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Zoom sur un levier PIC : Associer plusieurs variétés de la même espèce pour diversifier une culture

Arboriculture
Cultures légumières
Grandes cultures / Polyculture-élevage
Horticulture – PPAM
Viticulture
Année de publication
  (mis à jour le 19 jan 2024)
Source :  EcophytoPIC
Auteur :  L. Guiot
Réferences : 
Synthèse EcophytoPIC n°19

Le choix variétal joue un rôle déterminant dans la lutte prophylactique pour une démarche PIC (Protection Intégrée des Cultures). Il implique la sélection de variétés présentant une résistance ou une tolérance aux bioagresseurs. L'utilisation d'associations de variétés d'une même espèce sur une parcelle offre une diversité génétique avantageuse, se traduisant par une régularité accrue des rendements, une limitation des épidémies et une résilience face aux variations climatiques. Ainsi, l'association est défini comme un levier PIC de prévention. La recherche, qu'elle soit fondamentale ou appliquée, contribue à identifier les associations génétiques optimales pour ces mélanges pour chaque filière de production, permettant ainsi de réduire l'IFT (Indice de Fréquence de Traitement) et de limiter la dépendance aux traitements curatifs. En adoptant cette approche plurivariétale, l'agriculture peut progresser vers des pratiques plus durables, tout en renforçant sa résilience face aux défis sanitaires et environnementaux.

1. Le choix variétal à la base de l'association variétale

1.1. Quel lien entre choix variétal et association variétale

Pour introduire comment et pourquoi avoir recours à un système plurivariétal dans le cadre de la PIC, il faut comprendre ce qu'est le choix variétal. Puisque l'association variétale consiste à choisir plusieurs (au moins 2) variétés pour leurs qualités propres mais aussi pour leur complémentarité, il faut d'abord se pencher sur l'importance du choix variétal.

1.2. L'importance du choix variétal dans la PIC

Le choix variétal est déterminant pour contrôler, entre autres, le risque maladie d'une culture : c'est une mesure prophylactique. Dans une démarche PIC, la résistance/tolérance à un bioagresseur est parmi les principaux critères observés lors du choix d'une variété. La sensibilité aux bioagresseurs peut être :

  • d'origine génétique (gène de résistance)
  • d'origine calendaire (atteinte de certains stade phénologique sensibles à des dates avec de faibles pression ravageur)
  • d'origine morphologique (taille, architecture de la plante,…).

A noter que les variétés ne sont rarement multi-résistantes, le choix variétal doit donc tenir compte de l'importance des problématiques et de la possibilité de mettre en place d'autres leviers (ci-contre une sélection de leviers PIC relatifs au choix variétal). Dans l'objectif de réduire l'IFTH (IFT des Herbicides) d'une culture, la vitesse et le taux de recouvrement de la variété peut aussi être une caractéristique recherchée.

1.3. L'application du choix variétal dans les filières

Le choix variétal dans le cadre de la lutte préventive contre les bioagresseurs est un recours courant dans plusieurs filières de productions dont voici quelques exemples :

  • en grandes cultures pour lutter contre le sclérotinia sur tournesol par exemple
  • en viticulture, un observatoire "OsCar" sur cette thématique à même été déployé : observatoire national du déploiement des cépages résistants
  • en arboriculture, un groupe DEPHY FERME sur les pommes de Charentes travaille sur 3 thématiques dont l'une est l'évolution progressive de la gamme variétale vers des variétés résistantes ou tolérantes aux races communes de tavelure.

Pour accompagner les agriculteurs dans le choix des mélanges, Arvalis et TerreInovia ont produit 2 outils, Les Fiches Variétés et myVar respectivement, qui référencent les variétés disponibles pour les espèces de leurs filières.

1.4. Des CEPP pour valoriser les tolérances/résistances lors du choix variétal

C'est parce que le choix variétal peut avoir un effet significatif sur l'IFT, et que la stratégie nationale est de réduire celui-ci, que le gouvernement a mis en place des fiches CEPP (Certificat d’économie de produits phytopharmaceutiques) sur ce sujet. Un total de 7 fiches CEPP concernant le choix variétal sont disponibles ci-contre.

2. La mise en application de l'association variétale par les agriculteurs

2.1. Quelle est la méthodologie de la mise en place de cette pratique ?

Les associations ou mélanges variétaux consistent à semer ou planter différentes variétés sur une même parcelle, cette pratique est déjà identifiée comme un levier PIC par de nombreux acteurs du secteur de la production végétale. En effet, cette pratique amène une diversité génétique qui présente de nombreux intérêts :

  • Meilleure régularité des rendements interannuels
  • Limite dans certains cas les impacts et la progression des épidémies parasitaires et des ravageurs
  • Évite certains accidents comme la verse et présente notamment une plus grande souplesse vis-à-vis des écarts climatiques
  • Maintient la résistance variétale en limitant son contournement.

Outre ces avantages, cette technique complexifie la gestion de l'ITK (Itinéraire Technique de Culture), ce qui peut nécessiter l'acquisition de nouveaux savoirs, savoirs-faire et matériels.

2.2 Exemple : les mélanges variétaux pour lutter contre les méligèthes du colza

Des agriculteurs ont déjà recours à cette pratique plébiscitée pour des problématiques ciblées. Par exemple, pour limiter les dégâts de méligèthes et l’utilisation des insecticides sur colza, la fiche contrat de solution n°40 incite à mélanger une variété à floraison très précoce avec la variété d’intérêt . Ainsi, quand la variété d’intérêt est au stade sensible, les méligèthes se dirigent préférentiellement sur les fleurs ouvertes de la variété très précoce, ils sont donc moins nuisibles à la variété d’intérêt. Des initiatives personnelles vont au-delà de ces recommandations, comme en témoigne un agriculteur ci-dessous.

Contenu
Méligèthe du colza

Dossier

Ravageur - Brassicogethes aeneus (Meligethes aeneus), Brassicogethes viridescens - Classe: Insectes

Année de publication (mis à jour le 08 fév 2021)

Source : EcophytoPIC

Je compose systématiquement des mélanges de trois hybrides pour mieux répartir les risques dans la parcelle, selon les précocités ou les caractéristiques des différentes variétés. Sur nos 80 ha de colza, je sème en général deux mélanges différents, un précoce et un demi-précoce. Je leur associe en plus [une] variété très précoce […] qui va piéger les méligèthes en fleurissant plus tôt. Dans les mélanges, je privilégie aussi les variétés tolérantes au virus TuYV. Même si les pucerons qui le véhiculent ne sont pas les insectes qui posent le plus de souci dans le colza, ces hybrides m’évitent d’avoir recours à un insecticide chimique si des pucerons apparaissent. (Louis Ferry - 06/07/2021 pour placedesagriculteurs.com)

2.3. Des agriculteurs du réseau DEPHY ont observé des effets positifs de cette pratique en grandes cultures

Les groupes et acteurs du réseau DEPHY Ferme ont participé à la mise en avant des mélanges variétaux en grandes cultures, puisque nombreux d'entre eux y ont eu recours et ont noté des effet positifs sur la pression bioagresseur et par conséquent leur IFT. L'équipe d'EcoPhytoPIC vous a fait ci-dessous une sélection de groupes ayant noté ces effets positifs :

3. La recherche et l'expérimentation produisent des références qui poussent la pratique

3.1. La recherche fondamentale est à l'origine des grandes avancées dans la compréhension des processus expliquant les effets des systèmes plurivariétaux

Pour accompagner les producteurs et les conseillers dans la mise en place des associations variétales à la parcelle, la recherche fondamentale se penche sur le sujet depuis plus de 15 ans maintenant. En effet, en 2007, F. Didelot et al. publiaient déjà un papier sur l'effet des des mélanges de cultivars sur la lutte contre la tavelure dans les vergers de pommiers (voir articles ci-dessous (ENG)). Plus récemment, des chercheurs ont analysé cette pratique avec un angle génétique dans l'objectif de travailler sur la variabilité des performances liées à sa mise en place. En lien avec la PIC, ils ont d'abord confirmé que les mélanges conduisent, en moyenne, à moins de maladie (et plus de productivité) que les productions monovariétales. Leurs résultats (voir articles ci-dessous (ENG) / voir communiqué de presse) ont pourtant mis en avant une région de l’ADN qui corrèle "présence de diversité dans le mélange" à "production moindre" et à "sensibilité accrue à la maladie". Ils concluent donc que les effets positifs de la diversité des mélanges peuvent être contrecarrés par des associations de variétés à la génétiques présentant certaines zones du génome défavorables. Une perspective à ce travail serait d'identifier les régions génomiques qui affectent la performance des mélanges pour guider les agriculteurs dans la compositions des associations à faire ou ne pas faire pour atteindre de bonnes performances.

3.2. La recherche appliquée, plus proche des agriculteurs, fournit des connaissances actionnables sur le sujet

La recherche fondamentale proposant rarement des connaissances actionnables, des agriculteurs volontaires s'impliquent dans des projets de recherche appliquée (portés par des chambres, instituts techniques, coopératives...) pour participer activement à la création de références techniques. C'est la cas de Cédric Pradelles, producteur de céréales, qui s'est impliqué dans le projet Aglae. Il témoigne dans la vidéo ci-contre de l'effet de ses mélanges variétaux de blé en valorisant l'association de variétés ayant :

  • des hauteurs différentes (meilleures tenues face à la verse)
  • des teneurs en protéines différentes (obtention de résultats plus réguliers)
  • un léger décalage de précocité (atout en cas d’attaque de fusariose ou d’accidents climatiques au cours du cycle).

3.3. Exemple : le projet Z pour le conception d'un verger ambitieux incluant la diversité variétale parmi de nombreux autres leviers PIC

Le projet Z, conduit par l'INRAE de Gotheron, est à l'intersection entre la recherche fondamentale et la recherche appliquée. S'étalant sur une période de 2015 à 2030, ce projet ambitieux vise à repenser complètement ce qu'est un verger en combinant de nombreuses pratiques, dont l'association variétale, afin d'atteindre une production de fruits sans pesticides. La première phase d'évaluation du projet s'intègre dans le cadre du projet DEPHY EXPE ALTO. Dans ce verger circulaire, l'association variétale n'est qu'un levier parmi près d'une dizaine mobilisés dans le  projet Z et pourtant il a une place importante car il y a de la diversité variétale :

  • sur le rangs : association de 2 variétés sur les rangs d'abricotier, idem pour les espèces pruniers/pêchers/pommiers
  • entre les rangs pour la production de pommes, avec un total de 8 variétés réparties en 4 associations de 2 variétés par rang.

Le plan d'expérimentation du module 1 (ci-dessous) permet de visualiser l'agencement spatial des différentes zones d'association variétale par espèce, mais aussi de visualiser les autres leviers PIC prophylactiques mis en place :

Schéma projet Z (v4)

 

Ce projet s'inscrit parfaitement dans la dynamique de la PIC dont l'objectif est de réduire l’utilisation des pesticides grâce à « la prise en considération attentive de toutes les méthodes de protection des plantes disponibles » (paragraphe 6 de l’article 3 de la directive 2009/128/CE). En effet, ce verger combine près d'une dizaine de méthodes prophylactiques dont l'effet cumulé est en cours d'analyse.

-> Ce projet illustre ainsi que, même si un levier PIC est considéré comme efficace par la communauté scientifique et par les utilisateurs, il est probablement avantageux de le coupler à d'autres levier pour maximiser les effets attendus : ici, la possibilité d'un verger zéro phyto.