutumance des ravageurs. Pour éviter ce problème, il est recommandé d’utiliser des insecticides en alternant les modes d’action.
4. Recherche et développement
Face aux infestations inédites de jaunisses des betteraves en 2020, et à l’interdiction de l’utilisation des traitements de semences à base de néonicotinoïdes, le risque de voir péricliter la filière betteravière a incité le gouvernement a lancé le Plan National de Recherche et Innovation (PNRI) de 2020 à 2023. Ce plan a été prolongé pour 3 années supplémentaires (plan PNRI-C) afin de consolider les connaissances acquises dans le premier plan et réaliser de nouvelles recherches pour finaliser l’opérationnalisation des solutions proposées.
De plus le projet AGIR teste une des combinaisons de solutions avec l’utilisation de variétés tolérantes associées à des plantes de service, dans l’objectif de réduire la transmission des virus par les pucerons.
Par ailleurs, afin de piloter au mieux la protection, des travaux de modélisation sont poursuivis pour anticiper la date d’arrivée des pucerons, à l’aide d’un modèle développé par le projet SEPIM du PNRI, et prévoir les pics de croissance des populations de pucerons verts à l’aide d’un modèle de dynamique des populations.
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La fiche de synthèse des connaissances sur les pucerons vecteurs des jaunisses virales

Chaque année, l’ITB et les services agronomiques de sucreries mettent en place des essais pour évaluer les performances des variétés selon la pression de différents bioagresseurs. Depuis 2023, la filière a mis en place un réseau d’essais pour évaluer leur performance en présence de jaunisse, après inoculation avec des pucerons virulifères.
Le réseau d’épidémiosurveillance mis en place dans le cadre de la Surveillance Biologique du Territoire (SBT) permet de suivre des ravageurs qui pourraient devenir préjudiciables alors qu’ils ne l’étaient pas auparavant, en lien avec l’évolution de la protection phytosanitaire et/ou le changement climatique. Le réseau a ainsi pu démontrer son utilité pour quantifier la pression des pucerons verts vecteurs de la jaunisse, préjudiciable depuis l’interdiction des néonicotinoïdes en 2019. De même pour les thrips et les collemboles, plus observés depuis 2019. La souplesse du réseau facilite l’intensification du suivi de certains ravageurs, ou la mise en place d’un suivi pour de nouveaux ravageurs.