Les régulateurs de croissance : une utilisation loin d'être systématique, facile à réduire

"Un régulateur de croissance (ou substance de croissance) est une substance active ou une préparation qui, appliquée sur tout ou une partie d'un végétal, agit sur les mécanismes physiologiques, notamment la différenciation ou l'élongation cellulaires, sans nuire à la plante d'un point de vue agronomique." (Source Wikipédia)
L'utilisation des régulateurs de croissance est variable suivant les filières. En grandes cultures et en horticulture, elles visent à réduire l'élongation des tiges des plantes. Ainsi, en grandes cultures, on cherche à éviter la verse, alors qu'en horticulture, l'objectif est d'obtenir un port plus ramassé pour certaines plantes ornementales. En cultures pérennes : arboriculture et viticulture, l'emploi de ces produits vise plutôt à effectuer un éclaircissage des fruits.

La verse est une problématique majeure dans certaines cultures comme les céréales, le colza, le lin et le tournesol, car elle entraîne une perte de rendement et une baisse de qualité de récolte, due au développement de maladies. Elle est le plus souvent la conséquence d'une mauvaise gestion de la génétique et de l’agronomie.
Sur céréales |
Sur céréales, des régulateurs de croissance sont utilisés au printemps pour raccourcir les entre-noeuds lors de la montaison. Le risque de verse est déterminé principalement par quatre critères :
En cours de campagne, avant toute intervention chimique, des outils permettent d’estimer ce risque afin de raisonner les applications de régulateurs. |
Comment évaluer le risque ?
|
Sur colza |
Sur colza, des régulateurs de croissance sont parfois utilisés à l’automne pour limiter l’élongation avant l’hiver et la période de repos. L’intérêt pratique de cette technique a été jugée limité par les experts de Terres Inovia. Au printemps, il a été mis en évidence que les parcelles à risque sont rares. Cet institut technique agricole a développé un outil permettant de mieux évaluer la nécessité d’un régulateur de croissance afin d’éviter toute intervention inutile à l'automne et au printemps. |
Comment évaluer le risque ? |
![]() Sur lin |
Concernant le lin, l’essentiel est d’assurer une croissance régulière. |
Comment évaluer le risque ? |
Sur tournesol |
Enfin concernant le tournesol, le risque de verse est le plus souvent lié à une erreur technique importante :
Aucun gain de rendement n'a été mis en évidence grâce à l'usage de régulateur. |
En définitive, le choix des variétés est donc un aspect crucial, consulter le levier PIC en lien dans le carrousel. Des notes sont proposées afin de caractériser la tolérance variétale à la verse. Une fiche GECO intitulée « Semer / repiquer des variétés peu sensibles à la verse et à l'élongation automnale » creuse un peu plus ce sujet. Les instituts techniques agricoles proposent également des outils tels que myVar pour mieux réussir ce choix variétal et l'adapter au risque.
Certains agriculteurs DEPHY ont intégré ces variétés tolérantes à la verse dans leurs itinéraires techniques. Trois trajectoires (Bourgogne, Pays de la Loire, Normandie) issues de groupes fermes DEPHY sont disponibles. Enfin deux actions CEPP (voir ci-contre) concernent les variétés de blé tendre et d'orge résistantes aux maladies et à la verse.
Par ailleurs, la modulation intraparcellaire des régulateurs de croissance grâce à l'agriculture de précision peut également être une solution à envisager. Au travers d'une vidéo de 5'37" (à consulter ci-contre), un agriculteur nous explique pourquoi l'agriculture de précision est un enjeu majeur pour une agriculture plus durable et les freins qui peuvent subsister pour le développement de ces technologies. En effet, ces outils d'optimisation existent mais demandent un accompagnement et un partage nécessaire. En protection des cultures, l'agriculture de précision permet de moduler les régulateurs de croissance ou les fongicides.





Les régulateurs de croissance peuvent être utilisés en cultures fruitières et en vigne afin de réaliser l'éclaircissage des arbres / ceps.
![]() En cultures fruitières |
L’éclaircissage des fruits est un point clef des cultures fruitières. En effet, l’objectif est d’effectuer une sélection permettant ainsi d’éviter la concurrence entre fruits durant la maturation. En fruits à noyaux l’objectif est aussi de sélectionner les fruits les mieux positionnés pour avoir une bonne teneur en sucre et une belle coloration. Des régulateurs de croissance sont donc utilisés en arboriculture et plus particulièrement en pommiers afin d’effectuer cet éclaircissage. Les essais et utilisations n’ont pas été encourageants sur les autres espèces fruitières et la vigne. L'éclaircissage mécanique reste un point clef dans différentes cultures fruitières permettant d'éviter l'utilisation de régulateurs. |
|
![]() En vigne |
Concernant la vigne, l'éclaircissage fructifère consiste en la suppression des grappes en excès par rapport aux objectifs de production, au climat ou aux capacités de la plante (travaux en vert) afin de réduire les risques de maladies comme la pourriture grise. Cette opération a été effectuée pendant un temps grâce à de l'éthéphon. Cette molécule n'est désormais plus autorisée pour cet usage. Une nouvelle technique est apparue récemment : le passerillage éclaircissage sur souche ou PES qui consiste, "sur une vigne conduite en Guyot, à sectionner une partie de la branche à fruits quelques semaines avant la récolte. Les raisins près du courson, toujours alimentés, continuent à mûrir normalement tandis que les autres subissent un passerillage naturel sur souche. La déshydratation des baies entraîne une concentration des différents constituants du raisin avec à la clé une hausse des teneurs en sucres, de l’acidité totale, une plus grande richesse en composés phénoliques et en anthocyanes." (Source IFV) |
L'éclaircissage mécanique est une solution efficace et envisageable dans bien des cas (voir le levier ci-contre). Une action CEPP a été mise en place à ce sujet, elle consiste à utiliser un équipement en pré ou post floraison afin de réguler la charge en fruits en vergers de fruits à pépins ou à noyau (abricots et pêches). Un projet de recherche a étudié l'éclaircissage sur pommier : "Eclaircissage mécanique du pommier assisté par analyse d’image, technologie innovante pour une arboriculture productive et écologique".
D'autre part, il est parfois possible d'utiliser une substance naturelle en remplacement d'un régulateur (voir le levier ci-contre). Une action CEPP vise à l’utilisation d’un produit de biocontrôle, composé d’une substance naturelle de croissance, afin de réaliser l’éclaircissage des pommiers en agissant sur le taux de nouaison.






Certaines cultures ornementales nécessitent souvent une régulation de croissance pour obtenir une plante de qualité. L'emploi de régulateurs de croissance reste ainsi une pratique courante en horticulture.
La thigmomorphogénèse est une méthode physique alternative aux régulateurs de croissance potentiellement utilisable en horticulture (voir le levier PIC ci-contre). Il est ainsi avéré que "toucher" le haut d'une plante inhibe sont apex, la plante ralentit alors sa croissance et se ramifie. Cette stimulation mécanique permet de réduire la croissance des plantes. Ce mécanisme naturel d'arrêt de croissance rapide, appelé thigmomorphogénèse, permet à la plante d'être à la hauteur souhaitée.
Une action CEPP consiste à utiliser la stimulation mécanique comme alternative à la régulation chimique de la croissance des plantes en horticulture ornementale. Le projet DEPHY EXPE Hortipot a intégré cette technique dans différents systèmes testés. Le projet Hortipot 2 poursuit cet objectif. Une fiche système DEPHY fait le point sur la culture de chrysanthème de Toussaint. Une alternative aux régulateurs est donc envisageable.
La culture des plantes à froid peut également être envisagée. Une vidéo a été réalisée à l'Astredhor Sud-Ouest, dans le cadre d'un groupe DEPHY Ferme en ornement, pour le démontrer.
Enfin, l'utilisation de filtres lumineux peut être une alternative. Elle a été testée par l'ASTREDHOR (voir ci-contre).





Les exemples pris dans les différentes filières montrent qu'il est facilement envisageable de supprimer l'utilisation des régulateurs de croissance dans de nombreuses situations. Ceci pourrait permettre de gagner en moyenne un point d'IFT. La génétique, le raisonnement de la fertilisation et l'utilisation de moyens mécaniques sont ainsi des solutions alternatives pouvant être combinées selon les filières.