Système Module 1 - Ctifl Balandran - ALTO
Conception du système
Cadre de contrainte et objectifs :
- 0 IFT hors biocontrôle (avec sélection de pdts peu impactant la faune auxiliaire) et Cuivre/soufre à dose réduite (Agriculture Biologique) ;
- Verger Pommier centré, multi-espèces et multi-strates.
Evolution pas à pas en conservant une partie des oliviers/abricotiers/pêchers déjà producteurs :
- Mobiliser les régulations naturelles et autres services : diversifier l’espace avec plantes de services, de production, diverses Infrastructures Agro-Ecologiques (IAE) ;
- Maximiser l’occupation de l’espace.
Mots clés :
Reconception pas à pas - Diversification - Multi-espèces - Biodiversité - Aménagements agro-écologiques
Caractéristiques du système
| Espèce | Variétés | Porte-greffe | Mode de conduite | Distance de plantation | Année d'implantation | Valorisation | Circuit commercial |
| Pomme | Opal, Story, Mandy, Garance | G202 | axe palissé | 3.7x1.5 | 2019 | frais | long |
| Pêche | Sweet Star | GF 677 | double Y | 4.5x2.2 | 2012 | frais | long |
| Abricot | TomCot | gobelet | 6x3.5 | 2012 | frais | long | |
| Olive | Picholine, Negrette | sans | gobelet | 6x6 | 2006 | huile | court |
| Kaki | Rojo Brillante | gobelet | 2019 | frais | long | ||
| Figue | Dottato, Noire de Caromb | sans | gobelet | 6x6 | 2019 | frais | long |
| Prune | Reine Claude Dorée | myrobolan | gobelet | 6x4 | 2019 | frais | long |
| Kiwi | Hayward | sans | palissage en T | 4,5x4 | 2020 | frais | long |
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Système d’irrigation : micro-aspersion et goutte à goutte enterré. Gestion de la fertilisation : apports organiques fractionnés et fertirrigation organique. Infrastructures agro-écologiques : nombreuses. |
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Agronomiques |
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| Environnementaux |
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Maîtrise des bioagresseurs |
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Socio-économiques |
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Le mot de l'expérimentateur
L'objectif a été de transformer un verger existant et d'expérimenter un système diversifié, avec 8 espèces fruitières et conduit à très bas niveaux d'intrants phytosanitaires, en s'appuyant essentiellement sur les principes de la lutte biologique par conservation. Il s'agit de favoriser la biodiversité fonctionnelle et la régulation des ravageurs, d'une part grâce à des aménagements variés qui apportent des ressources et des abris aux auxiliaires vertébrés et invertébrés, et d'autre part, grâce à des pratiques qui préservent cette biodiversité. Concrètement cela consiste à n'utiliser que des produits de biocontrôle peu dommageables sur la faune, à minimiser le travail du sol, à préserver les enherbements et les floraisons. D'autres leviers sont mobilisés comme le levier génétique avec des variétés de pommier "résistantes tavelure" ou des pratiques de prophylaxie.
Ce qui nous intéresse c'est de voir quel est la faisabilité technique et économique d'un tel système, d'en cerner les limites et d'évaluer aussi les impacts que cela peut avoir sur le travail que ce soit en terme d'organisation, de charge mentale et de satisfaction.
| Leviers | Principes d'action | Enseignements |
| Système sandwich | Travail du sol limité de part et d'autre du rang en bandes de 40/50cm de largeur + enherbement permanent du rang (semis 6 espèces peu concurrentes en 2ème feuille pommiers) | Bonne installation au cours du temps de l'achillée millefeuille sur le rang (aucune fauche réalisée) avec quelques taches d'adventices peu préoccupante (gestion manuelle très ponctuelle) |
| Enherbement total (rang compris) | Flore spontanée | Sur olivier uniquement |
| Semis sur le rang d'achillée millefeuille | Semis d'automne, espèce vivace intéressante pour auxiliaires et peu concurrente | Installation progressive - évaluation impact à poursuivre |
| Leviers | Principes d'action | Enseignements |
| Engrais verts fleuris (inter-rang pommiers) | Favoriser les auxiliaires pour une régulation précoce du puceron cendré par apports de ressources (nectar fleurs) et de proies de substitution (pucerons) à l'aide de semis féverole, radis fourrager, seigle + destruction au Rolofaca fin mai | Forte attractivité syrphes et divers auxiliaires, présence précoce auxiliaires dans foyers puceron (larve de syrphes) + effet mulch en été. Effet isolé de ce levier difficilement évaluable. Régulation puceron très satisfaisante dans une zone de la parcelle seulement. |
| Aménagements agroécologiques | Habitats et ressources (haies mixtes diversifiées, mare, gites et nichoirs, friches, enherbements préservés, plantes arom etc..) | Biodiversité vertébrés et invertébrés très élevée - 20 à 25% de déchets/dégâts globalement |
| Augmentorium et biocontrôle | Utilisation de bandes pièges sur tronc pour piégeage de larves mises en cage d'émergence in situ + virus de la granulose contre le carpocapse | Présence de quelques larves parasitées mais évaluation impact difficile - pression carpocapse assez importante |
| Pots pièges forficules | pots 1 litre avec paille et filet permettant le piégeage de forficules en fruits à noyaux. Les pots sont vidés deux fois avant la récolte. | Certains pots avec plusieurs centaines d'individus - la maîtrise de la pression forficule passe aussi par un équilibre des populations d'arthropodes du sol avec une enherbement diversifié et activité biologique |
| biocontrôle (argile, Bacillus) | utilisation de barrières physiques et lutte biologique | efficacité non directement mesurée même si les pressions mouche olive et pucerons restent tolérables |
Les leviers présentés ci-dessous sont associés à une utilisation de produits de biocontrôle ciblant la protection préventive tels que ; lait de chaux, argile, curatio, cuivre et soufre à dose réduite (0,25 à 0,75 IFT par application)
Etant donné que le verger comprend plusieurs espèces cultivées deux schémas décisionnels sont présentés en fonctions de maladies cibles regroupées
| Leviers | Principes d'action | Enseignements |
| Espèces "rustiques" | Choix d'espèces à faible risque phytosanitaire telles que figuier et kaki | Maîtrise de la mouche méditerranéenne difficile sur kaki |
| Variétés Résistance Tavelure (pommier) | Opal, Story, Mandy, Garance | Pas de contournement de résistance, à coupler avec intervention à l'aide de biocontrôle lors d'épisodes de contamination primaire avec risque majeur |
| Agencement spatial - effet de dilution | Pommiers plantés en double rangs espacés de 8 à 20m limitant la diffusion des spores de tavelure | Effet non mesurable à ce jour |
| Produits de biocontrôle | Substitution à la lutte chimique le plus souvent en préventif ou barrière physique | Nécessité de positionnement anticipé |
| Espèces | Bioagresseurs | 2019 | 2020 | 2021 | 2022 | 2023 |
| Abricot | ECA (psylle) | |||||
| Monilia fleur | ||||||
| Forficule | ||||||
| Pêche | Cloque | |||||
| Monilia fruit | ||||||
| Puceron vert | ||||||
| Puceron farineux | ||||||
| Forficule | ||||||
| Prune | Rouille | |||||
| Pomme | Puceron cendré | |||||
| Carpocapse | ||||||
| Zeuzère/Hoplocampe | ||||||
| Olive | Mouche | |||||
| Teigne | ||||||
| Oeil de paon | ||||||
| Cercopsoriose | ||||||
| Kaki | Cératite |
Légende: vert : moins de 25 % d'organes atteints - jaune : de 25 à 50% organes atteints - rouge : plus de 50% d'organes atteints - gris : pas d'observation sujet juvénile
Le niveau de maîtrise des ravageurs conduit à un niveau de déchets (déchets verger + déchets station) de l'ordre de 20 à 25% sur toutes les espèces, sauf en olive où toute la production est valorisée par transformation en huile.
On peut noter une forte variabilité spatiale des dégâts de bioagresseurs, souvent difficile à expliquer. Le puceron cendré par exemple est bien régulé dans l'association pommier/olivier et mal régulé dans l'association pommier/abricotier. Plusieurs hypothèses en cours de vérification permettent de l'expliquer, dont notamment la présence de fourmis qui interagissent avec les pucerons en les protégeant de l'action des auxiliaires et en les dispersant. Le carpocapse montre un gradient de niveau de dégâts sur fruits, croissant de l'est vers l'ouest de la parcelle (zone à proximité d'un bois).
Performance agronomique
Les rendements commercialisables sont exprimés en tonne par hectare de surface théorique équivalente pour les espèces principales et en kg par arbre pour les espèces minoritaires dont le nombre d'arbres dans le système est faible.
Les pommiers (1ère feuille en 2019) sont entrés en production rapidement bien que l’année 2023 marque un replis du fait d’un mauvais retour à fleurs et d’un problème d'affaiblissement dû au campagnol provençal. Oliviers, pêchers et abricotiers, déjà en production, montrent une certaine irrégularité due à l’alternance (olivier) et des dégâts de gel en 2020 et 2021 (fruits à noyau), combinés en pêcher à un impact important des pucerons farineux et du monilia sur fruit. Pour les autres espèces telles que figuiers et plaqueminiers, la production monte en puissance. Toutes espèces confondues, le taux de déchets (verger et station) est de l’ordre de 25% de la production brute des arbres. En termes de qualité commerciale pour la pomme, la part d’industrie est de 19% en 2022.
Performance environnementale
La protection phytosanitaire est constituée de produits de biocontrôle à faible impact vis-à-vis de la faune auxiliaire tels que : confusion sexuelle, argile, virus de la granulose, soufre) et exlue l'utilisation d'azadiractine et de spinosad. Le cuivre (IFT hors biocontrôle) est utilisé à faibles doses (0.5 kg de cuivre métal par application) essentiellement pour la gestion des maladies les plus problématiques (maladies olivier). Ces IFT sont à la baisse depuis 2020. En IFT total la réduction est de 45% en abricotier à 60% en pommier par rapport aux références Agreste 2021.
Performance économique
Les niveaux de production sont parfois faible et irrégulier, en lien avec des événements climatiques et certains bio-agresseurs. La diversité des espèces permet toutefois d’assurer une production agricole quelles que soient les années. Par ailleurs, les niveaux de dégâts restent ‘raisonnables’ en regard de la protection réalisée même s’ils sont élevés par rapport à un objectif commercial.
Une simulation économique a été réalisée. Le chiffre d'affaire du système a été calculé avec 2 scénarios. Selon une base "bord verger" circuit long en utilisant les cours d'expédition RNM en agriculture biologique minorés d'un coût lié au conditionnement (0,5€ /kg) et selon une base "vente directe" en utilisant des prix de vente directe. Les coûts de main d'oeuvre s'élèvent en moyenne à 15000€ / an. Ces résultats indiquent qu'une valorisation forte des productions (ex. vente directe) est un des moyens d’assurer une marge brute positive - hors année de gel - alors que cette marge est nulle ou négative en circuits longs.
| Dimension évaluée | Indicateurs utilisés | Niveau de satisfaction par rapport aux objectifs | Commentaires |
| Biodiversité | Diversité botanique (plantes en fleurs) et diversité faunistique des vertébrés et invertébrés (arthropodes) | Le verger, transformé en 2018, bénéficie d'infrastructures préexistantes et d'une biodiversité déjà élevée et connue pour certains groupes (oiseaux, chauves-souris). L'extensification de la gestion du sol (travail réduit, enherbements hauts), les plantations supplémentaires (plantes aromatiques, haies arbustive, engrais verts), la diversification des espèces fruitières et l'utilisation de produits de biocontrôle peu impactant sur la faune conduisent à un diversité et abondance élevée de l'entomofaune aérienne et du sol | |
| Service de régulation des bio-agresseurs | Taux de prédation, suivi de dynamique de populations (puceron), niveau de dégâts sur organes végétaux (feuilles, fruits, fleurs) selon biologie de développement | Niveaux de prédation élevés (proies sentinelles et observations visuelles). Principaux ravageurs problématiques: puceron farineux avec variabilité interannuelle de la pression, mouche méditerranéene, carpocapse | |
| Utilisation des pesticides | IFT de biocontrôle et hors biocontrôle (cuivre seul) par espèces cultivées | Le type de produit de biocontrôle utilisé fait parti du cadre de contrainte choisi. IFT biocontrôle pomme restent élevés compte tenu de la mauvaise maîtrise du carpocapse. La baisse de l'utilisation de cuivre en olivier (maladies du feuillage) est difficile à atteindre selon les années. | |
| Utilisation d'intrants de fertilisation | quantité de fertilisants | pas d'objectif particulier de réduction et apports exogènes. La pression campagnol provençal limite la généralisation d'engrais verts à base de légumineuses. | |
| Utilisation d'intrants d'irrigation | quantité d'eau | pas d'objectif particulier de réduction. Irrigation goutte à goutte enterré sur pêcher particulièrement intéressant pour maîtrise de l'enherbement sur le rang et limitation du travail du sol | |
| Consommation d'énergie | temps de machinisme, fréquence de passages | la réduction du travail mécanique du sol diminue le temps de mécanisation mais il reste de nombreux passages (traitements phytosanitaires, broyages de branches, fauchage au rotofil de l'enherbement du rang) | |
| Production et qualité de la production | rendement par espèces et catégories commerciales (calibre), conservation | Variabilité selon les années. Complémentarité entre espèces. Déchets élevés nécessitant de travailler sur la valorisation. | |
| Charge de travail | temps de travail et répartition annuelle | Travail étalé sur l'année mais temps de récolte élevé pour espèces secondaires (figue). 1,15ha nécessitent 0,7 ETP environ (hors gestion). | |
| Nature du travail | nombre d'espèces cultivées; nbre de passages par opération, temps d'observation et de pilotage | Pilotage nécessitant une montée en compétences. Temps d'observation pour le pilotage élevé |
Pas de référentiel pour ce type de verger (cf résultat site INRAe Gotheron)
La diversification des cultures et l’introduction de biodiversité dans l’agroécosystème sont un moyen de renforcer les services écosystémiques, en particulier la régulation des bio-agresseurs.La présence de ressources et d'abris a été favorisée dans le système grâce aux différentes infrastructures (haies, enherbements préservés, zones en friche..) et au semis d'engrais verts fleuris en inter-rang à côté des pommiers visant à attirer des auxiliaires prédateurs du puceron cendré du pommier.
La régulation de ce ravageur a été évaluée par des suivis de la dynamique de population à deux échelles (rameaux et arbres entiers) et des suivis de l'abondance et de la diversité des auxiliaires.
Un effet spatial est noté avec une infestation moindre dans la zone où les pommiers sont interplantés d’oliviers, proche d’une zone de biodiversité, par rapport à la zone où les pommiers sont insérés parmi des abricotiers, que ce soit à l’échelle du rameau ou de l’arbre. Les principaux auxiliaires au pic d’infestation du puceron sont les coccinelles et les punaises prédatrices, et la dynamique temporelle atteste d’une relation proie-dépendante. Une présence accrue de fourmis est notée dans la parcelle pommiers-abricotiers qui est la plus infestée par le puceron cendré. Ces fourmis interagissent fortement avec les pucerons en les protégeant des prédateurs.
La diversité des ressources et des habitats s’accompagne d’une abondance et d’une diversité d’auxiliaires, et de taux de prédation élevés. La régulation de ravageurs tels que les pucerons semble s’installer après la phase juvénile du verger, plus sensible.
A ce stade des travaux, avec un verger encore jeune qui nécessite un recul pluriannuel, le transfert en l’état d’un tel système vers la profession est prématurée. En agroécologie la conception des systèmes passe davantage par l’adoption et l'adaptation de techniques et de pratiques en fonction des contraintes et des spécificité locales. Dans ce système par exemple, l'utilisation de la technique sandwich d'entretien des arbres avec un semis de plantes à faible développement sur le rang (non fauchées) a montré l'intérêt de cette pratique pour réduire le travail du sol. Cette technique pourrait être davantage utilisée. L'utilisation d'engrais verts fleuris en inter-rang a aussi montré un effet positif sur l'attractivité des auxiliaires de cultures au moment du développement du puceron cendré. Cette technique, qui demande de la vigilance vis à vis du risque campagnol, nécessiterait des travaux complémentaires pour être transférée.
Les nouveaux systèmes expérimentés dans le projet Alto questionnent les pratiques, le travail et son organisation, ainsi que la valorisation commerciale de fruits divers, produits en plus petites quantités et parfois de manière irrégulière. Ces prototypes expérimentaux ne sont pas à transposer en l’état : ce sont les principes de conception et la démarche, à savoir les fonctions attendues, les caractéristiques de plantes pouvant les remplir et les critères d’assemblage, qui sont appropriables pour construire d’autres systèmes ‘sur mesure’ en fonction du contexte local et des objectifs identifiés.
Projet ALTO
Site Ctifl Balandran
Site INRAE UERI Gotheron
Site Restinclières
