Le département des Alpes-Maritimes est l’un des bassins historiques de la production française de fleurs et feuillages coupés. La filière a connu son apogée dans les années 50 pour commencer à décliner dans les années 70. Aujourd’hui le nombre d’horticulteurs s’est considérablement réduit bien que la demande soit réelle. Depuis quelques années, les fleuristes constatent une envie de retour au local de la part de leur clientèle qui est de plus en plus sensibilisée aux modes de production écoresponsables.

La production d’espèces à cycle long cultivées en hors sol sous abris chauffés est fortement consommatrice d’intrants d’origine chimique (engrais, pesticides). Les Indices de Fréquence de Traitement de référence font état d’IFT annuels supérieurs à 100 pour des espèces comme la rose et le gerbera (Paris et al., 2019). Ces emplois répétés de pesticides pour répondre à une exigence de qualité ‘Zéro défaut’ ont des conséquences néfastes sur la santé humaine et sur l’environnement avec une efficacité de plus en plus limitée en raison notamment de la sélection de populations de bioagresseurs résistants mais aussi à la diminution des populations d’auxiliaires spontanés. Au-delà des solutions développées dans un contexte de promotion de l’agro-écologie, l’objectif du CREAM est d’évaluer de nouveaux moyens de contrôle des bioagresseurs adaptés aux systèmes de production de fleurs coupées diversifiées sous-abri et de proposer des modèles de production respectueux de l’environnement, socialement et économiquement performants afin de redonner un nouveau souffle à cette filière en perte de vitesse et de faire perdurer la tradition de la production de fleurs coupées sur la Côte d’Azur.

La station d’expérimentation de la Chambre d’Agriculture des Alpes-Maritimes est située à la Gaude dans la plaine du Var entre la mer méditerranée et les montagnes. Autrefois marécageux, ce territoire a fait l'objet d'une intense mise en valeur au 20ème siècle, agricole dans un premier temps puis urbaine. Il est aujourd’hui caractérisé par une artificialisation plus ou moins marquée de l’amont à l’aval. On y distingue plusieurs grands types de milieux naturels : aquatiques, humides, ouverts, forestiers, rupestres. Le CREAM a été implanté dans une friche de plus de 1 ha située en zone ouverte, bordée par le fleuve Var et des coteaux recouverts notamment de forêts de pentes mais aussi de zones agricoles en restanques.

D’un point de vue de l’écosystème du CREAM, la diversité des espèces végétales implantées depuis la création du site est grande : jachère, cultures annuelles de fleurs coupées diverses, cultures pérennes (rosiers, Alstroemères, Proteacea...), collections de PPAM, de plantes à fleurs comestibles, de plantes adaptées à la sécheresse, verger conservatoire oléicole, verger d’espèces adaptées à une utilisation urbaine en conditions méditerranéenne. Le climat méditerranéen est favorable au développement de nombreux ravageurs que l’on retrouve régulièrement tout au long de l’année sur les cultures (pucerons, thrips, lépidoptères, cicadelles, punaises, aleurodes, …). Leur présence est d’autant plus importante sous abris. Une 1ère étude entomologique ainsi que des observations régulières sur les cultures de la station ont montré la présence de nombreux auxiliaires d’origine indigène : Syrphes, Macrolophus, Dicyphus, Coccinelles, Chrysopes, Hémérobes, Feltiella, Aphidoletes, Hyménoptères parasitoïdes des genres Aphidius, Aphelinus, Praon, Eretmocerus, Encarsia, Orius, Anagyrus, Trichogramma sp., Leptomastidea, … Cela laisse entrevoir des possibilités de lutte biologique par conservation notamment sur les cultures produites en plein champ. Les parcelles plein champ du CREAM sont certifiées en Agriculture Biologique.

Les variables collectées pour caractériser le système concernent :

• les données épidémiologiques 

  Observations hebdomadaires in situ sur chaque parcelle de l’essai. Evaluation des niveaux de populations des bioagresseurs et biodéfenseurs  sur plantes au moyen de classes d’abondance et saisie sur OAD. Ces observations sont couplées à un frappage destructif de 2 fleurs prélevées de manière aléatoire qui permet de dénombrer le nombre moyen de ravageurs et d'auxiliaires et notamment de thrips et de phytoséiides par fleur.

• les interventions culturales (biostimulants, lâchers d'auxiliaires, effeuillage, …) 
• les données climatiques 
• les récoltes avec notations du rendement et de la qualité des fleurs récoltées 1 à 2 fois par semaine en fonction de la productivité 
• les données économiques (coûts des intrants)

Des apports d’auxiliaires sont réalisés mais la valorisation de la biodiversité fonctionnelle pour bénéficier dans les abris d’un cortège important d’auxiliaires indigènes est favorisée par un environnement et des pratiques bénéfiques : zéro pesticides, nourrissage par du pollen/des oeufs d'acariens irradiés, gestion et végétalisation des abords des abris et mise en place de plantes de services.