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Décryptage de problématiques
Cet espace a pour vocation de décrypter des problématiques à forts enjeux pour la protection des cultures. Il propose des centres de ressources pour accompagner les acteurs dans l'utilisation des alternatives existantes.
dephyEXPE

Système AB Innovant - Terre d'Essais - BREIZHECOLEG

Cultures légumières Légumes bulbes Légumes feuilles - Choux Légumes feuilles - Salades Légumes tiges et inflorescences
Désherbage mécanique/thermique
Lutte biologique via substances naturelles et microorganismes
Lutte génétique
Mesures prophylactiques
OAD, analyse du risque, optimisation de la dose
Protection/lutte physique
Régulation biologique et biocontrôle
Stratégie de couverture du sol
Travail du sol simplifié/non labour
Valorisation des filières et qualité produit
Variétés et matériel végétal
Année de publication 2019
  (mis à jour le 11 avr 2024)
Carte d'identité du système de culture
Station Terre d'Essais
Système conduit en
Agriculture biologique
Rattaché au projet
BREIZHECOLEG
Rattaché au site expérimental
Terre d'Essais
Réduction des coûts de production, des temps de travaux et de la pénibilité
Objectif de réduction visé
Présentation du système

Conception du système

Les enjeux de ce projet résident dans la convergence des attentes des producteurs, de la société et des consommateurs. Pour les producteurs, il s’agit de produire durablement, avec moins d’intrants, sans augmenter les temps de travaux et la pénibilité. Pour la société, il s’agit de renforcer qualitativement et quantitativement la sécurité alimentaire tout en respectant l’environnement. Pour les consommateurs, il s’agit de rendre accessible des légumes attractifs, sans résidus de pesticides et à prix acceptables.


En Agriculture Biologique (AB), l’objectif du projet est de rendre les systèmes les plus attractifs possibles d’un point de vue économique (réduction des coûts de production) et social (réduction des temps de travaux, de la pénibilité …) dans le but d’une généralisation de ces systèmes déjà à très bas intrants. 

 

Mots clés :
Légumes - Innovant - Agriculture Biologique - Expérimentation système - Terre d'Essais

 

Caractéristiques du système

Répétition A

succession

(Pr = printemps ; CF = Chou-Fleur ; Aut = Automne)

Pour la condition du CIPAN (Culture Intermédiaire Piège à Nitrate) en septembre 2022, à l'inverse, si  ce CIPAN est peu développé au 15/12/2022,  alors il sera détruit en mai 2023. La succession culturale sera alors : Brocoli d'automne (plantation : juillet 2023 ;  et récolte : octobre 2023) puis CIPAN sous couvert (plantation : dernier binage brocoli).

 

Répétition B

 

succession

Pour la condition du CIPAN en septembre 2019, à l'inverse, si le CIPAN est développé au 15/12/2022 alors il sera détruit en mars 2020. La succession culturale sera alors : Brocoli  (plantation : avril 2020 ; récolte : juin 2020) puis Chou fleur d'octobre (plantation : juillet/août 2020 ; récolte : octobre 2020), CIPAN sous couvert (plantation : dernier binage chou fleur ; récolte : mars 2021), salade de printemps (plantation : avril 2021 ; récolte : juin 2021), chou fleur tardif (plantation : juillet/août 2021 ; récolte : février 2022), artichaut 1 (plantation : avril 2022 ; récolte : août/septembre 2022), occultation + avoine (plantation : septembre 2022 ; récolte : février 2022), échalote (plantation : mars 2023 ; récolte : juillet 2023) et salade d'automne (plantation : août 2023 ; récolte : octobre 2023).

 

Situation de production : Cultures légumières de plein champs.

Espèces : Salade, chou-fleur, artichaut, échalote, brocoli.

Gestion de l'irrigation : Aspersion ou localisé.

Fertilisation : Engrais de ferme (compost ou fumier) + engrais organique du commerce.

Interculture : CIPAN (Avoine) ou légumineuses.

Gestion du sol/des adventices : Amendement organique, binage, désherbage thermique, désherbage manuel, faux semis, interculture, déchaumage.

Circuit commercial : Système organisé avec expéditeurs (système breton).

Infrastructures agro-écologiques : La construction ou l’aménagement d’infrastructures agroécologiques n’est pas un levier mobilisé dans le projet BREIZHECOLEG. Deux infrastructures agroécologiques sont présentes à côté de la parcelle expérimentale. A l’est, une haie arbustive de feuillus et de conifères et au sud une haie de bambous. 

parcelle TE

 

Objectifs

Agronomiques

  • Rendement  : Pas de baisse de rendement par rapport au système de référence en AB.
  • Qualité  : Respecter le cahier des charges en vigueur de l'AOP CERAFEL.
Environnementaux
  • IFT : Egal ou inférieur au système AB de référence.

Maîtrise des bioagresseurs

  • Maîtrise des adventices : Pas de gêne à la récolte, pas d’adventices estivales montées en graines, pas d’effet concurrentiel préjudiciable au rendement objectif.
  • Maîtrise des maladies  : Pas de dégâts au-dessus du seuil d’acceptabilité (dépend du rendement objectif et du cahier des charges de commercialisation des produits en AB).
  • Maîtrise ravageurs : Pas de dégâts au-dessus du seuil d’acceptabilité (dépend du rendement objectif et du cahier des charges de commercialisation des produits en AB).

Socio-économiques

  • Marge brute : Supérieure au système de référence.
  • Temps de travail : Inférieur au système de référence.

Le mot de l'expérimentateur

"Le projet BreizhEcoleg s'est intéressé à concevoir et à évaluer les performances agronomiques, économiques et sociales de systèmes de production maraîchers (artichaut, brocoli, chou-fleur et salade) économes en intrants phytosanitaires. Les essais menés à Terre d’Essais ont porté sur la réduction du temps de travail et de la pénibilité dans les systèmes de production maraîchers (système "AB innovant").

Les 6 années d’expérimentations ont permis de comparer les références technico-économiques des systèmes maraîchers AB étudiés ("référence" et "innovant") et de les confronter à celles mesurées dans des systèmes conventionnels ("référence", "bas intrants", "ultra bas intrants"). Les résultats pour la protection des cultures et les performances économiques et environnementales des deux systèmes étudiés ont été similaires. On retiendra que les échecs observés pour la gestion des bioagresseurs ont été principalement attribués aux conditions climatiques (difficulté pour le désherbage mécanique) ou aux dégâts des gros ravageurs (mauvais développement des cultures).

L’objectif de réduction du temps de travail et de la pénibilité n’a pas été atteint. Les temps de travail pour la plantation et les récoltes (89 % du temps total) ont été identiques dans les deux systèmes et la mise en œuvre des leviers innovants s'est avérée chronophage et, pour certains d’entre eux, pénible (pose/dépose de bâche). Il serait pertinent dans de futurs travaux de réduire le temps de travail et la pénibilité pour la protection des cultures en utilisant de nouveaux équipements pour la mise en œuvre des pratiques innovantes."

Stratégies mises en œuvre :
Gestion des adventices

Avertissement : seuls les principaux leviers mis en œuvre dans le cadre de l’expérimentation et permettant une réduction de l’utilisation des produits phytosanitaires sont présentés sur ce schéma. Il ne s’agit pas de la stratégie complète de gestion des adventices.

SdC AB innovant adventices

Les éléments en jaunes correspondent aux principaux leviers mis en oeuvre pour ce système de culture (SdC).

Leviers Principes d'action Enseignements
Lutte physique

Paillage biodégradable en culture de salades

Facilité de mise en place, efficacité de la technique. Nécessité de désherbage mécanique dans les allées.
Lutte physique Désherbage mécanique (binages) en culture d’artichaut, chou-fleur et brocolis.

Efficacité dépend des conditions climatiques, 3 à 5 passages sont nécessaires selon le salissement et la culture. Difficulté de gérer l’enherbement lorsque le développement de la culture est freiné par des dégâts de gros ravageurs.

Lutte physique

Occultation par la mise en place du paillage plastique à automne précédant la plantation d’échalote et le semis d’avoine diploïde dans les passe-pieds.

Dégradation des paillages plastiques pendant l’hiver, difficultés de plantation des échalotes dans les sols tassés, mauvaise maitrise de l’avoine dans les passe-pieds.
Lutte physique Semis sous couvert d’avoine diploïde lors du dernier binage Réussite de la technique varie considérablement selon les conditions climatiques lors du semis.

En AB, l’enherbement est maitrisé pour 75 % des cultures en AB Référence et 62 % en AB Innovant. La gestion des adventices sur salade est compliquée, tout comme sur la culture de brocoli. L’enherbement n’est pas non plus maitrisé sur l’artichaut en AB Innovant. Sur brocoli, le mauvais développement de la culture à cause de dégâts d’oiseaux (pigeons), dont la lutte n’a pas été intégrée dans le système décisionnel, n’a pas permis de concurrencer le développement des adventices dans les deux SdC AB. Sur salade et artichaut, l’enherbement n’a pas été satisfaisant quand il n'a pas été possible de biner mécaniquement à cause des conditions météorologiques.

Gestion des ravageurs

Avertissement : seuls les principaux leviers mis en œuvre dans le cadre de l’expérimentation et permettant une réduction de l’utilisation des produits phytosanitaires sont présentés sur ce schéma. Il ne s’agit pas de la stratégie complète de gestion des ravageurs.

Sdc AB innovant ravageurs

Les éléments en jaunes correspondent aux principaux leviers mis en oeuvre pour ce système de culture (SdC).

 

Leviers Principes d'action Enseignements
Lutte physique Bâchage Pénibilité de la pose/dépose des filets pour la gestion de l’enherbement. Montée en température sous les filets problématique pendant l’été.
Lutte biologique Biodiversité fonctionnelle Maîtrise des pucerons insuffisante

En AB, la gestion des ravageurs est similaire entre les deux SdC AB (69 % de satisfaction). Comme en conventionnel, les pucerons et les limaces en salade sont les ravageurs posant des problèmes. Les oiseaux (pigeons) engendrent également des dégâts conséquents sur brocoli dans les deux SdC AB. Les ravageurs sont parfaitement maitrisés sur chou-fleur, artichaut et échalote.

Gestion des maladies

Avertissement : seuls les principaux leviers mis en œuvre dans le cadre de l’expérimentation et permettant une réduction de l’utilisation des produits phytosanitaires sont présentés sur ce schéma. Il ne s’agit pas de la stratégie complète de gestion des maladies.

Sdc AB innovant maladies

Les éléments en jaunes correspondent aux principaux leviers mis en oeuvre pour ce système de culture (SdC).

 

Leviers Principes d'action Enseignements
Prophylaxie

Utilisation de variétés tolérantes et/ou résistantes

Le choix variétal est efficace et facile à mettre en œuvre
Physique Epuration L’épuration des plants a permis de limiter la diffusion de viroses et de maladies en culture d’échalote.

La gestion des maladies est satisfaisante pour 75 % des cultures en AB Référence contre 87 % en AB Innovant. Le mildiou et le botrytis sur salade ainsi que le mildiou sur échalote sont problématiques en AB Référence. En AB Innovant, le mildiou sur salade est également difficile à gérer. La pression des bioagresseurs est très dépendante des conditions météorologiques de l’année. Ne pouvant pas prendre en compte l’effet climatique dans notre analyse, les différences observées ne peuvent être imputées au SD.

Maîtrise des bioagresseurs

 

Satisfaction Bioagresseurs Rotation Echalote Brocoli Chou-fleur Artichaut 1ère année Artichaut 2ème année Salade de printemps Salade d'été Salade d'automne
SdC AB de référence A   Oiseaux         Enherbement   Limaces + Pucerons
B Mildiou Oiseaux       Limaces + Mildiou Pucerons + Botrytis   Mildiou + Enherbement
SdC AB Innovant A   Oiseaux + Enherbement       Maladies     Mildiou Enherbement + Pucerons
B   Oiseaux     Enherbement     Limaces + Enherbement Enherbement  

L’échalote est la culture la plus dépendante aux intrants phytosanitaires parmi les cultures présentes dans les systèmes. L’apparition des nouvelles variétés connues comme résistantes au mildiou sur le marché constitue le principal levier pour réduire les intrants phytosanitaires sur cette culture. Cette dernière présente un potentiel de rendement moindre que la variété de référence classiquement utilisée aujourd’hui dans la région Bretagne. En AB, la pression mildiou était peu intense lors des deux répétitions, où l’on retrouve alors de très bons rendements que ce soit en AB Référence ou en AB Innovant pour les deux systèmes. Le rendement optimum est quasiment systématiquement atteint.

En brocoli, d’importants dégâts d’oiseaux, dont la lutte n’était pas jusqu’à lors une problématique connue dans le système décisionnel, ont impacté l’ensemble des cultures de brocoli dans les deux SdC AB. Les rendements sont plus faibles en AB Innovant (4,5 T/ha) qu’en AB Référence (7,6 T/ha) car le niveau de pression était variable d’une année à une autre. Cette problématique hors système décisionnel ne permet pas d’analyser de manière pertinente les résultats pour ces cultures.

Le chou-fleur est une culture peu dépendante aux intrants phytosanitaires. Le principal ravageur est Delia radicum (la mouche du chou). La gestion des bioagresseurs est satisfaisante pour chaque répétition de tous les systèmes conventionnels et biologiques. En AB R, le nombre de têtes hectare est légèrement inférieur en rotation B dû aux conditions climatiques de l’année. La raison est similaire pour l’AB Innovation rotation B. En AB, il est surtout cherché des calibres moyens et donc le climat n’a eu aucun impact sur cet aspect-là. Le chou-fleur d’octobre a bien fonctionné en AB Innovant avec des rendements similaires au chou-fleur hâtif récolté en février, de l’ordre de 10 T/ha. Il pourrait permettre un gain de place et de répartition du travail sur l’année pour le producteur en réduisant considérablement le cycle cultural du chou-fleur.

L’artichaut est une culture pouvant être annuelle ou pluriannuelle (2 à 3 ans en général). C’est une culture qui peut être rapidement indépendante aux intrants phytosanitaires car elle ne présente pas de bioagresseurs impactant les rendements quantitativement. Les pucerons constituent la principale menace pour la qualité du produit. En AB Référence, la gestion des bioagresseurs a été satisfaisante pour les deux répétitions sur les deux ans. Dans le SdC AB Innovant, seul l’artichaut drageon, est récolté. La gestion des bioagresseurs a été satisfaisante pour les artichauts plantés en avril, ce qui se fait classiquement. Un binage manuel a été tout de même nécessaire en rotation B. L’implantation d’artichaut en juin a connu des résultats mitigés. Un rendement de plus de 17 T/ha a été observé en 2019. À l’inverse, un rendement de 3,3 T/ha a été quantifié dans la seconde répétition. Pour cause, les artichauts sont montés lors de l’automne doux précédent, impactant le rendement par la suite. L’artichaut drageon planté en juin semble être une technique risquée car dépendante d’un automne froid, mais rentable si celle-ci fonctionne.

La salade cultivée dans les SdC est une laitue Iceberg de 4ème gamme destinée au marché du frais. Les attentes du pilote sont exigeantes vis-à-vis de la gestion des bioagresseurs car cette exigence est demandée lors de l’agréage. De plus, la salade connait de nombreux bioagresseurs, principalement des ravageurs comme les pucerons et limaces mais aussi des maladies (Mildiou, Botrytis) et un enherbement également difficile à maitriser.  En AB, la gestion des bioagresseurs est tout aussi compliqué qu’en conventionnel. Les différences observées entre les systèmes AB Référence et AB Innovant relèvent plus de la variabilité interannuelle d’intensité de pression des bioagresseurs que du système décisionnel en lui-même.

Performances du système

Performance agronomique

Quantité alimentaire (T/ha/an)

par système de culture et par rotation

 

La satisfaction rendement est supérieure en AB Innovant qu’en AB Référence. Outre le brocoli, le rendement n’est pas satisfaisant en AB Référence sur cinq cultures de salade à cause des bioagresseurs ainsi que trois cultures d’artichaut et une de chou-fleur à cause des conditions climatiques. En AB Innovant, seule une salade n’atteint pas l’objectif de rendement à cause des bioagresseurs. Une culture d’artichaut et une de chou-fleur n’atteignent pas l’objectif de rendement à cause de mauvaises conditions climatiques. Pourtant, en termes quantitatifs, le système de référence AB Référence permet une production de 19,2 T/ha/an. Une production similaire est observée en AB Innovant mais avec une variation plus importante entre les deux répétitions.

 

Performance environnementale

 

Répartition de l'IFT

des systèmes de cultures AB par rotation

Concernant les SdC biologiques, seul le traitement des plants d'en moyenne 0,33 pour l’AB Référence et de 0,42 pour l’AB Innovant est comptabilisé dans l’IFT. La légère différence provient de la modification de la rotation en AB Innovant qui a donc plus de culture avec un plant traité. Aucun autre traitement, hors biocontrôle, n’a été appliqué dans les SdC biologiques.

 

Performance sociale

En AB, il ne semble pas y avoir de différences apparentes entre l’AB Référence et l’AB Innovant. Le temps de protection des cultures est de 26 h/ha/an pour les deux SdC. Les temps de désherbage mécanique (37 %) et de traitements phytosanitaires (4 %) sont similaires. Cependant, le temps consacré à la pose de bâche est supérieur en AB Référence (24 %) qu’en AB Innovant  (17 %). A l’inverse, le temps de désherbage manuel est plus important en AB Innovant (43 %) qu’en AB Référence (35 %). En AB aussi, la protection des cultures ne représente que 11 % du temps de travail total en AB Référence et 10 % en AB Innovant. Les temps de plantations et récoltes étant bien plus chronophages. La gestion de l’artichaut explique la différence de temps de travaux pour ces deux dernières catégories d’interventions.

Evaluation multicritère
Indicateur Système AB de Référence Système AB innovant
Quantité aliments produits (T/ha/an) 19.2 19.9
IFT hors biocontrôle et substance de base (/ha/an) 0.33 0.42
Emission GES (kgéqCO2/an) 1215 1149
Temps de travail total(h/ha/an) 241 230
Marge brute (base 100) 100

98

Evaluation multicritères

Système de culture de référence et innovant

Le temps de protection des cultures est de 26 h/ha/an pour les deux SdC. Il n'y a pas de différences apparentes entre ces deux SdC.

En AB pour la marge brute (MB), les deux systèmes mis en œuvre ne présentent pas de différence de résultats économiques. Le SdC AB Innovant présente une variabilité intra-système supérieure au SdC AB Référence. La variabilité provient de la maitrise de la culture d’artichaut drageon plantée en juin.Si cette culture est techniquement mieux maitrisée à l’avenir, le potentiel économique du système pourrait être supérieur à l’AB Référence.

En AB Référence, les émissions de GES sont égales à 1 215 kqéqCO2/ha/an. La proportion liée à la protection des cultures équivaut à 23 % des émissions totales. En AB Innovant, les émissions GES liées à la protection des cultures diminuent de 5 % par rapport à la référence. Cette diminution correspond à un nombre de binages légèrement inférieur en AB Innovant par rapport à l’AB Référence sur une des deux répétitions. Les émissions GES carburant totales diminuent également de 5 %.

 

Zoom sur la penibilité

Le travail en condition pénible dans les systèmes AB est une problématique prépondérante (Astie, 2022) et est jugé comme un frein majeur dans la réflexion du producteur conventionnel vers un passage en AB (Latruffe et al., 2013). Le projet BreizhEcoLeg fait l’hypothèse que l’augmentation du temps de travail et de la pénibilité, associée à la réduction de l’utilisation des produits phyto-sanitaires (PPP), est un frein aux changements de pratiques. Ce projet se fixe comme objectif d’identifier des systèmes qui visent la triple performance : environnementale, sociale et économique. Pour atteindre cet objectif, il est possible d’améliorer l’attractivité des systèmes AB légumiers frais de plein champ afin d’inciter les producteurs à la conversion et ainsi réduire l’utilisation des PPP.

Après 6 années d'expérimentation, il ne semble pas y avoir de différences apparentes entre l’AB Référence et l’AB Innovant. En effet, le temps de protection des cultures est de 26 h/ha/an pour les deux systèmes de culture. Les temps de désherbage mécanique (37 %) et de traitements phytosanitaires (4 %) sont similaires. Cependant, le temps consacré à la pose de bâche est supérieur en AB Référence (24 %) qu’en AB Innovant (17 %). A l’inverse, le temps de désherbage manuel est plus important en AB I (43 %) qu’en AB R (35 %). En AB aussi, la protection des cultures ne représente que 11 % du temps de travail total en AB Référence et 10 % en AB Innovant. Les temps de plantations et récoltes sont bien plus chronophages. La gestion de l’artichaut explique la différence de temps de travaux pour ces deux dernières catégories d’interventions.

En AB Référence, 77 h/ha/an sont consacrées à des interventions jugées pénibles. La récolte (45 %) et la plantation (27 %) sont les principaux postes. Les désherbages mécaniques et manuels viennent ensuite. Il n’y a pas de différence significative de temps de travail pénible avec l’AB Innovant (81 h/ha/an). Cependant, la proportion de chaque catégorie varie. En AB Innovant, la plantation prend une place plus importante avec 33 % du temps pénible total mais, à l’inverse, il n’y a pas de désherbage mécanique pénible. La gestion de la culture d’artichaut explique ces différences.

L’objectif de la triple performance économique sociale et environnementale est atteint pour les deux systèmes. Les résultats environnementaux et économiques sont similaires. L’objectif de réduction de la charge et la pénibilité du travail n’est pas atteint puisque le temps de travail total diminue de 5 % mais la pénibilité augmente de 5 % en AB Innovant. Le temps de désherbage manuel, plus important en AB Innovant qu’en AB Référence, masque les impacts des leviers mis en place pour diminuer le temps de travail total. Diminuer la pénibilité du travail dans les systèmes AB parait très compliqué à réaliser.

Transfert en exploitations agricoles

L’augmentation du temps de travail, même pour des pratiques plus vertueuses envers l’environnement, n’est pas envisageable. Le producteur légumier nord breton travaille 59 heures par semaine (en moyenne sur l’année) pour s’octroyer un revenu décent (Astie et Estorgues, 2023). La peur d’augmenter son temps de travail total et pénible est l’un des principaux freins à la conversion en AB (Latruffe et al., 2013). Pourtant, le temps de travail total et pénible ne semblait pas être supérieur en AB par rapport au conventionnel dans le projet Breizleg (Le Cunff, 2017). En 2023, le principal frein au passage en AB serait la fragilité de la filière. La filière légumes n’est effectivement pas épargnée par le ralentissement de la filière AB à l’heure actuelle avec une baisse de 4,3 % de la consommation entre 2020 et 2021 (Renault et al., 2022). La viabilité économique à long terme des systèmes AB semble menacée.

La réduction des PPP ne s’accompagne pas forcément d’un temps de travail à la hausse dans BreizhEcoLeg. Les producteurs n’adoptent pas certains leviers agroécologiques par méconnaissance des pratiques (Boulanger et al., 2023). En effet, ils n’ont pas le temps de s’intéresser et de s’informer sur de nouvelles pratiques et ainsi améliorer leur système. Il existe un écart entre l’urgence dans laquelle sont les producteurs lors des prises de décisions et l’approche système qui est une réflexion globale nécessitant beaucoup de temps.

Pistes d'amélioration, enseignements et perspectives

En AB, les systèmes de référence et innovant atteignent l’objectif de viser la triple performance économique, sociale et environnementale. Le système testé AB innovant permet en outre une diminution de 5 % du temps de travail mais la pénibilité a augmenté de 5 % à cause d’un temps de désherbage manuel plus important. La réduction de la charge et de la pénibilité du travail est difficile à mettre en place. Limiter au maximum le désherbage manuel semble être la clé de la réduction du travail dans tous les systèmes. Les facteurs principaux sont le système décisionnel mais surtout l’état de propreté initial de la parcelle. Il n’a pas été possible de quantifier l’impact de ces deux facteurs séparément.

Des alternatives agroécologiques viables existent sur certaines cultures (artichaut, choux) pour maintenir des résultats économiques satisfaisants sans augmenter la charge et la pénibilité du travail. Pour les cultures de salade et échalote, il n’existe pas actuellement de levier permettant une rentabilité économique égale à la conduite de référence. Des alternatives durables doivent être recherchées. De nouvelles expérimentations sont nécessaires pour mieux maîtriser la pression biotique de certains bioagresseurs (pucerons et limaces sur salade, mildiou sur échalote). Les solutions pourraient également se trouver à l’échelle de la filière (variétés résistantes, cahiers des charges à l’agréage). Il faudra pour cela faire face aux verrous sociaux techniques. Sans solutions viables, les producteurs pourraient arrêter de cultiver ces cultures.

Productions associées à ce système de culture