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Système E2 - épaillage - CIRAD - CanécoH V2

Cultures tropicales Canne à sucre
Désherbage mécanique/thermique
Année de publication 2019
  (mis à jour le 19 juin 2025)
Carte d'identité du système de culture
Canne épaillée
Système conduit en
Conventionnel
Rattaché au projet
CanécoH V2
Rattaché au site expérimental
Site CIRAD
-75 % de l'IFTH
Objectif de réduction visé
Présentation du système

L’épaillage de la canne est une technique traditionnelle réunionnaise adaptée aux petites et moyennes exploitations cannières en coupe manuelle. Cela consiste à arracher les feuilles sèches adhérentes aux tiges de cannes et à les laisser en couverture du sol. L’épaillage permet de lutter contre l’érosion due aux fortes pentes et aux fortes pluies, de maintenir la fertilité des sols et de conserver l’humidité du sol. De plus, les champs régulièrement épaillés sont généralement moins enherbés que la moyenne car l’épaillage est l’occasion d’arracher manuellement simultanément les mauvaises herbes résiduelles. La consommation d’herbicides peut donc y être plus faible.

Conception du système

L'essai a débuté en 2015. L’objectif initial (des 3 premières années) était d’évaluer sur une succession de repousses dans un essai pérenne les effets directs et cumulés de l’épaillage sur la production de canne en quantité (tonnage/ha) et en qualité (richesse en sucre).

Les modalités de l'essai étaient les suivantes :

  • E0 : pas d’épaillage (témoin non épaillé) ;

  • E1 (simple) : 1 seul épaillage  à 8 mois (pratique actuelle à La Réunion) ;

  • E2 (double) : 2 épaillages, le premier relativement précoce à 5 mois et le second plus tardif en rappel à 8 mois (pratique ancienne, majoritaire autrefois à dire de planteurs vétérans).

Les effets de l’épaillage sur l’évolution de l’enherbement ont été intégrés à partir de 2018.

Ainsi le nouvel objectif était d’élargir les critères d’évaluation des effets de l’épaillage sur l’enherbement, en incorporant la gestion de l’enherbement, en greffant sur les 3 niveaux d'épaillage une gestion différentiée des adventices en cohérence avec des pratiques existant déjà en milieu producteur ou à expérimenter pour approcher le ‘zéro herbicide’.

L'essai s'est terminé en 2020.

 

Mots clés :
Epaillage - Mauvaises herbes - Herbicides - Canne à sucre 

 

Caractéristiques du système

Succession culturale de la canne à sucre

 

Gestion de l'irrigation : Aspersion

Fertilisation : Fertilisation minérale (15-12-24) à 1 t/ha

Gestion des adventices : Herbicides de pré et postlevée

Récolte : Coupe manuelle

Débouché commercial : Sucre

 

Epaillage de la canne à sucre
Objectifs

Agronomiques

  • Rendement  : Stabilité du rendement comparé au système de référence
  • Qualité  : Maintien de la richesse en sucre comparé au système de référence
Environnementaux
  • IFT : Réduction de l'IFTH d'au moins 75%

Maîtrise des bioagresseurs

  • Maîtrise des adventices : Maintenir le recouvrement du sol par les adventices sous le seuil de nuisibilité ( < 30 % de recouvrement)
  • Maîtrise ravageurs : Présence des cochenilles : comparaison entre la modalité de référence et les modalités épaillées. Les cochenilles ne sont pas les ravageurs les plus nuisibles de la canne à sucre à La Réunion. Elles ont été choisies par défauts comme sujet de comparaison. Il aurait été plus judicieux de choisir les borers (Chilo sacchariphagus) mais ceux-ci sont absents de la parcelle, efficacement protégée par des bordures d'Erianthus arundinaceum.

Socio-économiques

Toutes les opérations techniques, du désherbage à la récolte, ont été effectuées manuellement. Il a donc été choisi de suivre les indicateurs suivants :

  • Temps de travail (manuel) : estimation de l'impact de l'opération d'épaillage sur les temps de travaux.
  • Charges de main d'oeuvre :estimation de l'impact de l'opération d'épaillage sur les charges de main d'oeuvre.

 

Le mot de l'expérimentateur

" Bien que la pratique de l'épaillage soit couteuse en temps et en main d'oeuvre, elle permet aux agriculteurs de gérer les adventices sur la fin du cycle de la canne. Ces derniers profitent également de ce passage dans les cannes pour arracher les lianes présentes au stade adulte, très compétitives pour la lumière et gênant l'opération d'épaillage et de récolte. Ainsi, cette pratique a tendance à réduire l'indice de fréquence de traitement herbicides. "

Stratégies mises en œuvre :
Gestion des adventices

Tableau 1 : Leviers d'action mobilisés sur le système

Leviers Principes d'action Enseignements
Choix variétal 

Choisir la variété de canne la plus adaptée à la zone de production. 

Le choix de la variété se fait au moment de la plantation de la parcelle.

Une bonne plantation de la canne va naturellement limiter le développement des adventices grâce à sa forte biomasse. 

C'est un levier qui offre l'avantage d'optimiser les rendements et la richesse en sucre tout en facilitant la maitrise des adventices.

Fanage de la paille Répartir la paille de canne (résidus de culture) pour créer un paillage homogène. La paille de canne a été fanée en plein (sur la totalité de la parcelle).   Une quantité de paille de 12 t/ha de matière sèche est nécessaire pour limiter la levée des adventices.
Traitement chimique en plein

Le prélevée est appliqué juste après plantation ou dans les 7 jours suivant la récolte.

Les traitements de postlevée sont appliqués sur les rangs et les inter-rangs de canne lorsque le seuil de nuisibilité est atteint (30 % de recouvrement des adventices) 

Les herbicides sont appliquées en mélange et à doses réduites selon les recommandations du Réseau Herbicides d'eRcane. 

Le traitement de prélevée occupe une place importante dans la stratégie de désherbage. En effet, le prélevée est l'unique solution pour maitriser les graminées.

Epaillage de la canne Opération qui consiste à arracher les feuilles sèches de la tige de canne et d'arracher les adventices présents sur les rangs de canne, surtout les lianes. L'épaillage de la canne est réalisé entre 6 et 8 mois après la coupe.

Opération qui se substitue à un traitement chimique anti-liane mais qui est très chronophage.

A réaliser uniquement si la les lianes sont abondantes. 

Désherbage manuel  Arracher toutes les adventices qui ont résistées aux autres opérations de désherbage.  Ultime solution de rattrapage. Largement utilisé pour éliminer les grandes graminées (ex: Panicum maximum). 

 

Gestion des ravageurs

Les variétés de canne libérées par eRcane et cultivées par les agriculteurs sont tolérantes aux différents ravageurs des cultures. 

Lutte contre le vers blanc (Hoplochelus marginalis) : La lutte a été résolue à la Réunion par une lutte biologique utilisant un champignon du genre Beauveria. Cette méthode de lutte est obligatoire  par arrêté préfectoral et consiste en l’application du Betel (R) au moment de la plantation de la canne à sucre.

Gestion des maladies

La variété utilisée est la R579. Elle fait de forts rendements en canne dans les zones de basse altitude et humide (Nord/Est et Est) et sous irrigation, avec une richesse moyenne à forte en milieu et fin de campagne. Elle n'est pas sensible aux maladies graves à la Réunion.

Maîtrise des bioagresseurs

Sur l’ensemble des relevés effectués, ce sont 39 espèces qui ont été rencontrées : sept monocotylédones (5 Poaceae, une Cyperaceae, une Commelinaceae) et 32 dicotylédones de 17 familles (principalement, Asteraceae- 7 espèces, Fabaceae – 5 espèces, Malvaceae – 4 espèces, Cucurbitaceae - 2 espèces, Solanaceae - 2 espèces).

La richesse floristique qui correspond au nombre d’espèces par relevés est de l’ordre de 6,7, ce qui est relativement faible pour une parcelle de canne à sucre (12 espèces en moyenne sur une parcelle gérée chimiquement). 

Sept espèces sont parmi les plus fréquentes : Cyperus rotundus (zoumine), Euphorbia heterophylla (herbe de lait), Desmanthus virgatus (cassi), Commelina benghalensis (herbe de l’eau), Coccinia grandis, Melochia pyramidata, Bidens pilosa (piquant), Oxalis corniculata (ti trèfle), Ipomoea obscura (liane toupie), Cardiospermum microcarpum (liane poc-poc).

Rottboellia cochinchinensis (fataque duvet) n’est présent que dans une parcelle de l'essai, avec Sorghum arundinaceum (maïs cafre).

Le recouvrement des adventices a été très faible tout au long de l'essai et dans toutes les modalités. La moyenne du pourcentage de recouvrement varie de 14% à 32 %. Aucune différence significative n'a été observée entre les modalités d'épaillage.

Quelle que soit la période, la flore est largement dominée par Cyperus rotundus (zoumine) et Euphorbia heterophylla (herbe de lait). Les lianes, Coccinia grandis, Cardiospermum microcarpum, Ipomoea obscura ou Momordica charantia (margose), sont bien présentes dans l’essai, mais peu abondantes.

La couvert d'adventice ayant un recouvrement faible, il est difficile de tirer une conclusion sur l'efficacité de la pratique de l'épaillage via cet essai. De manière général, la pratique de l'épaillage permet aux agriculteurs de gérer les adventices sur la fin du cycle de la canne. Ces derniers profitent de ce passage dans les cannes pour arracher les lianes présentes au stade adulte, très compétitives pour la lumière et gênant l'opération d'épaillage et de récolte.

Performances du système

Performances agronomiques

Highcharts.com
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La modalité sans épaillage a tendance à être plus productive que les deux autres modalités (avec épaillage(s)), mais sans que les tests statistiques ne montrent de différence significative. De même, la richesse en sucre n'est pas différente significativement entre les modalités.

 

Performances environnementales

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Le désherbage de la parcelle n’a pas été différencié au cours de la campagne 2015-2016. Ce n’est qu’à partir de 2017 que les pratiques de désherbage ont été adaptées à chacune des trois modalités. Alors que le témoin de référence (parcelles non épaillées) reçoit une application de prélevée sur les zones de chargement, restées nues, les modalités épaillées ne sont traitées qu’en post-levée précoce ou en post-levée normal ; les opérations sont réalisées selon l'enherbement (recouvrement > 30 %) et localisées par taches.

C'est pourquoi les parcelles non épaillées ont un IFTH plus élevé que les parcelles avec 1 ou 2 épaillage(s). Il n'y a pas de différence d'IFTH entre les modalités 1 ou 2 épaillage(s) pour toutes les campagnes sauf pour celle de 2016-2017.

Pour la modalité avec un seul épaillage, la réduction de l’IFTH moyenne pour toutes les campagnes est de 39% par rapport aux parcelles sans épaillage, et on atteint 52%, avec deux épaillages.

A partir de 2018, l'IFTH a beaucoup diminué par rapport aux autres années, et ce, pour toutes les modalités.

 

Répartition du temps de travail et charges de main d'oeuvre

Les données des graphiques présentés sont des moyennes sur l'ensemble des campagnes.

Highcharts.com

 

Highcharts.com

 

Toutes les opérations techniques, du désherbage à la récolte, ont été faites manuellement. C'est pourquoi le temps de travail et les charges de main d'oeuvre à l'hectare sont très élevés.

Le temps de travail est plus élevé dans les modalités avec un épaillage (+ 10%) et deux épaillages (+ 22%) que sans épaillage. De toutes les opérations réalisées, c'est la récolte manuelle qui prend le plus de temps dans chaque modalité.

De même, les charges de main d'oeuvre sont plus élevées dans les modalités avec un épaillage (+ 10%) et deux épaillages (+ 22%) que sans épaillage.

Plusieurs opérations manuelles complémentaires et localisées ont été nécessaires en 2020, notamment contre les grandes graminées comme Rottboellia cochinchinensis (fataque duvet) ou Sorghum arundinaceum (maïs cafre). Ces interventions manuelles de sarclage pour l’arrachage des fataques (grandes graminées) ont nécessité 4 jours de travail pour l’essai et peuvent être estimées à environ 22 j/ha.

Evaluation multicritère
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Le radar ci-dessus présente les notes de satisfaction pour chacun des critères définis pour le système sans épaillage (en vert) par rapport au système avec 1 épaillage (en bleu foncé) ou 2 épaillages (bleu clair). Chaque critère est noté sur une échelle de 1 à 5 : 1 correspond à très défavorable, 2 à défavorable, 3 à peu favorable, 4 à favorable, et 5 à très favorable.

Les deux systèmes avec des opérations d'épaillage ont montré une réduction intéressante de l'IFTH, tout en maintenant le recouvrement des adventices sous le seuil de nuisibilité.

Sur le plan des performances agronomiques, les rendements et la richesse en sucre ont été maintenus par rapport au système sans épaillage.

Cependant, sur le plan des performances socio-économiques, la réalisation d'une ou de deux opérations d'épaillage(s) augmente considérablement le temps de travail (et sa pénibilité) et les charges.

 

 

Transfert en exploitations agricoles

Les exploitations agricoles ont tendance à utiliser de moins en moins cette technique car elle est couteuse en temps et en main d'oeuvre. Pourtant, les champs régulièrement épaillés sont généralement moins enherbés que la moyenne grâce à un double effet :

  1. le paillis, ainsi reconstitué, joue son rôle d’inhibiteur de la levée des adventices plus longtemps dans le cycle ;
  2. l’opération d’épaillage est l’occasion d’arracher manuellement les adventices mal maîtrisées, notamment les grandes graminées (Rottboellia, Panicum, Sorghum) et les lianes (Ipomoea, Momordica, etc.). La consommation d’herbicides peut donc y être plus faible.

Par ailleurs, en reconstituant le paillis de feuilles de canne au cours du cycle cultural, l’épaillage permet de lutter contre l’érosion due aux fortes pluies combinées aux fortes pentes ; le paillis entretient également la fertilité des sols par l’apport de matière organique et il conserve l’humidité du sol. De plus, les parcelles épaillées sont plus faciles à récolter.

Pistes d'amélioration, enseignements et perspectives

L’essai a subi dans l’ensemble une pression d’enherbement assez faible avec principalement Cyperus rotundus (zoumine) et Euphorbia heterophylla (herbe de lait). Les lianes, Coccinia grandis, Cardiospermum microcarpum, Ipomoea obscura ou Momordica charantia, sont bien présentes dans l’essai, mais soit à cause des applications d'herbicides, soit grâce aux opérations d’épaillage sur les modalités E1 et E2, elles ne sont dominantes à aucun moment du cycle de la culture.

Ainsi, l'essai pourrait être reconduit sur une parcelle plus enherbée pour voir l'effet de l'épaillage quand l'enherbement est plus important.

En ce qui concerne la gestion de l’enherbement, les champs régulièrement épaillés sont généralement moins enherbés que la moyenne. Il faut noter que plusieurs opérations manuelles complémentaires et localisées sont nécessaires, notamment contre les grandes graminées comme Rottboellia cochinchinensis (fataque duvet) ou Sorghum arundinaceum (maïs cafre). Sans que ce soit chiffrable, les épaillages constituent simultanément eux aussi des opérations de désherbage.

Ainsi, les opérations d'épaillage ont permis de réduire l'IFTH, tout en maitrisant l'enherbement et en maintenant le rendement de la canne. Cependant, le temps de travail et les charges de main d'oeuvre sont grandement augmentés.