
Prune en Lorraine, un vrai DEPHY

Le groupe Dephy Ferme Prune de Lorraine est engagé depuis 2012 dans la réduction de l'usage des produits phytosanitaires. Réparties en Meurthe et Moselle, Vosges et Meuse, les exploitations présentent des profils représentatifs de la production de la Mirabelle de Lorraine. Le groupe s'intéresse beaucoup aux solutions de bio-contrôle. Il s'agit donc d'acquérir des références sur ces pratiques, tout en conservant la qualité de la Mirabelle de Lorraine.
Productions principales : Mirabelle
Spécificités du groupe : Le groupe est surtout composé d'agriculteurs conventionnels qui cherchent à réduire leur utilisation de produits phytosanitaires conventionnels
Partenariats locaux : AREFE, Services techniques des coopératives "Jardin de Lorraine" et "Vergers de Lorraine".
Le regard de l'ingénieur réseau :
La motivation des producteurs du réseau et la dynamique de groupe leur permettent d’avancer rapidement sur plusieurs problématiques complémentaires. DEPHY leur permet d’échanger leurs idées et leurs pratiques, d’être moins seuls dans leurs démarches et d’avoir des points de comparaison. Le réseau donne la possibilité de travailler sur plusieurs solutions sans prendre trop de risques en même temps et en gardant des revenus stables, et la collaboration avec l’AREFE leur permet de bénéficier de résultats d’essais préalables pour les solutions les plus risquées. Enfin, les solutions testées avec succès sur un verger font progresser l’ensemble du réseau, mais également l'ensemble de la filière. En effet, les résultats du groupe sont communiqués aux autres producteurs de la filière. Aujourd'hui, certains outils développés dans le cadre du réseau sont utilisés par l'ensemble des producteurs de la Lorraine.
Le groupe souhaite réduire de manière significative son nombre de traitements tout en gardant une bonne qualité gustative et commercialisable du fruit. En fonction des années, les traitements tavelure représentent entre un tiers et la moitié des traitements réalisés sur mirabelle. Les producteurs ont donc choisi d’améliorer leur stratégie tavelure avec ce nouvel Outil d’Aide à la Décision (OAD).
Cet outil étant récent et comportant certaines zones d’ombre, le producteur prend un risque sur son exploitation. Il doit donc accepter quelques dégâts sur son verger, du moment que la récolte n’est pas intégralement mise en danger. L’utilisation du nouvel OAD, avec une augmentation du seuil de tolérance pour les dégâts lié à la tavelure permettrait une réduction du nombre de traitements.
Cette stratégie repose sur deux principaux leviers :
- Réaliser des traitements tôt dans la saison.
- Utiliser de nouvelles courbes de risques de sporulation de la tavelure.
Le producteur doit donc surveiller sa station météo tous les jours afin de connaitre le risque de sporulation. Si le risque est assez fort, il doit alors choisir de traiter ou non. En effet, la présence d’un risque ne signifie pas systématiquement qu’il doit traiter. Par exemple, si une pluie est annoncée peu après la premier risque, il est préférable de ne pas traiter pour éviter tout lessivage. Il sera considéré que la stratégie est bonne si la qualité du fruit est conservée, et si le nombre de traitements est réduit de manière significative. Cette élaboration d'un nouvelle stratégie a permis une diminution allant de 25 à 50% des IFTs tavelure. Cela a activement participé à la réduction importante des IFTs du groupe.
En 2024, deux à trois traitements tavelures ont été réalisés par les producteurs du groupe, malgré une années très pluvieuse générant beaucoup de risque. Avec l'ancien OAD, le groupe aurait réalisé plus de sept traitements par exploitations.
Résultats du groupe :

Depuis la création du réseau, les IFTs chimiques ont diminué progressivement jusqu'à atteindre -60% à -40% entre 2020 et 2024.
Certaines pratiques testées dans le réseau de ferme sont aujourd'hui utilisées par d'autres producteurs de mirabelle.
Nouvelle perspective :
En plus des essais actuels, les producteurs participeront à l'élaboration de nouvelles grilles de risques dans le cadre du projet Prévenprune.
La baisse depuis plusieurs années des produits de synthèses homologués sur pruniers a provoqué l’impossibilité d’intervenir de façon curative sur certains bioagresseurs. C’est notamment le cas pour la tavelure du mirabellier, mais aussi désormais pour le puceron vert du prunier. Pour d’autres bioagresseurs, aucune lutte curative n’existe (maladie des pochettes, rouille,…). Certains traitements préventifs sont donc réalisés pour éviter la prise de risque. Parfois, ils auraient pu être évités car il s’avère, a posteriori, que le bioagresseur visé ne s’est pas développé sur des parcelles non traitées.
Afin d’augmenter cette prise de risque, des outils fiables d’aide à la décision sont nécessaires afin de pouvoir évaluer a priori le niveau de pression de l’année. Il est alors nécessaire d’identifier et de quantifier les facteurs qui influencent le développement de chaque bioagresseur.
Pour cela, les producteurs du groupe ne traiteront pas du tout une partie d’un verger contre un ou plusieurs ravageurs pour permettre à la station d'expérimentation d’évaluer les niveaux de dégâts en fonction de différents facteurs et de développer de nouvelles grilles de risques. À terme, cela permettra de réduire de façon significative le nombre de traitements par an.
Dans le cadre de ce groupe Dephy Ferme, nous explorons différentes méthodes de lutte durable contre le carpocapse du prunier, notamment la confusion sexuelle. Cette technique consiste à diffuser des phéromones synthétiques dans l'environnement pour tromper les mâles et les empêcher de trouver les femelles, ce qui perturbe la reproduction et réduit la population de nuisibles. Cette méthode permet de limiter l'usage des produits phytosanitaires tout en protégeant les cultures de manière ciblée et respectueuse de l'environnement. Au sein du groupe, nous échangeons régulièrement nos observations et ajustons nos pratiques en fonction des résultats obtenus, dans l'objectif de trouver des solutions adaptées à nos conditions locales et d'améliorer la durabilité de nos exploitations.
Nous mettons également un accent particulier sur le désherbage mécanique comme alternative aux herbicides chimiques. Nous échangeons régulièrement sur l’efficacité de différentes techniques, comme le binage, le passage de rouleaux herse étrille ou encore le travail du sol. L’objectif est de trouver des solutions qui permettent de limiter la concurrence des mauvaises herbes tout en préservant la structure du sol et la biodiversité. En plus de leur efficacité, nous analysons également l'impact écologique de ces pratiques, notamment en termes de préservation de la faune et de la flore locales. Les échanges au sein du groupe nous permettent d’ajuster nos méthodes et d'améliorer constamment la gestion du désherbage, dans une logique de rentabilité et de durabilité.
Mois | Janvier | Février | Mars | Avril | Mai | Juin | Juillet | Aout | Septembre | Octobre | Novembre | Décembre |
Thème |
Bilan du groupe |
Journée technique : Exosquelette | Journée technique : Biocontrôle | Visite d'exploitation | / | Voyage d'étude | / | / |
Visite d'exploitation |
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Témoignage de la structure :
"La mission de l’AREFE est de proposer des références pour la conduite de verger en fruits à noyau aux producteurs de mirabelle en Lorraine. Des solutions innovantes y sont testées à petite échelle. Le groupe DEPHY permet la validation des observations puis la mutualisation des résultats obtenus dans nos vergers expérimentaux. Ce groupe est également l'organisation idéale pour communiquer auprès des producteurs hors réseaux sur les solutions les plus efficientes en terme de diminution d'IFTs. Grâce au travail de l’ingénieur réseau, les producteurs sont accompagnés sur leurs propres vergers pour prendre des risques mesurés afin de diminuer les intrants dans leurs exploitations."
Quentin Hoffmann, Directeur de l'AREFE