Système Plateau Bourgogne - Plateau de Bourgogne - R2D2
SYSTEME DU TERRITOIRE R2D2 |
Mots clés :
Agroécologie, approche territoriale, lutte biologique par conservation, insectes auxiliaires
Eléments contextuels
Le projet R2D2 est un projet territorial qui concerne 10 exploitations agricoles. Il ne s'agit pas d'une expérimentation classique destinée à comparer un ou des systèmes innovants à un système de référence mais plutôt d'imaginer collectivement, de tester, d'évaluer et d'améliorer progressivement des solutions dans le cadre d'une expérimentation générative.
L'objectif du projet est de créer un cadre favorable à la mise en place de solutions co-construites entre les agriculteurs et les partenaires. Les évolutions se font pas à pas, au fur et à mesure de l'avancement du projet, en fonction des succès et des échecs.
Le territoire du projet
Le projet concerne 1370 ha de grandes cultures. Il se situe dans l'Yonne, sur la commune de courson les carrières (89). Ce territoire est situé en zone intermédiaire et les sols dominants sont des argilo-calcaires superficiels à faible réserve utile.
Contrairement aux systèmes dominants de la région dont les rotations sont assez simplifiées avec une succession colza/blé/orge, ceux du territoire R2D2 comprennent une douzaine de cultures environ.
Assolement à l'échelle du territoire
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Interculture : interculture longue avec radis chinois Daïkon Gestion de l'irrigation : non irrigué Travail du sol : Labour, Semi direct (SD) Infrastructures agro-écologiques : haies, bandes fleuries multi-espèces
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Agronomiques |
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| Environnementaux |
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Maîtrise des bioagresseurs |
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Socio-économiques |
L'objectif est d'améliorer les performances des systèmes de cultures tout en réduisant l'IFT insecticide à l'échelle du territoire |
Texte complémentaire
Le mot de l'expérimentateur
"Le projet R2D2 est un projet territorial. Il s'agit de mettre en oeuvre à l'échelle d'un territoire de 1300 ha une stratégie de gestion agroécologique des ravageurs de cultures. Le principe est une combinaison de leviers agronomiques à la parcelle pour renforcer la robustesse des cultures et aussi de pratiques et d'aménagements paysagers favorables aux régulations biologiques. Les agriculteurs considèrent à la fois les parcelles agricoles et les habitats non cultivés qui constituent des habitats et des sources de nourriture pour la faune auxiliaire. La finalité est d'essayer de passer d'une gestion des ravageurs chimique, individuelle et curative à la parcelle à une gestion concertée, préventive à l'échelle d'un territoire combinant l'agronomie aux principes de la lutte biologique par conservation." N. CERRUTTI
Gestion agroécologique des ravageurs de culture, approche territoriale développée dans le cadre du projet R2D2
Echelle du territoire
1. Augmenter les régulations biologiques en limitant les effets non-intentionnels des pratiques agricoles sur la faune auxiliaire et en augmentant les habitats et ressources alimentaires pour les auxiliaires de cultures : Lutte Biologique par Conservation.
2. Manipuler le comportement des ravageurs à l'échelle du territoire pour réduire leurs populations et les dégâts en culture (technique des intercultures pièges à altises dont l'idée a émergé en atelier collectif avec les agriculteurs)
Echelle de la parcelle agricole
3. Esquiver la présence des ravageurs en adaptant la date de semis
4. Augmenter la robustesse des cultures grâce à des leviers agronomiques pour limiter la nuisibilité des attaques de ravageurs
Le projet concerne l'ensemble des cultures et des ravageurs présents sur le territoire. Cependant, le niveau de résistance aux pyrèthrinoïdes acquis par l'altise et le CBT du colza et les difficultés rencontrées depuis plusieurs années par les agriculteurs sur la culture du colza ont conduit à privilégier dans un premier temps, la gestion des ravageurs sur cette même culture.
Voici un résumé des leviers mis en place par les agriculteurs et évalués :
| Leviers | Principes d'action | Enseignements |
| Leviers agronomiques (date de semis, associations plantes compagnes, fertilisation localisée au semis) |
Renforcer la robustesse de la culture de colza en favorisant une pousse rapide et continue à l'automne, esquiver les attaques d'altises d'hiver en semant précocement.
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Les leviers agronomiques ont une bonne efficacité vis à vis de la réduction de la nuisibilité des attaques d'insectes d'automne en colza, les agriculteurs ont fortement investit dans la mise en oeuvre de ces leviers. |
| IAE | Haies, bandes fleuries sont destinées à fournir des habitats et sources de nourritures aux auxiliaires de cultures. 8 ha mis en place | Les aménagements attirent les insectes auxiliaires de culture, cependant leur débordement dans les parcelles adjacentes est réduit et non suffisant |
| Intercultures pièges pilotées | Dans l'interculture longue, l'insertion de radis daïkon représente un piège pour les altises d'hiver. environ 250 ha mis en place par an. | Le radis attire les altises au moment où elles sont en recherche de colza. A l'échelle du territoire, une partie des altises présentes est attirée par ces intercultures et en année N la pression sur le colza est diminuée. La destruction des intercultures durant l'hiver mécaniquement permet de détruire les larves présentes dans les radis et de limiter l'infestation en année N+1 |
Leviers de robustesses mis en place sur le colza :
Au cours du projet, l'itinéraire technique du colza pratiqué sur le territoire du projet a fortement évolué. Les pratiques destinées à renforcer la robustesse de la culture, c'est à dire à favoriser une croissance continue et dynamique à l'automne se sont accentuées comme le montre le tableau ci-dessous.
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2019 |
2021 |
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Fertilisation localisée au semis |
94 % |
100 % |
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Semis précoce |
0 % |
46 % |
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Association légumineuse gélive |
33 % |
65 % |
Surfaces de colza concernées par les leviers de robustesse entre 2019 et 2021
Les coléoptères ravageurs du colza : méligèthe, altise d'hiver et charançon du bourgeon terminal sont régulés par plusieurs espèces d'hyménoptères parasitoïdes. L'évaluation des taux de parasitisme de ces espèces sont des paramètres suivis dans le cadre du projet comme indicateurs de réussite du projet conduit par les agriculteurs.
Parasitisme larvaire des principaux coléoptères ravageurs du colza de 2018 à 2022
le contrôle biologique des coléoptères ravageurs du colza est relativement variable entre les années et entre les sites de prélèvements au sein d'une même année. Il est difficile d'établir une tendance d'évolution. Cependant, les taux restent faibles relativement aux valeurs maximales rencontrées dans la littérature : 90 à 95% pour le méligèthe en situation optimale et 70% environ pour l'altise d'hiver.
Cela laisse envisager une progression possible des régulations biologiques. Les processus de régulation sont des phénomènes complexe qui sont à considérer sur le long terme. Les efforts doivent être poursuivis pour déployer les leviers favorables sur des surfaces plus conséquentes (augmentation de la surface d'habitats favorables et ressources fleuries, réduction du travail su sol après colza et réduction des traitements insecticides).
IFT
A l'échelle territoriale, l'IFT total a connu une augmentation depuis 2020 principalement due à l'augmentation des traitements herbicides et insecticides. Ces chiffres globaux masquent cependant des disparités entre cultures.
En effet, sur le colza, l'accompagnement technique réalisé auprès de producteurs a permis de supprimer totalement les traitements insecticides d'assurance tandis qu'il représentaient 60% des applications en début de projet (2019). Le meilleur raisonnement des interventions permis par l'utilisation des seuils recommandés par l'institut qui intègrent notamment des paramètres de croissance des plantes a fait passer l'IFT insecticide sur la culture de 2.7 à 1.6 (moyenne 2021-2023 versus moyenne 2019-2020).
L'augmentation des traitements insecticides à l'échelle territoriale est expliquée par une hausse des traitements aériens sur pois et orge d'hiver. Sur l'orge, cette évolution est consécutive à la suppression des solutions d'enrobage de semences à base de néonicotinoïdes. En réalité, cette augmentation est un biais car elle s'apparente davantage à substitution des insecticides Néonicotinoïdes utilisés en enrobage de semences jusqu'en 2018 par des traitements aériens à base de pyréthrinoïdes, toujours dans une même logique préventive. Sur la culture du pois, l'augmentation des pressions de bruches a également engendré une protection insecticide plus sécuritaire ces dernières années. Les derniers relevés réalisés sur la zone 0 insecticides font état de taux de grains bruchés atteignant jusqu'à 70%.
Rendements
L'accompagnement technique a permis d'améliorer significativement les rendements sur le colza et de les stabiliser en fin de projet et ce malgré des pressions insectes stables. La culture du pois reste difficile à conduire et les rendements sont fluctuant principalement en raison de pressions d'insectes élevées sitones, bruches notamment.
Résultats économiques
En 2022, les résultats témoignent d'une forte augmentation du prix de vente tandis que la hausse des intrants n'est pas encore complète (inflation pas encore entamée).
En 2023, l'effet ciseau prix/charge se matérialise : forte baisse des prix alors que les engrais ont été acheté au 2ème semestre 2022, tandis que les prix étaient élevés.Le prix des autres intrant commence aussi à augmenter
Les résultats de l'évaluation multicritères réalisée à l'échelle du territoire via Systerre(c) sont présentés dans le tableau ci-dessous.
Les résultats d'IFT Total et d'IFT insecticide ont été comparés aux données de l'ensemble des fermes DEPHY de Bourgogne. Les pourcentages indiqués correspondent à l'écart entre la valeur du territoire R2D2 et la valeur du territoire "DEPHY Bourgogne". Pour chacun des territoires, il s'agit d'une valeur moyenne pondérée par les surfaces. Les données dephy n'ont pu être obtenues que pour les années 2019 à 2021.
Ces comparaisons permettent de se rendre compte du niveau de performance environnementale élevé du territoire R2D2. En effet, l'IFT insecticide y est entre 20 et 40% inférieur à celui du territoire des fermes DEPHY de Bourgogne alors que ce sont des fermes déjà impliquées dans des démarches de réduction des intrants.
Les données d'EBE pour les années 2019 à 2021 ont été comparées aux données du RICA (OTEX grandes cultures et polycultures élevage) pour le département de l'Yonne. Le département de l'Yonne comporte des situations bien plus favorable en terme de potentiel agronomique que les plateaux de Bourgogne ou est localisé le projet, ce qui explique l'écart de performance économique enregistré en 2019 et 2020 en défaveur du territoire R2D2.
| Indicateur | 2019 | 2020 | 2021 | 2022 | 2023 |
|---|---|---|---|---|---|
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N Minéral |
87 | 86 | 104 | 104 | 108 |
| IFT Total hors TS |
2.6 -17% |
1.9 -32% |
2.6 -25% |
2.9
|
3.1
|
| IFT Herbicide | 1.5 | 1.15 | 1.47 | 1.65 | 1.59 |
| IFT fongicide | 0.57 | 0.41 | 0.53 | 0.46 | 0.64 |
| IFT insecticide |
0.45 -19% |
0.41 -40% |
0.67 -30% |
0.73
|
0.82
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| Marge directe avec aides (€/ha) | 514 | 481 | 851 | 965 | 475 |
| EBE (€/ha) |
296 -16% |
249 -32% |
630 -3% |
641
|
145
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| Emissions GES totales (kgéqCO2/ha) | 1383 | 1356 | 1603 | 1639 | 1740 |
Le projet R2D2 a permis de co-concevoir, tester et déployer une stratégie agroécologique de gestion de l'altise d'hiver du colza en combinant des leviers à effets partiels de l'échelle de la parcelle agricole à celle du paysage.
Cette stratégie qui comprend 3 grands axes de travail est présentée dans le schéma ci-dessous.
Le projet R2D2 a été conçu de manière à faciliter les échanges et le transfert d'informations et de techniques entre les agriculteurs. Les journées techniques, ateliers de travail, visites de parcelles... constituent des moments privilégiés pour le transfert et à chaque journée techniques, des agriculteurs exploitant en dehors du territoire du projet sont également invités pour inciter à la mise en oeuvre d'initiatives au delà du territoire géographique retenu.
Ce réseau élargi de 3 fermes qui participe aux journées techniques et tours de plaines est appelé réseau "satellite".
Le bilan du projet a mis en évidence l'importance d'accompagner les agriculteurs pour :
-Limiter les traitements insecticides d'assurance contre les pucerons en pois et orge d'hiver tout comme cela a été réalisé sur le colza. La difficulté réside dans le fait que les leviers agronomiques de robustesses sont très limités sur ces cultures et que la jaunisse est considérée comme potentiellement très impactante pour le rendement de l'orge.
-Renforcer les régulations biologiques des insectes ravageurs qui demeurent faibles. Les aménagements réalisés par les agriculteurs comme les 8 ha de bandes fleuries sont une première étape, cependant des modifications plus importantes du paysages sont probablement requises pour renforcer les régulations biologiques.
La partie qui concerne les régulations biologiques n'est pas facile à appréhender par les agriculteurs car elle nécessite une re-conception profonde des systèmes de cultures en considérant également les espaces non cultivés et la dimension paysagère. De plus, elle implique un temps long. Les agriculteurs peuvent éprouver des réticences à remodeler leur parcellaire et à implanter des IAE pérennes sans soutien financier. En effet, le bénéfice des IAE n'est pas toujours facile à démontrer et les agriculteurs ont besoin d'éléments chiffrés pour s'engager plus avant sur cette thématique, d'autant que la mise en oeuvre de bandes fleuries diminue les surfaces cultivées. De plus, la mise en oeuvre concrète d'aménagements favorables à la biodiversité et gérés de manière durable nécessite un accompagnement spécifique. Les agriculteurs ont en effet fait part de leurs besoin en terme d'aide au choix des essences à mettre en place dans les haies, pour l'entretien optimum des bandes fleuries etc... Ces sujets, bien que traitées dans le cadre du projet R2D2 auraient nécessité un accompagnement plus important et la mobilisation de compétences nouvelles.
Projet R2D2
Site Plateau de Bourgogne
