Système BIO Poules - INRAE Gotheron - MIRAD
Le système de culture BIO Poules repose sur des abricotiers greffés sur porte-greffe Montclar à 1,20 m de hauteur pour diminuer les mortalités de charpentière et d'arbres dues à la bactériose à Pseudomonas. Pour compenser la perte de vigueur des arbres induite par ce greffage haut, la densité de plantation a été doublée à 1000 arbres par ha par rapport aux densités classiques à 500 arbres par ha. Les arbres ont été formés en gobelet.
La suppression des traitements repose sur la moindre sensibilité des arbres à la bactériose induite par le greffage haut, et sur le choix de variétés peu sensibles aux maladies. Le système agroforestier BIO Poules ambitionne d'évaluer les intérêts d'intégrer des animaux l'élevage au sein d'un verger d'abricotier (prophylaxie sur les ravageurs, gestion de l'enherbement, fertilisation du verger). Pour cela, des poules pondeuses en poulailler mobile ont été introduites dans le verger, au nombre de 350 poules/ha. Ce système de culture est conduit en Agriculture Biologique depuis sa plantation en 2020.
Mots clés :
Abricotiers - Greffage haut - Gobelet haute densité - Agroforesterie - AB sans cuivre
Caractéristiques du système
Espèce | Variétés | Porte-greffe | Mode de conduite | Distance de plantation | Année d'implantation | Valorisation | Circuit commercial |
Abricotier | Tom Cot, Vertige | Montclar | Gobelet | 4 x 2.5 m | 2020 | Frais | Court |
Système d’irrigation : Micro-aspersion suspendue Gestion de la fertilisation : Aucun apport en dehors de ceux réalisés par les animaux d'élevage Infrastructures agro-écologiques : Haies composites orientées Est-Ouest tous les 110 m Protections physiques : Aucune |
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Agronomiques |
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Environnementaux |
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Maîtrise des bioagresseurs |
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Socio-économiques |
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Le mot de l'expérimentateur
* Texte à compléter
Avertissement : seuls les principaux leviers mis en œuvre dans le cadre de l’expérimentation et permettant une réduction de l’utilisation des produits phytosanitaires sont présentés sur ce schéma. Il ne s’agit pas de la stratégie complète de gestion des adventices.
Leviers | Principes d'action | Enseignements |
broyage inter-rang | L'inter-rang est totalement enherbé. Il est broyé lorsque l'herbe gène les interventions | |
maitrise de l'enherbement | les poules circulent librement sur la parcelle, sauf en période de traitements et lors des récoltes | L'action des poules sur l'enherbement permet de réduire le nombre de broyages mécaniques |
Avertissement : seuls les principaux leviers mis en œuvre dans le cadre de l’expérimentation et permettant une réduction de l’utilisation des produits phytosanitaires sont présentés sur ce schéma. Il ne s’agit pas de la stratégie complète de gestion des ravageurs.
Leviers | Principes d'action | Enseignements |
huile d'hiver | asphyxient les pucerons Phorodon humulifoliae. Les huiles permettent en partie de limiter leur développement | L'huile suffit à maintenir une population non impactante |
argile | l'argile est supposée avoir un effet répulsif vis-à-vis des psylles | l'action de l'argile est insuffisante, une partie du verger est touchée par l'ECA |
prédation des poules | les poules prédatent les forficules | la population de forficule est significativement réduite au printemps, mais les attaques sont nombreuses sur les fruits. La prédation des poules ne semble pas suffisante à elle seule (cf pièce jointe Ecofruit). |
Avertissement : seuls les principaux leviers mis en œuvre dans le cadre de l’expérimentation et permettant une réduction de l’utilisation des produits phytosanitaires sont présentés sur ce schéma. Il ne s’agit pas de la stratégie complète de gestion des maladies.
Leviers | Principes d'action | Enseignements |
choix variétal | génétique | premier levier pour lutter contre le monilia |
greffage haut | supposé : éloignement des organes sensibles des zones de gel/dégel | a supprimé la mortalité des arbres face au chancre bactérien |
polysulfure de calcium | traitement curatif contre le monilia sur fleur après de fortes pluies contaminantes | ce traitement seul ne suffit pas lors de fortes pressions du monilia, jusqu'à 60% des rameaux à fleurs ont été désséchés |
action prophylaxique des poules | les poules mangent les fruits moniliés tombés au sol | le dispositif système ne permet pas d'évaluer cette action |
éclaircissage à la fleur | limite les portes d'entrée du monilia sur fleur puis le rameau | utile, d'autant plus pour des variétés très floribondes comme Tom Cot |
taille prophylaxique | taille des rameaux séchées par le monilia pour baisser l'inoculum | limite la propagation de la maladie |
année | Chancre bactérien | Monilia sur fleur | Puceron Phorodon humulifoliae | ECA | Forficules | Rouille | Adventices | |||||||
2021 | ||||||||||||||
2022 | ||||||||||||||
2023 | ||||||||||||||
2024 | ||||||||||||||
Ref BIO | BIO Poules | Ref BIO | BIO Poules | Ref BIO | BIO Poules | Ref BIO | BIO Poules | Ref BIO | BIO Poules | Ref BIO | BIO Poules | Ref BIO | BIO Poules |
La présence des poules a eu un impact mitigé sur l’évolution des bioagresseurs.
L’interdiction du cuivre a demandé une augmentation progressive de l’alternative, un produit phytosanitaire curatif, qui n’a par ailleurs pas été suffisant lors de fortes pressions du monilia.
La lutte contre l’ECA n’est pas totalement satisfaisante. Le système BIO Poules utilise, tout comme la référence biologique, de l’argile pour limiter les piqures sur les arbres par le psylle vecteurs lors des périodes sensibles au printemps. Pour l'instant 5 arbres sont morts de cette maladie.
L’action prophylaxique sur le monilia par la consommation des fruits au sol par les poules n'a pas pu être mesurée. Leur prédation sur les forficules a été prouvée, mais la diminution de la population de ce ravageur au printemps n'est pas suffisante pour réduire les morsures sur fruits en dessous d'un niveau acceptable.
Les poules ont cependant montré leur intérêt sur la gestion de l'enherbement, en permettant de réduire le nombre de passages de désherbage mécanique. Un autre avantage des poules est que leurs fientes remplacent l’achat de fertilisants.
Performance environnementale
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L’IFT de BIO Poules augmente de 1,3 en 2021 à 5,8 en 2024, tandis que Ref BIO atteint 10,5 IFT en 2024.
Les traitements épandus dans BIO Poules sont tous des traitements de biocontrôle. Ils ciblent le monilia sur fleur, le psylle vecteur de l’ECA, et le puceron Phorodon humulifoliae.
L’IFT hors biocontrôle a été de 0,6 puis 1,2 en 2024 pour la référence bio. La réduction de 100% des produits de biocontrôle a été atteinte pour le système innovant. En 2024, BIO Poules a nécessité 39% IFT totaux de moins que Ref BIO.
Performance agronomique
En 2022, aucune distinction n'a été faite entre les déchets et les 2eme choix.
Les rendements de ce système innovants dépendent majoritairement de la variété.
La variété Tom Cot est moins sensible au monilia sur fleur, et a maintenu des rendements corrects (moyenne en 2023 et 2024 : 11,1 T/ha). Le monilia a permis d’éclaircir naturellement la charge en fleur et donc en fruits. La variété n’a pas alterné sur cette parcelle, comparé à Ref BIO.
La variété Vertige, en revanche, supporte bien des charges relativement élevées et n’a pas tendance à alterner. Elle a cependant subi de fortes pressions de monilia sur fleur. Le système BIO Poules étant peu protégé contre cette maladie, les attaques de monilia sur fleur ont desséché entre 60 et 70% des rameaux à fleur en 2022 et 2024. Ces deux années, la modalité BIO Poules Vertige a produit très peu de fruits.
Les fruits sont appétant et se vendent bien.
Lors des années 2022 et 2024 à faible charge en fruits, les fruits présentaient de gros calibres qui sont plus sensibles au développement du monilia en post récolte.
Performance économique
La marge « brute » a été calculée en prenant en compte le chiffre d’affaires, les coûts d’approvisionnement, les coûts opérationnels et l’amortissement des coûts d’installation de la parcelle. Le chiffre d’affaires a été calculé en utilisant les coûts RNM (réseau national des marchés de France Agri Mer) de la région, qui reflètent les prix du marché en fonction de la période de vente et du calibre des fruits. Le coût de mise en plateau a été enlevé.
Le système BIO Poules a des charges relativement faibles. Les économies de fertilisation et produits phytosanitaires (4250 €/ha comparé à 7000 €/ha pour Ref BIO) sont contrebalancées par d’autres dépenses (taille prophylactique monilia, contrat avec éleveur de poules,...).
Pour la variété Tom Cot, Bio Poules présente une marge « brute » cumulée en 2024 (+10 330 €/ha) supérieure à la référence AB. Ces bons résultats a été permis grâce à des rendements corrects chaque année.
En revanche, pour la variété Vertige, la modalité BIO Poules présente une marge « brute » cumulée en 2024 négative (-12 120 €/ha), très inférieur à la référence AB. Ces mauvais résultats sont la conséquence de rendements très faibles en 2022 et 2024.
Ainsi, le système BIO Poules avec une variété peu sensible aux maladies telle que Tom Cot est une combinaison permettant une bonne rentabilité.
Note de 0 à 6 (0 pas satisfaisant, 6 très satisfaisant).
Le système est performant sur l’aspect environnemental. Si la variété implantée est peu sensible au monilia, les rendements sont corrects et les marges brutes sont bonnes. La qualité des fruits est correcte.
Un contrat avec une éleveuse a été passé pour mettre en place le parcours des poules sur la parcelle. La prestation a été estimée au prix fixe de 4380€/an. Ce prix est basé sur le temps de trajet entre l’exploitation de l’éleveuse et le site (15 min), multiplié par le nombre de trajets par an. Il n’est pas dépendant de la surface du verger : plus le verger est grand, plus cette charge diminue par hectare.
La gestion des poules revient à l’éleveuse (achat de la nourriture, nettoyage du poulailler, gestion du lot…), les bénéfices de la vente des œufs aussi.
Le contrat permet à l’éleveuse de bénéficier d’une parcelle à disposition et de s’affranchir du prix du foncier. Les arbres apportent de l’ombre aux poules, et une protection contre les prédateurs. Dans cette collaboration, l'arboriculteur comme l'éleveur y trouve un avantage.
En 2023, la crise de la grippe aviaire à l’échelle nationale a nécessité la mise en place des moyens de protection. Sur BIO Poules, les poules ont été protégées par un filet anti-moineaux, attaché entre les rangs. Pour continuer à garder l’homogénéité de la parcelle vis-à-vis de l’impact des poules, celles-ci étaient déplacées d'inter-rang en inter-rang chaque semaine. |
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A partir de 2022, celles-ci ont été prédatées par un rapace : l’autour des palombes. Ce rapace est spécialisé dans les sous-bois. Il attaque lors de son vol migratoire. Sur la parcelle BIO Poules, il pouvait tuer jusqu’à une poule par jour lors de cette période, si aucune protection n’était mise. Au total, sur les 45 poules/lot, 4 poules sont mortes en 2022. Sur un nouveau lot de 45 poules, 5 poules sont mortes en 2023.
Plusieurs techniques ont été testées pour lutter contre ce rapace. Les poules ont d’abord été confinées pendant une semaine après des attaques, puis le filet anti-moineaux installé sur un inter-rang en 2023 a suffi à protéger. Enfin, l’ouverture automatique de la porte du poulailler a été retardé de quelques heures, car l’autour attaque à l’aube. Cette technique a semblé fonctionner en 2024, elle sera remise en place par la suite.
Le système BIO Poules pourrait être utilisé comme modèle, à certaines conditions. Pour être rentable, il sera nécessaire d’adapter les techniques de lutte à la pression monilia. Si elle est élevée, alors une variété peu sensible (par ex : Tom Cot) sera nécessaire, ou l’IFT devra augmenter.
Par ailleurs, les fruits sont attractifs et de bonne qualité gustative. Une production avec un rendement correct, pourrait être intéressante car les charges restent faibles. Cette production pourrait parfaitement s’intégrer dans une ferme multi-production en vente directe.
Le système BIO Poules a maintenu un IFT hors biocontrôle de 0. En 2024, l’IFT total a été de 5,8.
Les poules fertilisent entièrement la parcelle, et entretiennent partiellement l’enherbement.
Leur impact sur les bioagresseurs est cependant plus mitigé : leur prédation sur les forficules ne permet pas une baisse des morsures sur les fruits suffisante pour se passer de l’anneau de glu sur le tronc.
L’impasse sur le cuivre est très limitante pour la production, lorsque le risque de monilia sur fleur est élevé, les rendements chutent (jusqu’à 4,7 T/ha pour Vertige). Cependant, l’utilisation de produits de biocontrôle comme le polysulfure de calcium suffit pour une variété moins sensible et floribonde (Tom Cot). Le système est en général très sensible aux maladies excepté le chancre bactérien. Il n’est adaptée qu’aux territoires à faible pression de bioagresseurs. Sa rentabilité est possible grâce à de faibles charges à condition de choisir une variété peu sensible au monilia, et de bénéficier d’une commercialisation en circuit court permettant de mieux valoriser les fruits.