Système ACS vallee - OP ACS vallée CA82 - REDUCE
Conception du système
La finalité du projet est de montrer, à l'échelle agriculteur, la faisabilité technico-économique de pratiques culturales innovantes et de proposer des systèmes en grandes cultures alliant économie des filières, réduction des produits phytosanitaires et maintien de la fertilité des sols. Il s'agit de répondre aux enjeux de changement climatique et gestion durable des pratiques. Des indicateurs comme l’IFT, la marge brute, la matière organique et la consommation d’engrais minéraux ont été définis pour le suivi du système.
Mots-clés :
Agriculture de conservation des sols (ACS) - Allongement rotation - Semis Direct - Couverture des sols - Réduction d'intrant
Caractéristiques du système
Interculture : Couverture des sols avec des couverts végétaux, et cultures dérobés Gestion de l'irrigation : Sondes tensiométriques Fertilisation : Plan de fumure, reliquats azotés, OAD (MesSatimages) Travail du sol : Aucun (SD) Infrastructures agro-écologiques : Bordures de champ, hôtel à insectes
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Agronomiques |
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Environnementaux |
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Bioagresseurs |
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Socio-économiques |
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Le mot de l'expérimentateur
Les objectifs de la plateforme sont ambitieux, mais répondent aux enjeux environnementaux, sociaux et économiques des exploitations. Nous avons pu prendre des risques qu'un agriculteur ne peut envisager, afin de développer des pratiques agroécologiques pour des systèmes de cultures performants.
La gestion des adventices a été un point difficile sur la station durant les 6 ans. L'objectif fort de réduction des produits phytosanitaires et de rester en agriculture de conservation des sols (ACS), a contraint de limiter les choix de leviers :
Leviers |
Principes d'action |
Enseignements |
Diversification des cultures |
Alternance cultures d’hiver et de printemps Alternance des familles (dicotylédones et graminées) |
Efficacité difficile à estimer |
Introduction de couverts en inter-culture | Concurrence vis à vis du développement des adventices |
Nécessite une bonne levée et une densité importante du couvert |
Optimisation des traitements | Reconnaissance des adventices pour adapter le programme de désherbage à la parcelle. |
Les conditions d’application et les stades d’intervention conditionnent l’efficacité |
Semis direct | Diminution du stock semencier au cours des années par l’absence du retournement du sol. (Pas de mise en dormance des graines) | Stock semencier trop important, les parcelles sont d'ancienne parcelle d'élevage ou des apport de fumier été régulier, et donc le stock semencier adventices est important. Combiné à une réduction des IFT ne permettent d’obtenir des efficacités optimales des traitements, adventices trop important et produit peu efficace a faible dose. |
Leviers | Principes d'action |
Enseignements |
Semis précoce | Semis plus précoce des colzas pour éviter la pression des altises avec un colza bien développé au moment des vols | Ce levier a pu être mobilisé lorsque les conditions climatiques le permettaient, il est efficace quand les conditions sont propice, (développement important du colza semer tôt et moins sensible au attaque) |
Mise en place d'effaroucheur |
Lutte physique contre les volatiles au semis et à la récolte. Canon, plumes, épouvantails |
Ces leviers n'ont pas suffi. Destructions des levées du tournesol, et des récoltes de pois ravagées |
Trichogrammes | Les trichogrammes, une fois lâchés dans la parcelle, pondent dans les œufs de pyrales | Ce levier a été une réussite pour lutter contre la pyrale du maïs. En association avec la surveillance des vols via le Bulletin de Santé du Végétal (BSV) |
Surveillance des limaces | La surveillance des limaces via des pièges ou des caméras | Optimiser les traitements avec le positionnement des Phosphate ferrique (produit de biocontrôle) en amont des risques |
Mise en place d’une clôture électrique | Mise en place d’une clôture électrique tout autour des parcelles de maïs afin d’éviter les sangliers | Mise en place assez tôt de la clôture pour éviter les dégâts avant la formation des épis |
Implantation d’une bande fleurie | Semis d’une bande fleurie tout autour de la plateforme | Présence d'auxiliaires de cultures : sur le pois, la présence de coccinelles a permis de gérer la pression en pucerons |
Au cours de 6 années expérimentation, la pression maladie a été facilement maitrisée.
Les leviers mis en œuvre on permit de diminuer fortement l’utilisation de produits phytosanitaires.
Leviers | Principes d'action | Enseignements |
Choix de variétés résistantes/ tolérantes aux différentes maladies | Utiliser les services de la génétique | Important à prendre en compte |
Mélange variétal (blé) | Effet de compensation des différentes variétés | Besoin de mélanges variétaux complexes. Vigilance sur les indices de maturité |
Allongement des rotations | Permet de rompre le cycle des maladies | Retour de la culture en fonction des maladie, 4 à 6 ans de rotation permet de diminuer fortement les risques. |
Maîtrise des bioagresseurs :
Année | Adventices | Puceron | Limaces | Sanglier | Palombe | Maladie Céréales |
2018 |
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2019 | ||||||
2020 | ||||||
2021 | ||||||
2022 | ||||||
2023 |
Performances agronomiques :
Culture | Objectif de rendement (q/h) | Rendements réalisés (q/h) | |||||
2018 | 2019 | 2020 | 2021 | 2022 | 2023 | ||
Pois protéagineux | 23 | 0 | 21 | 24 | 28 | 24 | 0 |
Colza | 29 | Maïs : 109 | 0 | Maïs : 10 | Tournesol : 16 | 0 | Lin : 19 |
Blé tendre | 55 | 48 | 86 | 64 | 41 | 20 | 44 |
Orge | 60 | 52 | 81 | 48 | 43 | 14 | 63 |
Soja dérobé | 20 | 11 | 9 | 9 | 24 | 0 | 0 |
BAF | 55 | 45 | 49 | 57 | 40 | Maïs dry : 11 | 35 |
Maïs | 110 | 116 | 110 | 10 | 125 | 48 | 90 |
Le code couleur indique le niveau de satisfaction, défini en fonction de l'atteinte de l'objectif initial :
Vert = satisfaisant ; jaune = moyennement satisfaisant ; rouge = non satisfaisant
Pois protéagineux : Les estimations des rendements du pois sont corrects mais des contraintes récurrentes ont impacté les résultats de cette culture. Les conditions de semis ont souvent été trop humides, et les sols étaient mal ressuyés avec un précédent maïs irrigué. La présence de pigeons a engendré chaque année des estimations de rendement, car dès la maturité des graines, ils attaquaient la parcelle avant la récolte. nous revenons sur le problème de micro parcelle, sur une grand parcelle agriculteurs, les dégâts serai moindre, donc nos rendements son calculé par des comptage des graines.
Colza : Échec de cette culture sur la plateforme. Beaucoup de facteurs sont en cause. L’implantation est souvent difficile, les conditions climatiques sont de plus en plus sèches (obligeant à un re-semis suite à l’échaudage des graines) et il y a des pressions des ravageurs d’automne trop importante. Lorsque le colza réussissait à passer l’hiver, les pressions méligèthes était trop forte. (Problématiques liée aux micro-parcelles). La plupart des années, le colza a donc été remplacé par une autre culture : maïs, tournesol ou lin.
Blé tendre : Dans l’ensemble, les blés tendres ont des rendements satisfaisants, ils arrivent à s’adapter aux conditions de semis, ou à compenser si la densité de levée était faible. Les dernières années (2021/2022/2023), les rendements ont été impactés par les conditions climatiques sèches au printemps, où les besoins en eau du blé restent importants, et défavorables à la valorisation des apports d’azote.
Orges : Les résultats de l’orge se recroisent avec ceux du blé. Certaines années sont assez exceptionnelles comme 2019. Cette céréale est plus rustique, plus tolérante aux conditions climatiques et son développement plus rapide permet une meilleure maîtrise des adventices.
Soja dérobé : La technique de la double culture est assez difficile à mettre en place, l’irrigation est indispensable pour accompagner le soja de la levée jusqu’au remplissage du grain. Seul l’année 2021, avec un été pluvieux, a permis d’avoir un rendement satisfaisant. La récolte s’effectue souvent dans des conditions difficiles avec des automnes humides ou des parcelles avec un développement des adventices trop important qui laisse trop de matière verte pour le passage de la moissonneuse.
Blé de Force (BAF): Moins satisfaisant que les autres céréales à paille de la rotation. Les bénéfices d’un précédent soja (pour les caractéristiques des légumineuses) n’ont pas compensé les mauvaises conditions de semis (semis plus tardifs et parcelles avec une pression adventices mal maîtrisée), qui ont engendrées de mauvaise levée.
Maïs : Les résultats sont globalement très bons et atteignent largement les objectifs de rendements, excepté pour 2023 dû à une attaque de sanglier. A noter, les restrictions d’irrigation de 2022 ont fortement impacté la fin du cycle de la culture. 2020 est marquée par une pression adventice très importante dès le semis, suite un échec du développement du couvert pendant l’inter-culture.
Les indicateurs ci-dessous sont issus de Systerre, ils correspondent à la moyenne du système de culture ACS (avec 6 ans de rotation). Un 2ème système de culture (TDS) avec une rotation de 6 ans, mais différentes du système ACS et avec travail du sol possible, a également été expérimenté sur la plateforme de Bexianis. Les résultats de ce 2ème système sont notés dans le tableau ci-dessous à titre indicatif, sans volonté de réaliser une comparaison entre les systèmes mais permettant d’avoir des valeurs de références (hors IFT).
Indicateurs | Système ACS | Système TDS |
Efficience économique des Intrants | 0.88 | 1.52 |
Production énergie Brute (Mj/ha) | 67833.86 | 79700 |
Marge nette avec aides (€/ha/an) | 5.46 | 211,37 |
IFT Total | 3.83 (Ref 4.06) | 2.9 (Ref 4.02) |
IFT Herbicides | 1.82 (Ref 1.75) | 1.09 (Ref 1.76) |
IFT Hors Herbicides | 2.01 (Ref 2.31) | 1.81 (Ref 2.26) |
Bilan azoté (Kg d’N/ha) | 46.51 | 23.94 |
Diversité des cultures (espèces) | 7 | 7 |
Proportion de légumineuses dans la rotation | 28 | 28 |
Temps de travail h/ha | 11.23 | 12.25 |
Emission GES (kgéqCO2/ha) | 1669.68 | 1470 |
Quantité d’irrigation (m3/ha) | 558.73 | 578.04 |
Production d'énergie Brute : correspond au poids que représente la production énergétique des produits bruts. Les accidents de culture et les bas rendements impactent cet indicateur.
L’efficience économique des Intrants (EE) : permet d’apprécier la dépendance d’un système de culture face aux intrants pour assurer sa production (produit brut). On comprend donc, que le système ACS est plus dépendant aux intrants que le système TDS, cela est lié aux plus faibles rendements et donc à des charges plus élevées.
La Marge Nette : est très faible pour le système ACS. On retrouve une moyenne de 5 €/ha/an, qui ne permet pas à un agriculteur de se rémunérer. Ce résultat est lié aux objectifs de la plateforme, réduire les traitements phytosanitaires de 50%. Pour le système TDS, cela a pu être compensé par le travail du sol, les faux semis ou le désherbage mécanique. En revanche, pour le système ACS la maîtrise des adventices a été beaucoup plus complexe et a fortement impacté les rendements. Sans les aides, la marge nette est de -271€/ha/an.
IFT (Indice de Fréquence de Traitement) : L'objectif est une réduction IFT par rapport au référence IFT régional des Grandes cultures des exploitations d'Occitanie. Même si l’objectif est de - 50%, les IFT du système restent inférieur à la référence. La diminution des traitements herbicides est difficile lors du passage en ACS sur des parcelles avec une pression adventices importante comme la plateforme. En effet, l’historique de ces parcelles (épandage de fumier tous les ans pendant 10 ans) a entretenu un stock semencier important. Concernant les IFT hors herbicides, les leviers cités au-dessous ont permis de diminuer l’utilisation des produits phytosanitaires (hors herbicides) sans impacter les potentiels de rendements et l’état sanitaire de l’ensemble des cultures du système.
Bilan azoté : Les rendements faibles du système ACS pénalisent le bilan azoté. La gestion de l’azote s’est faite avec l’utilisation d’OAD (reliquat azoté, Pilotage via MesSatimages) et par l’introduction de légumineuses dans la rotation (Pois, Soja, couverts végétaux avec Féverole).
Temps de travail : Le temps de travail global d'un système ACS devrais être en forte diminution car moins de travail de travail du sol, uniquement un semis direct. Contre toute attente, le temps de travail du système ACS est presque aussi important que celui en TDS, cela s’explique par les échecs de culture plus récurrents pour ce système qui ont impliqué de ressemer.
Émissions de gaz à effet de serre (GES) : Même explication que pour l’indicateur temps de travail.
Quantité d’irrigation : L’irrigation a été conduite via des sondes tensiométriques pour apporter l’eau au plus proche des besoins de la culture. Pour le système ACS, la quantité d’eau utilisée est plus faible, cela n’est pas lié à des économies d’eau via les caractéristiques d’un système ACS, mais dû à la pression adventice difficilement maîtrisée. Les adventices ayant pris le dessus sur la culture, l’irrigation n’a donc pas été conduite jusqu’à la fin des besoins pour certaines cultures.
Depuis 2018, un des objectifs de la plateforme a été l'utilisation du glyphosate en dernier recourt. Nous avons les premières années évité le traitement glypho. Durant les 6 ans du système, sur un total de 36 parcelles, nous n'avons pas utilisé de glyphosate sur 6 parcelles. Nous avons eux des gros problèmes d'adventices lors de la non-utilisation du glypho, qui a impacter énormément les cultures.
Stratégie du choix de l'utilisation du glypho :
- Impacte de la flore adventice sur la parcelle, selon la pression présente sur la parcelle, nous envisagions un traitement. La problématique de nos parcelles est qu'avant elles été très régulièrement fertiliser avec du fumier, qui amener beaucoup de graine d'adventices, ce stock est encore aujourd'hui très présent dans nos parcelles.
- Maintien d'une sécurité importante pour la culture lors de la levée, nous souhaitions un minimum de concurrence avec les adventices lors de la levée de la cultures, pour permettre un bonne levée, rapide et dense. Dans notre système, les traitements étaient la seule solution rapide pour limiter les adventices.
- L'agriculture de conservation, nous a contraints à trouver des solutions autres que le travail du sol et le désherbage mécanique. Nous avons donc réalisé une couverture totale du sol, pour limiter la prolifération des adventices. Tout d'abord en adaptant la rotation à un système diversifié pour nous offrir un plus large éventail de produits phytosanitaires. Ensuite réduire les d'intercultures en implantant des couverts végétaux l'hiver et l'été, pour concurrencer les adventices et couvrir le sol, ainsi que des cultures dérobés.
- La base de l'ACS est le semis direct, nous avons réalisé tous nos semis durant les 6 ans semis direct uniquement, notre objectif en utilisant le semis direct étaient de travail le moins possible le sol avant de limiter le travail du sol et l'émergence des adventices. Les résultats sont peu concluants, nous nous retrouvons rapidement infectées par les adventices.
Nous avons rapidement observé des problématique de l'arrêt du glypho :
- Salissement important des parcelles, les parcelles sans glypho se sont rapidement salit, avec la prolifération importante et la monté en graine, nous avons accentué les adventices sur les parcelles au cours des années.
- La pression trop importante, a entraîné une réaction en chaîne : Semis difficile dans les conditions de pression adventices (des ressemis on été nécessaire), donc manque de plante a la levée, pour ensuite avoir durant la campagne une concurrence à la ressource (eau et éléments minéraux). Ce qui a engendré des pertes de rendement ou même des abandons de cultures. Par la prolifération des adventices avec la montés en graine, une utilisation du broyeur régulièrement pour limiter un peu les adventices.
Ci-joint, quelques cas de parcelle non traité au glypho avec une concurrence importante :
Toutes les pratiques mises en place sont reproductibles pour les exploitations du Tarn-et-Garonne avec le matériel présent sur les exploitations ou en faisant appel à une ETA. Le frein majeur est le résultat économique faible, mais qui peut être nettement supérieur en condition agriculteur, car l’on supprime les facteurs limitants que nous avons rencontrés qui sont lié à l’expérimentation, et aux micro-parcelles.
Le système testé, représente un système en agriculture de conservation des sols (ACS) avec passage instantané en semis direct, basé sur la couverture maximale des sols, l’allongement de la rotation et la diversification des cultures.
Les résultats multicritères ont une tendance négative. La pression adventice est une des causes principales de la faible performance économique, ainsi que l’introduction de cultures dérobées pouvant engendrer des charges importantes et donc impacter l’ensemble du système.
L’arrêt du travail du sol associé à une diminution des IFT (herbicides), du glyphosate en dernier recours et du programme de désherbage sans S-métolachlore était trop brutal, pour un passage en ACS, sur des parcelles avec une pression adventices importante. Il est donc difficile, au bout des 6 ans, de mettre en avant le vrai potentiel d’un système en ACS avec le contexte de cette plateforme.
L’utilisation du glyphosate a été nécessaire à plusieurs reprises. A noter, que le glyphosate n’a pas été utilisé pour détruire le couvert, mais pour maîtriser les adventices levées dans celui-ci et qui présentaient alors une trop forte compétition pour la culture à semer. En ACS, le glyphosate est donc plus que nécessaire pour assurer la levée des cultures, étant donné qu’il n’y a pas de travail du sol et que la présence de résidus en surface ne permet pas le passage d’outils de désherbage mécanique, comme la herse étrille ou le binage.
Concernant la performance environnementale, les pratiques de l’ACS mises en œuvre présentent des résultats très positifs en termes de fertilité du sol. En effet, les parcelles ont une bonne structure sans zone de rupture entre les différents horizons, de la porosité au niveau des agrégats avec une texture grumeleuse. La vie du sol a beaucoup évolué, ce qui facilement est identifiable avec la présence de nombreux vers de terre.
Ce projet nous a permis de diffuser et vulgariser autour des pratiques de l’ACS et de la réduction des intrants pour les agriculteurs, l’enseignement et les conseillers, du Tarn-et-Garonne et des départements voisins.
Les résultats annuels et vidéos de la plateforme peuvent être consultés sur le site internet ou sur la page Facebook de la chambre d’agriculture du Tarn-et-Garonne.
https://www.facebook.com/watch/chambagri82/495044852012591/