Groupe DEPHY Ferme Pays de Montfort-sur-Meu
Créé en 2011, le groupe DEPHY Pays de Montfort rassemble 11 éleveurs géographiquement proches, dans le bassin-versant du Meu, sensible vis à vis de la problématique phytosanitaire. Essentiellement laitiers, les agriculteurs ont d'abord amélioré la conduite des cultures en place (maïs, blé, colza). Et puis, la crise économique de 2015 faisant, les travaux se sont portés vers une amélioration de l'autonomie alimentaire des animaux. Ces choix ont permis l'évolution de courtes rotations vers des systèmes de cultures plus robustes intégrant des cultures fourragères nettoyantes. L’autonomie protéique des troupeaux reste aujourd’hui le fil conducteur du groupe pour les membres « historiques » comme pour les éleveurs ayant rejoint récemment le groupe.
Cultures principales : maïs, blé, colza, fourragères
Spécificités du groupe : exploitations proches, recherche autonomie protéique, réduction des IFT en blé, désherbage mécanique
Lycées partenaires : Lycée agricole du Rheu en bio
Partenariats locaux : Unité de Gestion Vilaine Ouest, FDCETA 35
Le regard de l'ingénieur réseau :
Fanny Donet, Animatrice du groupe depuis 2021
L’arrivée de nouveaux agriculteurs dans le groupe en 2021 permet d’insuffler une nouvelle dynamique au groupe. Certains agriculteurs se concentrent sur l’efficience des traitements (réduction de doses, renforcement de l’autonomie décisionnelle sur la protection des cultures, etc.), d’autres y ajoutent des méthodes de substitution (désherbage mécanique, biocontrôle) et de reconception de leurs systèmes de cultures.
Tous les membres du groupe sont polyculteurs-éleveurs bovin lait et se rejoignent autour de l’autonomie protéique de leur troupeau. C’est ce qui les pousse à innover et réfléchir différemment leurs rotations. Ce sujet les rassemble mais ce sont bien les différences d’approche qui font avancer le groupe. Ainsi, des pratiques au début anecdotiques comme le désherbage mécanique et les mélanges variétaux de céréales deviennent plus systématiques, car expérimentées par le groupe.
David Bouillé, Animateur du groupe de 2011 à 2020
Accompagner un groupe comme celui-ci dans la durée est une belle aventure. Ce qui est le plus stupéfiant, c’est de constater que les certitudes du départ ont évolué ou disparu. Ce qui n’était pas envisageable, l’est devenu. C’est un enseignement majeur de ces près de 10 années passées ensemble.
Tous les exploitants avaient signé une MAE de réduction des herbicides et en même temps conservaient une logique assez systématique de sécurisation de la gestion de la maladie et de la verse. Toute la première phase a consisté à apprendre à gérer différemment les itinéraires techniques.
Pour quelques-uns, la question posée aujourd’hui se situe à l’échelle du système d’exploitation : faire évoluer ses rotations pour répondre à la volonté de plus d’autonomie alimentaire du troupeau.
Vers plus d'autonomie protéique et azotée
Les agriculteurs Dephy ont engagé des changements, depuis plusieurs années, dans leurs pratiques ou rotations. Psychologiquement, ils sont plus à même d’initier des changements plus profonds, en engageant une réflexion sur la reconception des systèmes fourragers.
Thématiques principales du groupe :
- Comment conserver une alimentation à base d’herbe ? Comment consommer moins de soja et donc produire plus de protéines ? Comment diversifier les aliments pour une meilleure santé des animaux ?
- Augmenter le garde-manger du sol pour améliorer son fonctionnement et réduire les intrants
Autres thématiques travaillées par le groupe et pistes innovantes explorées collectivement
- Incidence des pratiques sur les populations de lombriciens
- Stratégie de lutte contre le ray-grass résistant
- Test de nouveaux matériels de désherbage mécanique, en vue d’intervenir sur céréales.
- Labellisation HVE et crédits carbone
Résultats du groupe
La mise en place de stratégies combinant efficience (conditions d’intervention chimique optimales, renouvellement de matériel plus performant, réduction de doses) et pratiques de substitution (développement du désherbage mécanique, gestion alternée du labour, interculture concurrentielle) s’est généralisée.
D’autres ont introduit, dans des rotations maïs-blé, des prairies de fauche à base de légumineuses (luzerne, trèfle) seules ou associées à des graminées.
Des méteils ensilages ont été implantés entre blé et maïs, en remplacement des CIPAN.
Ce développement s’est accompagné d’une montée en gamme des chaînes de récolte pour gagner du temps.
Quelles perspectives ?
Les agriculteurs DEPHY ont engagé des changements plus ou moins profond dans leurs pratiques ou rotations. Psychologiquement, ils sont plus à même d’initier des changements plus profonds, en engageant une réflexion sur la reconception des systèmes fourragers.
En diversifiant les cultures, en introduisant des pérennes, l’effet système ne peut qu’augmenter et au final cela ne peut qu’induire une réduction du recours au produits phytosanitaires. Pour une partie du groupe, l’optimisation du système demeure la priorité dans un premier temps en s’appuyant sur les retours d’expérience d’autres membres du groupe.
Certains membres du groupe envisagent une reconnaissance plus « officielle » des pratiques agronomiques mises en œuvre. Pour deux d’entre eux, cela s’est traduit par une conversion en agriculture biologique. D’autre réfléchissent à la labellisation Haute Valeur Environnementale et aux crédits carbones avec une approche plus globale de la ferme.
Des portes ouvertes sont organisées ponctuellement, et les retours d'expérience du groupe servent de base pour communiquer auprès du grand public (comices par exemple) et sensibiliser les étudiants dans le domaine agricole.
Témoignage de la structure :
Un engagement politique
Dans le cadre du projet stratégique commun des chambres d’agriculture de France, la Chambre Régionale d’Agriculture de Bretagne (CRAB) accompagne les exploitations agricoles bretonnes, quel que soit leur système de production, vers la résilience et la multiperformance afin de réussir les transitions.
Concernant l’agronomie et les productions végétales, la CRAB entend s’impliquer fortement dans la réponse aux enjeux liés aux usages phytosanitaires : santé, attentes sociétales, sensibilité des milieux au transfert des produits dans l’eau et dans l’air, préservation de la biodiversité, attentes des distributeurs, cohésion sociale dans les territoires, image de l’agriculture.
Elle s’attachera à proposer des solutions concrètes (Recherche & Développement, Conseil et Formation) pour ne pas utiliser de phytosanitaires, lorsque cela est possible techniquement, économiquement. L’entrée en vigueur de la séparation de la vente et du conseil constitue un chantier majeur et prioritaire et le conseil stratégique phyto constitue une priorité d’actions auprès des agriculteurs.
Une poursuite des actions DEPHY
De manière opérationnelle, la CRAB poursuit son action dans le projet ECOPHYTO à travers le réengagement de 5 groupes DEPHY animés par des ingénieurs réseaux et l’engagement de 2 ingénieurs territoriaux pour accompagner le dispositif au niveau régional. Elle continue son investissement dans DEPHY EXPE à travers le pilotage des 2 projets SYNOPHYT et SYST’MOR, et sa forte participation dans le projet BEIZHECOLEG piloté par la station du CATE. Les ingénieurs réseaux et territoriaux sont d’ailleurs acteurs de ces 3 projets.
Les attentes de la structure : un transfert en interne et en externe
Les ingénieurs réseaux et territoriaux ont accumulé une solide expérience d’animation et une forte montée en compétences vis-à-vis de l’agronomie systémique. Cette double casquette d’expert-accompagnateur constitue une forte ressource qui sera mobilisée pour répondre aux enjeux affichés dans le projet stratégique.
La réalisation des conseils stratégiques phyto, l’élaboration et l’animation de formations ou de groupes d’agriculteurs agroécologiques s’appuieront fortement sur la méthode et des résultats capitalisés dans DEPHY. Des séquences de transfert et diffusion, partage, formations, tuilage seront proposées pour diffuser tous ces acquis.